La reconnaissance par la Turquie du "génocide" a-t-elle une valeur juridique ?

Actualité l’exige, nous remettons en ligne l’article concernant notre reportage de l’éminent historien, le professeur Ilber Ortaylı
Turquie News a le plaisir de vous présenter la traduction française du reportage réalisé au mois de mai 2015 par notre équipe en langue turque de l’éminent historien, le professeur Ilber Ortaylı, la vidéo est visionné plus de deux cent mille fois sur YouTube. Y sont abordés les relations entre la Turquie et les pays européens à travers l’histoire récente.
Traduction faite par Ilker Tekin.
Professeur. Dr Ilber ORTAYLI né le 21 mai 1947 à Bregenz, L’éminent historien, İlber Ortaylı est diplômé de l’université d’Ankara, département de sciences politiques, et a étudié les langues orientales et slaves à l’université de Vienne. Ses domaines de recherche incluent, entre autres, l’histoire et la vie culturelle et politique de l’Empire Ottoman. Il est auteur de nombreux ouvrages et articles, vice-président du CIEPO (Comité International d’Études Pré-Ottomanes et Ottomanes) et membre du Comité Européen d’Etudes Iraniennes. Il a également présidé pendant plusieurs années le palais de Topkapi à Istanbul et donne des cours d’histoire à la faculté de droit à l’Université Galatasaray, Largement connu pour être polyglotte, il parle, en plus du turc, l’ottoman, le tatar, l’arabe, le français, l’allemand, l’anglais, le russe, le perse, l’italien, le latin, le grec, le slovaque, le roumain, le serbe, le croate et le bosnien
Ses livres
Defterimden Portreler
İlber Ortaylının Gözünden İran
Türkiye’nin yakın tarihi
Osmanlı İmparatorluğu’da Alman
İmparatorluğun En Uzun Yılı
Gazi Mustafa Kemal Atatürk
Cumhuriyatin İlk Yüzyılı 1923-2023
İlber Ortaylı Seyahatnamesi
İttihat ve Terakki
Türkiye Teşkilat ve İdare Tarihi
Osmanlı’yı Yeniden Keşfetmek
Batılılaşma yolunda
İmparatorluğun Son Nefesi
Osmanlı’da Değişim ve Anayasal
Tarih Yazıcılık Üzerine
Şehir ve Kültür - İstanbul
Tarih Sohbetleri
Türkiye’nin Yakın Tarihi
Tarihin İzinde
Tarihin Işığında
Surların Öte Yanı Zeytinburnu
Ankara Sanat Tiyatrosu 50+1 yıl
Osmanlı Toplumunda Aile
Türklerin serüveni
Türklerin Altın Çağı
Hukuk ve İdare Adamı Olarak
Türklerin Tarihi 2
Osmanli’ya bakmak
Türklerin tarihi
İstanbul’dan Sayfalar
Resmî Tarih Yalanları
Cumhuriyet’in İlk Yüzyılı
Yakın Tarih Gerçekleri
Osmanlı Düşunce Dünyası ve Tarih Yazımı
Osmanlı Mirası
Osmanlı’da Milletler ve Diplomasi
Avrupa ve Biz
Tarihimiz ve Biz
Tarihin Sınırlarına Yolculuk
Son Imparatorluk Osmanlı
Tarihe Yön Veren 100 Lider
100. Yılında 1. Dünya Savaşı
Ottoman Studies
İmparatorluğun En Uzun Yüzyılı
Gelenekten Geleceğe
Eski Dünya Seyahatnamesi
Üç Kıtada Osmanlılar (en arabe)
Osmanlı Barışı
Engin Akgürbüz : Un article est paru la semaine dernière qui pose la question des conséquences pour la Turquie si elle reconnaissait le « génocide arménien » ? D’après l’article, une des conséquences serait d’ordre juridique. La reconnaissance par la Turquie du génocide a-t-elle une valeur juridique ?
Ilber Ortayli : Oui, néanmoins comme elle n’est pas réaliste cela entraînera très rapidement une réaction, à savoir qu’une reconnaissance juridique vous placerait dans la position de l’Allemagne nazie et sans avoir la force, la puissance de l’Allemagne.
