ANKARA - Turquie News, lundi 20 août 2007 - Quatre mois après la mise en échec de sa première tentative, Abdullah Gül, ministre turc des Affaires étrangères, issu de la mouvance islamiste, soumet une nouvelle fois ce lundi aux voix des députés sa candidature à la présidence du pays.
Gül apparaît comme le favori de l’élection à la présidence de la République, dont le premier tour se déroule aujourd’hui au Parlement.
Au mois d’avril, les milieux laïcs et républicains étaient descendus dans les rues par millions et avait obtenu l’invalidation du scrutin en boycottant le vote. Cette crise politique avait donc débouché sur l’organisation d’élections anticipées. Mais tenus le mois dernier, elles ont de nouveau amené les islamistes de l’AKP au pouvoir, au grand soulagement de l’Union Européenne et des Etats-Unis qui voient en l’ultra-libéralisme de l’AKP leur meilleur allié en Turquie.
Le chef de l’AKP et premier ministre Recep Tayip Erdogan et son bras droit Gül ont maintes fois prétendu qu’ils n’étaient pas des fondamentalistes. Mais le passé sulfureux de Gül et les tentatives de son épouse de porter le "droit au port du voile" devant des cours de justice internationales affirment le contraire. Le port du voile islamique est strictement interdit en Turquie dans les universités et les administrations publiques.
Il est peu probable que M. Gül soit élu lors du premier tour de scrutin qui débute lundi à 15H00 (12H00 GMT), ni lors du second vendredi, l’AKP ne disposant pas des 367 voix -soit les deux-tiers des 550 députés- requises.
Malgré tout, Gül est donné victorieux, a priori au troisième tour prévu le 28 août, inquétant vivement les milieux républicains qui craignent de voir la laïcité s’affaiblir avec son arrivée à la présidence, farouchement soutenue par l’UE et les USA.
Les deux autres candidats auxquels Gül est confronté sont Sebahattin Cakmakoglu (MHP, ancien ministre de la Défense), et Hüseyin Tayfun Icli (DSP, ancien ministre d’Etat). Pour être élu, un candidat doit réunir les deux-tiers des voix, ou bien attendre le troisième tour de scrutin, qui se tient lui à la majorité simple. Les chances des deux autres candidats restent faibles.
Le chef de l’Etat a des fonctions largement symboliques, mais c’est lui qui nomme les hauts fonctionnaires et il peut s’opposer temporairement à l’entrée en application d’une loi adoptée par le Parlement. Il est fort probable qu’une fois président, M. Gül nommera des islamistes dans les institutions d’Etat chargées d’assurer le respect de la laïcité -comme la Cour constitutionnelle ou le Conseil de l’enseignement supérieur ; tout comme l’a fait l’AKP au plus bas de l’échelle pendant ses quatre années au pouvoir.
Il y a dix ans, l’armée, avec le soutien de la large majorité du peuple turc, avait poussé le premier gouvernement islamiste de l’histoire turque -dont M. Gül était membre en tant que ministre d’Etat et porte-parole- à la démission. Aujourd’hui l’AKP prétend avoir abandonné toute référence à l’islam politique et se présente comme un parti "démocrate et conservateur, respectueux de la laïcité".