Vous avez été nombreux à m’écrire au sujet des évènements récents Arménie vs Azerbaïdjan.
©️ Martin Ryan
Comme d’habitude, la même hystérie pro-arménienne au sein de la classe politco-médiatique française (Anne Hidalgo, Valérie Boyer ou autres François-Xavier Bellamy en tête) sous contrôle dachnak, et la même méconnaissance de l’opinion publique en France de la région.
Quelques réflexions s’appuyant sur des faits objectifs :
- « L’Azerbaïdjan a attaqué l’Arménie » (comme on peut le lire dans tous les médias français) : Est-ce possible et est-ce dans l’intérêt de l’Azerbaïdjan, dans la mesure où la Russie y a une présence militaire permanente et est garante de l’intégrité territoriale de l’Arménie dans le cadre de l’OTSC ?
L’Azerbaïdjan dénonce une attaque arménienne de grande envergure et préparée sur plusieurs postes frontières, à laquelle il a riposté. Cela explique notamment le nombre important de gardes-frontières sur les 50 morts azerbaïdjanais (dont les identités, les grades, ont été révélés publiquement hier).
En effet, l’Azerbaïdjan dispose de forces armées indépendantes spécialisées dans la défense des frontières, qui n’a pas vocation à passer à l’offensive à l’extérieur de son territoire ;
Certains commentateurs y ont vu "une tentative de passage en force de Bakou pour mettre en place la continuité territoriale avec la Turquie". Le corridor de Zangezour, devant certes assurer cette continuité territoriale entre l’Azerbaïdjan et l’exclave du Nakhitchevan (donc avec la Turquie) est un projet entièrement prévu dans les négociations de paix, qui a régulièrement été discuté lors des rencontres tripartites Arménie-Azerbaïdjan-Union Européenne et Arménie-Azerbaïdjan-Russie. Le passage en force à ce stade n’a donc pas vraiment de sens, d’autant que l’Armée azerbaïdjanaise n’a nullement pénétré en territoire arménien (évitant ainsi logiquement la confrontation avec la Russie) ;
L’Arménie ou plutôt l’Etat arménien et Pachinian, ont depuis plusieurs mois montré des signes allant dans le sens de la paix avec l’Azerbaïdjan et la Turquie. A commencer par la reconduction de Pachinian lui-même l’année dernière, malgré la défaite.
En effet, les Arméniens du quotidien sont lassés de la dépendance à la Russie, des radicaux de la diaspora, et des anciens dirigeants corrompus sous contrôle russe (Kotcharian et Sarkissian), aujourd’hui écartés de la vie politique en Arménie. Et ils savent que le salut de l’Arménie passe avant tout par le désenclavement régional et la coopération avec les voisins. On notera notamment la restitution des vols Erevan-Istanbul (tous pleins !) ainsi que le refoulement aux frontières de certains chefs de file de la diaspora arménienne radicale (notamment notre franco-arménien Franck Papazian, désormais interdit de séjour en Arménie) ;
- En revanche, la diaspora arménienne à l’étranger (en particulier en France), vivant de la rente du « génocide », aurait beaucoup à perdre en voyant l’Azerbaïdjan et l’Arménie se réconcilier. Il en est de même pour plusieurs grandes puissances : notre pays et les Etats-Unis, qui avaient de l’influence à travers le groupe de Minsk, aujourd’hui obsolète (on notera les positions pro-arméniennes immédiatement affichées par Emmanuel Macron et Anthony Blinken) ; l’Iran, ne pouvant désormais plus utiliser les territoires occupés pour acheminer la drogue afghane vers la Russie par l’intermédiaire des occupants arméniens (positions pro-arméniennes également affichées par Raisi) ; et bien entendu la Russie, pour laquelle une paix arméno-azerbaïdjanaise réduirait son emprise sur l’Arménie (et donc sur la région) et risquerait d’attirer des investissements (et donc intérêts étrangers) dans sa sphère d’influence ;
La thèse de corps francs arméniens revanchards échappant au contrôle de Pachinian et partageant la même idéologie que la quasi-totalité de la diaspora arménienne, considérant le même Pachinian comme un traitre, est donc à privilégier. Et il est tout à fait possible que la Russie manipule ces derniers, afin d’entraver le bon déroulement du processus de paix qui a logiquement connu une accélération depuis les évènements en Ukraine.
©️ Martin Ryan