Certaines minorités non-musulmanes de Turquie, parmi lesquelles les catholiques, les protestants, des Eglises évangéliques et les bahaïs, ont toujours du mal à obtenir un statut juridique.

Les minorités non-musulmanes se plaignent d’une absence de statut juridique qui les empêche d’accéder aux droits et protections accordées aux minorités, en particulier dans les domaines de l’éducation, des organismes de bienfaisance et de la propriété. Bien qu’il existe des façons de contourner ces restrictions, en s’organisant par exemple en associations, ces minorités demandent une reconnaissance en conformité avec les normes de l’UE. Les autorités turques indiquent que, selon le traité de Lausanne de 1923, ne sont reconnus en tant que minorités que les Juifs, les Arméniens et les Grecs orthodoxes. Si bien que beaucoup d’autres, dont les catholiques, les Syriaques et les protestants, ont été laissés de côté. Le rapport d’étape 2010 de l’UE sur la Turquie a également souligné ce problème de la personnalité juridique et a rappelé qu’au mois de « Mars, la Commission de Venise du Conseil de l’Europe a conclu que le droit fondamental à la liberté de religion, telle qu’il est protégé par l’article 9, lu en conjonction à l’article 11 de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), comprend la possibilité pour les communautés religieuses d’obtenir une personnalité juridique. » Cependant, certains experts mettent en cause la logique de la catégorisation par le Traité de Lausanne des groupes minoritaires. Pour Baskin Oran, universitaire spécialisé sur le sujet, les communautés non-reconnues sont confrontées à de nombreux problèmes à différents niveaux, touchant notamment l’éducation, les droits de propriété et de lieux de culte. Il souligne qu’il n’y a pas de limitations dans le Traité de Lausanne selon laquelle les communautés devraient être reconnues comme des minorités religieuses. « Il considère tous les groupes non-musulmans comme des minorités religieuses. Lorsque les négociations pour Lausanne étaient en cours, ils n’ont pas ouvertement discuté de toutes ces questions » ajoute-t-il.

Les catholiques n’ont pas encore de statut officiel

Le rapport d’étape décrit les problèmes que les minorités religieuses rencontrent en raison de cette absence de personnalité juridique et mentionne que les protestants et quelques autres églises n’ont pu obtenir la permission pour construire des lieux de culte. Alors qu’il recevait Kenan Gürsoy, ambassadeur de Turquie auprès du Saint-Siège, au début de l’année dernière, le pape Benoît XVI avait déclaré que l’Eglise catholique est en Turquie dans l’attente d’une reconnaissance juridique civile. Bien que les relations diplomatiques entre le Vatican et Ankara datent de cinquante ans, la communauté catholique n’a pas encore de statut officiel. Dans sa déclaration demandant la reconnaissance de la communauté catholique, le pape a évoqué les organismes de bienfaisance de la communauté catholique, en indiquant que les catholiques de Turquie défendent la liberté de culte et sont heureux de pouvoir contribuer au bien-être de leurs concitoyens, en particulier dans les domaines caritatifs et médicaux. Dans un article récent, le Dr. Otmar Oehring de l’organisation catholique allemande Missio, une structure qui promeut le dialogue interreligieux et insiste sur les problèmes de non-reconnaissance, a souligné que les communautés religieuses s’organisent en associations pour pouvoir acquérir une personnalité juridique. Selon lui, ce problème ne peut être résolu que si la Turquie continue de développer l’idée d’une laïcité en conformité avec la Convention européenne des droits de l’homme.

par Ayse Karabat Ankara pour Zaman