Nadine Menendez rejette la faute sur son mari avant d’être condamnée à 4 ans et demi de prison

« Le bandeau est tombé », a-t-elle déclaré à propos de son mari, Robert Menendez, ancien sénateur. « Je sais désormais qu’il n’est pas mon sauveur. Il n’est pas l’homme que je croyais. »

Source ; NYT

Nadine Menendez a affirmé devant un juge que son mari, Robert Menendez, « m’a manipulée comme une marionnette ». Mais elle a précisé ensuite qu’ils ne divorceront pas.

Nadine Menendez, épouse de l’ancien sénateur du New Jersey, a été condamnée jeudi à quatre ans et demi de prison pour son rôle dans un stratagème visant à monnayer l’influence de son mari contre de l’argent, de l’or et une Mercedes-Benz.

Dans une déclaration émotive avant l’énoncé de la peine, Mme Menendez, 58 ans, a rejeté une grande partie de la responsabilité sur son mari, Robert Menendez, autrefois l’un des démocrates les plus puissants du pays.
« J’ai mis ma vie entre ses mains et il m’a manipulée comme une marionnette », a-t-elle dit en larmes.
« Il était mon dieu », a-t-elle ajouté. « Je me sentais en sécurité en le suivant dans la vie. C’était l’un des hommes les plus puissants du pays le plus puissant au monde. Il n’y avait aucune raison de croire qu’il me conduirait sur une mauvaise voie ou me demanderait de faire quelque chose d’illégal — du moins, c’est ce que je pensais. »
« Le bandeau est tombé, conclut-elle. Je sais désormais qu’il n’est pas mon sauveur. Il n’est pas l’homme que je croyais. »

Cette admission dramatique a marqué l’aboutissement d’une affaire qui a éclaté en septembre 2023, lorsque le couple a été inculpé d’une série de charges qui ont bouleversé Washington et ébranlé la politique du New Jersey, où M. Menendez était une figure depuis des décennies. Le sénateur, réputé indestructible politiquement, s’est soudain retrouvé face à de sérieux rivaux pour son siège. Il a résisté, ne démissionnant qu’à contrecœur après être devenu le premier sénateur reconnu coupable d’avoir agi en tant qu’agent d’un gouvernement étranger.

Jeudi, sa chute semblait presque totale : présenté non seulement comme un condamné mais aussi comme un manipulateur, entraînant sa femme dans ses combines puis rejetant la faute sur elle.

Le juge Sidney H. Stein, du tribunal fédéral de Manhattan, a largement rejeté la tentative de Mme Menendez de prendre ses distances avec la corruption, la qualifiant d’« actrice centrale ».
« Vous saviez ce que vous faisiez », a-t-il déclaré. « Vous agissiez toujours avec intention. »
« Vous organisiez des réunions. Vous preniez des initiatives. Vous impliquiez d’autres personnes », a-t-il ajouté.

Le juge a toutefois reconnu qu’elle méritait une peine plus clémente que celle imposée à son mari et à deux autres coaccusés déjà en prison. Il a pris en compte son passé de relations abusives et son diagnostic de cancer du sein, raisons pour lesquelles son procès avait été dissocié de celui de son mari et reporté de près d’un an.

Avec Mme Menendez écartée de l’affaire, les avocats du sénateur ont adopté lors de son procès une stratégie consistant à l’accuser d’avoir orchestré la conspiration et trompé son mari. « Elle cherchait à obtenir de l’argent et des biens par tous les moyens », a plaidé son avocat, Avi Weitzman.

En vain. Le sénateur a été reconnu coupable d’avoir agi comme agent d’un gouvernement étranger et d’avoir accepté des pots-de-vin en échange de tentatives d’orienter l’aide vers l’Égypte et de bloquer des poursuites menaçant ses alliés au New Jersey. Il a commencé à purger une peine de 11 ans en juin.

Mme Menendez, de son côté, a été soignée pour un cancer du sein avancé, avec mastectomie et chirurgie reconstructive.

Après un procès de quatre semaines, elle a été reconnue coupable ce printemps d’avoir accepté des pots-de-vin et tenté de les dissimuler après avoir appris l’existence de l’enquête. Elle compte faire appel, a indiqué son avocate Sarah Krissoff.