Les 5 millions de Turcs en Europe sont de la classe ouvrière, c’est-à-dire appartiennent à la classe moyenne et basse des sociétés européennes, si bien qu’ils seront écrasés, cibles de discriminations et d’injures sur les plans moral et matériel.
En effet, ces classes sont celles où la concurrence est la plus féroce.
Évidemment, comme cela ne peut pas être réaliste, les gouvernements qui accepteraient une telle qualification placeraient les générations futures sous de lourdes réprobations, qu’ils porteraient également.
Cela ne s’apparenterait pas aux accusations faites aux unionistes, au Sultan Hamid, ou celles tout à fait gratuites concernant la période du parti unique, mais serait placé du côté de la trahison.
Ces considérations ne sont pas personnelles mais objectives. Je ne peux concevoir un gouvernement qui engagerait la Turquie sur un tel chemin sans issue.
Une seconde approche soutenue par certains groupes consiste à affirmer que les événements de 1915 sont le fait des unionistes et non de la Turquie moderne, hier nous en avons eu une autre version affirmant que ces événements sont de la responsabilité des Ottomans, il faut savoir que cette approche n’est pas valable sur les plans des concepts de continuité et de responsabilité.
Il ne fait aucun doute que ceux qui avancent de telles idées ne font pas preuve d’une grande intelligence.
Il est nécessaire que la Turquie et l’Arménie soient en de bons termes, car dans cette région, ce sont les deux peuples pouvant vivre ensemble et commercer, étant les plus proches en termes de pensées, de mentalité, de discipline de travail.
Ce vivre ensemble sera impossible si l’un des deux peuples s’emploie indéfiniment à saper l’autre.
De la même manière, la Turquie ne pourra pas avoir de l’influence dans cette région si elle néglige, mésestime l’Azerbaïdjan.
Ainsi, il est nécessaire que ces trois pays règlent ensemble leur différends. Ceci n’est donc pas une idée personnelle, ce n’est pas le genre de question où l’avis personnel importe, ni le mien ni même celui des hommes d’Etat, car ce sont des décisions contraignantes, difficilement surmontables, ce ne sont ainsi pas des décisions politiques à prendre de manière improvisée, un homme d’Etat qui s’engagerait sur un tel chemin devrait avancer avec le plus de justesse possible et concevoir la question dans toute son envergure.
EA : les faucons de la diaspora arménienne avancent ces jours-ci qu’une reconnaissance du qualificatif de « génocide » ne sera pas suffisante, réclamant en outre des réparations financières et territoriales.
Ilber Ortayli : il n’en saurait être question.
L’Armenia historique, qui était effacée de nos cartes, est géographiquement bien définie, c’est une région dans l’Est de l’Anatolie et l’autorité qui céderait ces territoires ne pourra contrôler le chaos qui s’en suivrait.
Ce sont ainsi des vœux pieux.
En considérant la situation mondiale de ces 50 dernières années ainsi que notre développement économique, je n’accorde aucune probabilité à ce que le peuple turc paye de telles réparations dont le caractère est plus qu’excessif, aucune partie n’a reçu de telles réparations.
Même l’Allemagne fédérale, prédécesseur de l’Allemagne nazie n’a pas payé de telles réparations.
Ce sont là des considérations tout à fait utopiques.
Il y a dans la diaspora des avocats et des journalistes utopistes, ceci n’est pas le monopole de la communauté arménienne, c’est valable pour toute communauté.
Dans toute communauté une partie des hommes de talent, des élites est ainsi utopiste, ceci est particulièrement visible en Europe et aux États-Unis.
Par exemple, dans une communauté de moyenne taille, une partie des hommes d’affaires de talent, des médecins, des ingénieurs, des architectes, des rois médiatiques, s’emploieront à magnifier cette communauté, à porter ses revendications exagérées.
Tout avocat juif américain de la seconde génération se prépare ainsi à devenir Président d’Israël, plutôt, humorise-t-on, qu’il est il prêt, mais manque de patience.
Il en va évidemment de même pour les Arméniens.
En fait, la diaspora arménienne aux États-Unis, qui réclame plus qu’elle ne produit, est une lourde charge pour l’Arménie.
Ce n’est pas une affirmation personnelle sur une question qui ne me regarde pas, mais le constat des Arméniens eux-mêmes. Ces utopies et excèssivités ne porteront pas les deux peuples, ces deux États qui partagent une aire commune vers des objectifs positifs.
