Sa femme et ses amis n’étaient pas au courant, lorsque la police a révélé, hier, l’identité du héros qui a empêché l’assassinat de la jeune fille de 14 ans torturée et violée, dans la nuit du vendredi 27 au samedi 28 août, à Montargis. À 29 ans, Oguzhan Akisti ne fanfaronne pas. Il en aurait le droit. « Je fais 1 mètre 86 pour 98 kilos. J’ai fait six ans de boxe thaï. » De quoi éloigner la canaille. Et la mettre hors d’état de nuire.

Il est 2 heures du matin, samedi, au bord du canal de Briare. Oguzhan Akisti attend quelqu’un sur les marches de l’escalier qui mène au chemin de la Collerette. À quelque 20 mètres de là, au beau milieu des arbres, deux hommes frappent une silhouette. Au début, Oguzhan Akisti n’arrive pas à identifier le sexe de la victime. Les tortionnaires, qui portent des capuches, sont en train de lui mettre des coups de poing sur tout le corps. Ils lui couvrent la bouche avec du gros Scotch.

« J’ai entendu une voix de fille. Elle disait : “Arrêtez, arrêtez.” J’ai demandé : “Mais qu’est-ce que vous faites ?”, ils ont couru dans ma direction. »

Pour un paquet de cigarettes

D’autres auraient pris la tangente. Pas Oguzhan Akisti. « J’en ai chopé un par le bras et je l’ai tenu à la gorge. » Le deuxième homme réussit à fuir. La jeune fille de 14 ans reste debout, les mains liées. Oguzhan Akisti lui enlève son bâillon, mal attaché. Et découvre une personne, en T-Shirt et jeans, « petite, de peut-être 1 mètre 50, salement amochée ».

Elle a le nez et la bouche en sang, l’oeil gauche gonflé. Elle ne pleure pas, comme étourdie par le calvaire qu’elle vient de subir. « Ça m’a choqué. » L’homme qu’il a réussi à arrêter - « et qui faisait la même taille que moi » - lui explique alors : « Elle me devait un paquet de clopes. » Soutenant la jeune fille d’un côté et empoignant l’homme de l’autre, il part au commissariat de police, distant d’une centaine de mètres seulement.

« Quand elle est arrivée à la police, la fille voulait rentrer chez elle. Elle était sous le choc. » Le héros est également groggy. Opéré d’un kyste à la colonne vertébrale deux semaines auparavant, il saigne. Sa plaie s’est rouverte. À aucun instant, pourtant, ce Turc, aimé de tous, n’a hésité à intervenir.

« Oz », ainsi que ses proches l’appellent, est « un mec droit, toujours raisonnable, jamais violent, qui arrête les conflits par sa force de persuasion », témoigne Arnaud Chenu, l’un de ses meilleurs amis. Et sa force physique ? « Il pourrait faire videur », lui qui est maçon, « mais il a une tête de gentil. D’ailleurs, quand tu le croises dans la rue, tu ne changes pas de trottoir », poursuit cet homme, patron du Physio Bluebox de Montargis, où venait se relaxer, au sauna, son ami.

Se relaxer, accepter les félicitations, les récompenses et la gratitude d’admirateurs anonymes : une autre forme de tension, gratifiante et pesante, qui devrait s’exacerber cette semaine.

par Alexandre Mendel pour La Rep