Jeudi au tribunal, Mme Krissoff a plaidé des circonstances atténuantes : l’enfance de sa cliente dans le Liban en guerre et ses relations passées abusives l’auraient rendue vulnérable aux hommes manipulateurs. En 2017, un compagnon l’avait battue si violemment qu’elle avait été hospitalisée cinq jours pour un traumatisme crânien ayant altéré ses facultés cognitives et sa mémoire, a expliqué l’avocate.

« Elle a été élevée toute sa vie pour être soumise aux hommes », a ajouté Mme Krissoff, invoquant aussi la nécessité de nouvelles opérations liées à son cancer.

Le juge Stein a accepté de reporter de dix mois le début de sa peine afin qu’elle termine ses traitements.

Les procureurs avaient demandé au moins sept ans de prison pour son rôle dans la transmission de pots-de-vin au sénateur et l’organisation de rencontres avec des responsables égyptiens. Ces derniers avaient ensuite accordé un monopole lucratif à une société halal fondée par l’ami de longue date de Mme Menendez, Wael Hana.

L’entreprise, IS EG Halal, avait reçu l’autorisation de certifier que toute viande halal vendue en Égypte respectait la loi islamique. Elle a ensuite servi de canal pour les pots-de-vin versés au couple, selon les témoignages.

Le stratagème avait commencé peu après la rencontre du sénateur et de Mme Menendez en 2018. À l’époque, M. Menendez dirigeait la puissante commission sénatoriale des affaires étrangères, jouant un rôle clé dans la politique étrangère et l’aide militaire aux alliés des États-Unis.

« La condamnation d’aujourd’hui envoie un message clair : nos élus ne sont pas à vendre », a déclaré Jay Clayton, procureur fédéral du district sud de New York, après le verdict.

Tout au long des procès, les procureurs ont insisté sur le rôle de Mme Menendez autant que sur celui de son mari.
« Que peut encore faire l’amour de ma vie pour vous ? », l’a-t-on entendue demander lors d’un dîner dans une brasserie de Washington, l’un des nombreux rendez-vous qu’elle aurait organisés entre son mari et des responsables égyptiens.

Les procureurs ont souvent cité cette phrase pour relier les preuves saisies par le FBI — 13 lingots d’or, 566 000 dollars en liquide et une voiture de luxe — aux actes officiels de M. Menendez.

Depuis sa prison, M. Menendez, 71 ans, avait écrit au juge Stein qu’il regrettait d’avoir laissé ses avocats dépeindre sa femme comme « désespérée, fauchée et intéressée ».
« Je regrette de ne pas avoir mieux anticipé ce que mon avocat allait dire sur Nadine pendant mon procès », a-t-il écrit. « La présenter comme avide d’argent ou en détresse financière, au point de solliciter de l’aide auprès d’autrui, est tout simplement faux. »

Mais la procureure Lara Pomerantz a soutenu au tribunal que Mme Menendez « n’était pas une figurante » dans l’affaire : « Elle a fait ses propres choix et joué un rôle essentiel. »
« Elle s’est salie les mains », a ajouté Mme Pomerantz, affirmant qu’elle méritait une sanction au moins aussi sévère que celles infligées aux corrupteurs du couple : M. Hana et le promoteur immobilier Fred Daibes.

M. Hana, citoyen américain né en Égypte, purge une peine de huit ans de prison. M. Daibes, sept ans.
Un troisième homme d’affaires, Jose Uribe, courtier en assurance raté qui avait offert la Mercedes-Benz à Mme Menendez, a plaidé coupable et témoigné contre le couple. Sa peine doit être prononcée le 9 octobre.

Jeudi, Mme Menendez, qui n’avait pas témoigné à son procès, est restée silencieuse à la table de la défense pendant les plaidoiries du ministère public.

Elle a toutefois affirmé au juge que, bien que son mari ait basé sa défense sur l’accusation contre elle, elle était restée une épouse loyale et silencieuse. Son mari et ses avocats lui avaient assuré, dit-elle, que si le sénateur était acquitté, son propre dossier « disparaîtrait probablement ».

À sa sortie du tribunal, après la condamnation, Mme Menendez a rejoint rapidement une voiture. À un journaliste qui lui demandait si elle comptait quitter l’ancien sénateur, elle a répondu :
« Je n’ai pas l’intention de divorcer. »