Info Turquie News - www.turquie-news.com - Actualité, vague de turcophobie et clientélisme politique oblige, nous vous proposons de redécouvrir cette lettre, adressée le 16 Février 1973 par Monsieur Pierre Lyautey, Président Honoraire de la Société des Gens de Lettres de France au Premier Ministre Monsieur Messmer et au Ministre des Affaires Etrangères Monsieur Schumann

Il s’agit d’un document historique peu connu car risquant de froisser l’histoire officielle dictée par les groupes de pression arméniens.

Dans cette lettre, M. Pierre Lyautey met en garde contre la banalisation des activités révisionnistes de groupuscules nationalistes arméniens basés en France.

Ces premiers soubresauts de lobbying nationalistes arméniens coïncide avec les premiers attentats de l’ASALA (organisation terroristes arménienne, visant la population turque).

La question déjà posée à l’époque est aujourd’hui encore plus d’actualité : Où sont les autorités et les élus français lorsque la communauté turque de France est prise pour cible par des groupuscules racistes, turcophobes et violents ?

Un document d’époque à lire, à faire lire.


Monsieur le Premier Ministre,

Si je me permets de vous écrire aujourd’hui, c’est parce qu’un problème de politique extérieure s’est trouvé évoqué à la faveur de la campagne électorale. Il s’agit de la question arménienne, que je connais bien puisqu’étant, il y a un demi siècle, Directeur du Cabinet civil du Général Gouraud, j’ai accueilli en Syrie, les quelque trente mille arméniens auxquels le Général Gouraud offrait l’hospitalité de la France. Ces contacts m’avaient du reste conduit à une certaine circonspection parce que j’avais entendu certains de ces émigrés me dire la façon dont ils avaient tué des Turcs. Grâce à notre accueil, ils ont, au reste, très rapidement, trouvé du travail et des moyens d’existence.

A cette époque, le mot de « Génocide" n’avait jamais été employé. Aussi est-ce avec stupéfaction qu’en 1972, dans une publication de l’Institut Français de Polémologie, j’ai vu pour la première fois ce mot de « Génocide » et l’association des Turcs à Hitler. Le très éminent Ambassadeur, Hasan Isik, très francophile, très lettré, Ambassadeur de Turquie à Paris, m’avait fait part de son émotion. Contact avait été pris avec les rédacteurs de ce texte, intitulé « Du Canibalisme au Génocide ».

Ma surprise a été grande aussi lorsque j’ai vu à Marseille, une cérémonie soi-disant privée, mais publique par sa publicité, avait eu lieu en présence d’hommes d’Etat Français. Si l’on s’en rapporte au dictionnaire, le mot « Génocide » signifie « Extermination d’un groupe éthnique. » Or les légendes sont une chose, et les faits en sont une autre. Dans une lettre du 3 Octobre 1918, Lord Robert Cecil déclare que 700.000 hommes, femmes et enfants auraient été exterminés. Nous sommes loin des chiffres publiés récemment. Mais il y a plus. Dans un livre autorisé par la Commission des Documents du Conseil consultatif national arménien, paru en 1919, il est constaté que 1.250.000 arméniens demeurent en vie S’il en existait 1.500.000 avant les événements, le chiffre de 700.000 disparus doit donc être ramené à 250.000 Chiffre qui lui-même peut être tenu pour hypothétique, étant donné que beaucoup sont morts d’épidémies ou du fait de la rareté des vivres, due à l’arrêt de la vie économique. Ces indications prouvent qu’il n’y a absolument pas eu extermination et que le mot de « Génocide »ne saurait s’appliquer.

Au cours de nombreux séjours en Turquie, j’ai toujours remarqué à quel point l’opinion turque était sensibilisée sur cette question, Ajoutons que l’assassinat récent du Consul Général de Turquie à Los Angeles et de son adjoint, par un terroriste arménien, a provoqué grande indignation. L’histoire des soulèvements de l’Arménie est du reste fort complexe. Il faut se reporter au rôle joué par la Russie des Tsars et par l’empire britannique. Certes, la réunion privée de Marseille s’explique pour des raisons électorales, étant donné le nombre de Français originaires d’Arménie, vivant à Marseille.

Mais comment imaginer que l’un de ces compatriotes ait osé comparer avec Auschwitz et le geste du Chancelier Brandt. Ayant de longue date d’excellents amis en Turquie, vous pouvez compter sur moi pour les engager à la modération. Mais l’amitié de la France et de la Turquie, consolidée au travers les siècles, nous est précieuse. J’ai une lettre de Mustafa Kemal adressée à mon oncle, le Maréchal Lyautey, le remerciant de ce qu’il avait fait pour l’indépendance de la Turquie. La Turquie moderne, à laquelle j’ai consacré un ouvrage, représente pour nous, aux confins de l’Europe et de l’Asie, un grand bastion. Aussi, Monsieur le Président, est-ce pour moi un sentiment de devoir d’appeler votre très haute attention sur ce terme de « génocide » qui est à la fois inexact et offensant, pour une nation amie.

Pierre LYAUTEY
Président Honoraire de la Société des Gens de Lettres de France.