A contrario ne pas prêter l’oreille à ces excessivités ne peut être que profitable pour les deux parties.
E A : un des anciens Président arménien Levon Ter-Petrossian et ancien premier ministre et président turc Suleyman Demirel auraient conclu de créer des liens culturels et économiques sans préconditions politiques, ne sachant pas le degré de véracité de telles affirmations, je vous pose la question.
İlber Ortaylı : ceci est tout à fait en adéquation avec la politique de Demirel : construisons des routes, des ponts, rallongeons les voies ferrées, développons le commerce, qu’on vienne faire du commerce ici, qu’on aille faire du commerce là-bas.
Ainsi, les hommes d’affaires d’Arménie conçoivent et abordent les problèmes d’un tout autre point de vue,
il en a été de même dans l’histoire.
C’est le parti Ramgavar qui est le parti bourgeois des Arméniens, ces membres ont une approche tout autre vis-à-vis de l’Empire.
Ainsi, l’information est véridique, de même que les objectifs sont positifs.
Si les événements se développent dans ce sens, cela sera positif, il est primordial que les hommes confrontent toujours leurs idéaux, utopies et excessivités à la réalité.
Bien que le tremblement de terre en Arménie ait eu lieu il y a des années, l’Arménie n’a pu se redresser sur le plan infra-structurel.
Il y a un bon nombre de familles qui quittent l’Arménie chaque semaine.
C’est n’est pas un peuple nombreux, il y a encore des gens qui travaillent ici ou ailleurs et il est difficile de créer une patrie dans ces conditions.
Ainsi, comme je l’ai dit, ces revendications ne trouveront pas d’issues favorables, vous ne pouvez ainsi pas porter des revendications qui ne soient pas réalistes et qui ne trouveront pas d’échos.
De ce point de vue, il faut que les deux parties reviennent à la raison, c’est la condition pour un meilleur avenir.
Il faut la conscience que les deux pays doivent aller ensemble et qu’il n’est pas possible que chacun fasse malgré l’autre en passant par un tiers.
EA : il y a également le pan Union européenne de la question, en 1987, le Parlement européen a pris une décision affirmant que « l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne est soumise à la reconnaissance du génocide arménien. »
İlber Ortaylı : qu’elle n’y adhère pas de toute manière.
L’Union européenne n’est pas un lieu très attractif, c’est une union qui n’a plus le sens de ses frontières.
Elle a été fondée par deux hommes d’État qui sont de Gaulle et Adenauer, que vous les appréciez ou non, que vous soyez ou non de leur bord politique, ce sont des hommes d’État d’envergure.
La France n’a pu continuer les démarches entreprises au temps de de Gaulle, général que tous apprécient, de même Adenauer, dont la pensée est fondatrice de l’Allemagne moderne, épaulé par un ministre de l’Économie tel que Ludwig Erhard.
Ce sont là des leaders qui utilisent judicieusement les capacités économiques du peuple.
Ces leaders ont fondé l’Union européenne, à laquelle a été joint le BENELUX, qui est une petite union et l’Italie du Nord évidemment, pas davantage, lorsque de Gaulle a rejeté l’Angleterre, Adenauer n’y a pas fait une grande objection.
Que ce soit la Pologne, la Hongrie, Adenauer n’en aurait pas voulu, quand bien même leur porte aurait été ouverte, il n’aurait pas même voulu de l’Allemagne de l’Est, qu’il aurait considéré comme un problème, encore moins des Balkans.
Qu’avons-nous affaire là-bas ? Cette union est d’abord économique et le peuple turc a commencé à comprendre qu’il n’a pas d’intérêts à adhérer à ce type d’ensemble économique, que cela sera une charge sans gains, il n’y a, de ce fait, rien à en attendre.
Nous ne pouvons expecter de bénéfices à l’instar des pays modestes tels que la Grèce, Chypre, Malte ou le Portugal, car nous sommes un pays très nombreux.
Ainsi, cette condition d’adhésion n’est pas une menace, et sera considérée comme non-sérieuse avec le temps, ces questions requièrent du sérieux.
