Par Arnaud Lefebvre, le 30 août 2010
Vous avez un gros appétit d’investisseur ? Concoctez-vous donc un placement à base de CIVETS. Derrière cet acronyme inventé par le directeur général de la HSBC, Mike Geoghegan, se cachent six pays dont on prédit qu’ils afficheront bientôt les taux de croissance les plus élevés et constitueront la meilleure destination pour l’investisseur : Colombie, Indonésie, Vietnam, Egypte, Turquie et Afrique du Sud. Premier d’entre eux à susciter notre attention : l’ex-Empire ottoman.
Une dette publique à 47% du PIB malgré la crise
Les trois premiers mois de l’année 2009 avaient laissé craindre le pire pour la Turquie, avec un PIB accusant un repli de 14,5% par rapport au trimestre précédent et un taux de chômage atteignant un sommet historique, à 16% de la population active. Mais le pays en a vu d’autres. Lors de la crise financière qu’il a traversée en 2001, son économie avait reculé de 9%, avant d’enregistrer une croissance moyenne de 6% entre 2002 et 2006.
Fort d’un endettement limité -40% du PIB fin 2008 –, le gouvernement turc a mis en place un ambitieux programme de soutien à l’économie, incluant prime à la casse, incitations fiscales pour l’achat de produits ménagers et augmentation des pensions de retraite et autres allocations sociales. Ces mesures sont parvenues à freiner la récession, puisque le PIB n’a chuté « que » de 4,7% pour l’ensemble de l’année 2009, un niveau inespéré par rapport aux résultats catastrophiques du premier trimestre. Quid de la dette publique ? Elle ne s’établissait, à la fin de l’année dernière, qu’à 47% du PIB.
Tout cela a fait dire à Dominique Strauss- Kahn, directeur du FMI, que « la crise économique a été très bien gérée par la Turquie dès le début ».
Un rythme de croissance à la chinoise
2010 a démarré sur les chapeaux de roue en Turquie. Au premier trimestre, la croissance s’est envolée de 11,7%, un taux très proche des 11,9% affichés par la Chine. A l’origine de cette embellie : un commerce fleurissant avec ses partenaires. Les exportations turques ont ainsi progressé de 9,6% entre janvier et avril, à 4,7 milliards de dollars, alors que les importations ont décollé de 77%, à 3,8 milliards de dollars.
Le ministre de l’Economie, Mehmet Simsek, a donc révisé sa prévision de croissance annuelle de 3,5% à environ 6%. Seuls deux indicateurs continuent à inquiéter : le chômage et l’inflation. Si le premier reste élevé, il est cependant en recul constant – 12% à fin mai. Surtout, le chômage des moins de 25 ans – près de 50% de la population – a baissé de 20% en un an. S’agissant de l’inflation, elle a plafonné à 9,1% en mai. Aussi alarmant qu’il puisse paraître, ce taux est pourtant très éloigné de ses niveaux des années 2001 et 2002, durant lesquelles il a culminé à plus de 70%. L’OCDE anticipe d’ailleurs un repli à 6,6% l’année prochaine.
L’indice turc en ascension constante
La Turquie, un eldorado ? « Depuis deux ou trois ans, la Turquie concentre plus d’investissements directs étrangers que des pays tels que l’Inde, le Brésil ou l’Italie », souligne Raphaël Esposito, directeur de la Chambre de commerce française en Turquie. De plus, le pays disposerait encore « d’immenses réserves de croissance ». Cela explique-t-il les performances de l’indice boursier ?
L’ISE National 100 Index, qui regroupe les cent principales valeurs turques, connaît depuis près de deux ans une dynamique impressionnante. Depuis le 1er janvier 2009, il enregistre une progression de 124%, contre moins de 42% pour son équivalent chinois (Shanghai SE Composite Index) et 25% pour le DAX allemand.
Vous l’aurez donc compris, investir en Turquie est plus que bénéfique. Seulement, deux limites se posent. D’une part, la progression de l’indice a été telle que les perspectives de plus-values s’en trouvent réduites. Si attendre un repli de la Bourse turque semble pertinent, l’ISE National 100 Index continue néanmoins à afficher un potentiel de hausse.
D’autre part, ce marché reste difficile d’accès pour l’investisseur particulier étranger. C’est la raison pour laquelle il vous sera plus aisé d’y accéder via des trackers (ETF). Vous en trouverez qui répliquent soit l’indice des 20 plus importantes valeurs turques (Dow Jones Turkey Titans 20), comme le Lyxor ETF Turkey (FR0010326256) commercialisé par Société générale, soit l’indice MSCI Turkey, tel l’iShares MSCI Turkey (IE00B1FZS574), émis par BlackRock.
Première parution le 05 août dans le numéro 094 de MoneyWeek