Cette condition est très mise en avant par l’Allemagne, avec la croyance que cela l’absoudra elle-même, et de quoi ? Il y a devant l’Allemagne une magnifique histoire civilisationnelle, Beethoven, Goethe, on peut penser à Hegel, ou un renom de gauche comme Marx, il y a une telle image allemande, néanmoins cette image a été mise à mal,
à mon époque le mot Allemand était synonyme de boucher, une génération entière s’est dévouée pour effacer cette image,
c’est afin de changer cette image que l’Allemagne déploie ces efforts, ce qui est compréhensible.
Néanmoins, cette volonté de vouloir redorer son blason ne peut se faire au détriment des Turcs, car ceci ne correspond pas à la réalité.
Personnellement, je ne me révolte pas contre cette situation en prenant position du fait que je sois Turc, penseur, ou que je proteste en tant qu’élite, non, lorsque j’examine de l’extérieur et de sang-froid les faits, une quelconque communauté ne peut pas se plier à ce genre d’imbécillité afin d’absoudre d’autres personnes.
De nos jours, certains groupes d’opposition, jusqu’à, peut-être, le gouvernement, les autorités publiques peuvent entreprendre de telles approches, qui n’augureraient néanmoins rien de positif, ceux qui entreprendraient ces démarches le regretteraient, non pas dans le sens d’une menace, mais le courant auquel ils appartiennent se trouverait entaché et serait effacé de l’avenir historique, ces gens seraient personnellement entachés historiquement en Turquie, ce qui ne serait pas une approche plaisante, de ce fait personne n’en a et n’en aura le courage, ce qui est évident,
ceux qui écrivent dans ce sens, seront soit oubliés, soit donnés comme exemples risibles, il faut être logique.
Il faut que le peuple turc et le peuple arménien et seulement eux, en mettant de côté les Yves Ternon ou les Tessa Hofmann, les Allemands avec les Français qui ergotent en toute ignorance, se parlent directement, tantôt dans la discorde, tantôt dans la concorde, ce qui doit être fait dans le temps, et ce qui est possible et dans un court laps de temps,
la solution du problème passe par la rencontre de ces deux parties et de leur conscience des bienfaits de la concorde, et ceci doit être fait en adjoignant l’Azerbaïdjan.
S’appuyer sur des tiers est une voie sans issue, et une consœur arménienne, Claire Muratyan, a récemment écrit un article qualifiant le problème de « sans fin », c’est une historienne arménienne sérieuse, de génération plus jeune que la mienne,
son désespoir doit faire réfléchir chacun,
il en va de même pour nous, cela passe par le vivre ensemble,
le fait de discuter et d’examiner des questions qui nous concernent, et non avec des journalistes, des historiens occidentaux de seconde zone,
car il n’y a personne de sérieux derrière ces mouvements en Occident, même si des historiens apparemment très sérieux, participant à l’ambiance générale, disent « pourquoi pas » du coin de la bouche, néanmoins ce soutien est incertain.
Ce ne sont pas des questions qui doivent trouver réponse au marché de l’opinion, cela est très important, car cela concerne les habitants d’une même aire géographique, qui, de toute évidence, doivent régler ces questions ensemble.
Par exemple, un certain Taner Akçam fait une fixation sur le non-accès aux archives,
Taner Akçam n’est pas un confrère ayant la capacité d’étudier des archives,
vous le mettriez aux archives qu’il ne pourrait rien en lire,
c’est une personne ayant étudié l’histoire sur le tard, ce qui n’est pas un défaut, néanmoins, il faut du sérieux si vous vous engagez sur une voie. Ce qu’est une archive, il ne le sait pas, il ne saurait pas l’expliquer même si je lui expliquais, car il faut travailler.
Quelque soit l’intelligence de votre interlocuteur, quelque soit votre capacité d’enseignement, vous ne pouvez pas expliquer une opération chirurgicale à une personne n’ayant étudié la médecine, ni manié un bistouri,
de même vous ne pouvez pas expliquer les archives à ce monsieur, qui ne peut que faire de la spéculation concernant ce que sont des archives.
Les personnes accédant aux archives, ceci est très intéressant, regardent les événements d’un tout autre point de vue, non nécessairement de manière opposée, chacun à la liberté d’interprétation,
c’est ceci qui doit advenir, qui doit être mis sur la table, sur la question des réparations, il y en a de différentes sortes, telles que la restitution matérielle personnelle ou du domaine public, églises, cimetières sur lesquels des constructions sont venues s’ajouter, tout ceci sont des questions d’une importance qui exige qu’elles doivent être débattues sérieusement et dont la résolution ne peut obtenue d’être livrée à des slogans.
EA : un citoyen grec du nom de Nicos Lygeros, qui a été un temps conseiller des gouvernements de Grèce et de Chypre, affirme dans un de ses écrits que les signataires du traité de Kars se dédouanent, suivant l’article 15, les uns des autres de leurs crimes, ambitionnant d’ouvrir une page blanche, ce traité n’a-t-il pas de caractère contraignant ?
Ilber Ortaylı : il y a en effet l’article 15 du traité de Kars-Moscou, mais comme je l’ai dit, dans cette situation, ce ne sont pas des gouvernements qui s’opposent de manière directe.
Même au temps de l’Union soviétique, qui représentait un énorme spectre et était une superpuissance mondiale, qui soutenait particulièrement l’Arménie, bien que toutes les parties de l’Union soviétique aient été en principe égales, mais certaines l’étaient plus que d’autres, ce traité n’a pas été remis en cause, la question est qu’en instrumentalisant cette tragédie, on crée continuellement des tensions entre les gens et les peuples, c’est cela qu’il faut régler.
EA : en Europe et particulièrement en France est-il normal que cette question soit instrumentalisée à chaque élection ?
Ilber ortaylı : c’est le pays dans lequel la diaspora arménienne est la plus nombreuse,
la situation en Allemagne est différente,
ils ont, par exemple, attendu le Pape, ce qui, de son point de vue, est une erreur, cela la regarde,
celui qui est installé sur un trône de verre lance des pierres avec précaution, elle a commis une erreur, il faudrait, bien que cela la regarde, qu’elle réfléchisse à cela.
Comme je l’ai dit celui qui est assis sur un trône de verre ne devrait pas lapider les autres et l’Allemagne n’est pas un pays et une population à pouvoir tenir tête à la terre entière, tout peut changer très rapidement, des unions inattendues peuvent se créer et l’accuser.
Malheureusement, l’Allemagne est un pays, qui depuis des siècles et sa création moderne et après Bismarck, a une politique extérieure chimérique,
l’histoire montre qu’elle n’a jamais eu des propositions et des visions réalistes et qu’elle ne s’est pas vraiment modérée depuis la Seconde Guerre mondiale,
elle se place dans la position d’un pays créant des tensions alors que du fait de sa puissance et de sa position elle a besoin, plus que tout autre, de la paix, d’un fleuve tranquille, ce qui lui est vitale.
EA : l’intervention du Pape dans cette question, ne lui confère t-elle pas un caractère religieux ?
Ilber Ortaylı : non, car ce caractère religieux est déjà présent,
les Arméniens sont chrétiens, d’ailleurs, 20 ou 30% de la population arménienne est catholique de Rome et représente une des parties importantes de l’Église,
ils détiennent une part de la richesse de l’Église, en commençant par l’île de San Lorenzo à Venise etc. donc il s’implique dans cette question.
Personnellement, n’étant pas chrétien, je ne peux avoir une relation de croyance avec ses dires.
Pour parler ouvertement, je ne pense pas que ce Pape soit aussi savant que son prédécesseur, il n’est pas au niveau de Jean-Paul II non plus, ni même au niveau des Papes Pie XII et Paul II.
Pie XII était un grand spécialiste germaniste et son pontificat est qualifié d’époque opportuniste du fait que l’Église ait fermé les yeux sur les exactions nazies, ce qui lui est aujourd’hui encore reproché.
Sur le plan du savoir, ce Pape n’est pas au niveau de Innocent II, encore moins un Pape du XVII siècle.
Son élection date de l’année dernière (à la date du reportage) et quelle sera son action future, on ne saurait le conjecturer, peut-être qu’il ne fera rien.
Ses dires n’ont pas une grande portée, ce, qu’à long terme, influence la philosophie aucune autre discipline ne peut le faire, que le Pape soit considéré comme « infaillible » concerne uniquement la communauté des croyants. Ouvrons une parenthèse, au XVII siècle à la suite du second siège de Vienne, celui qui avec réussite organisa la ligue des Croisés était le Pape, qui était, par ailleurs, par son mode de vie, sa pensée, le précurseur des Papes modernes.