100e anniverssaire de la république de Turquie

Depuis le début de la libération des territoires occupé, des journalistes français ont fait le choix de se faire la voix des nationalistes arméniens.

Le directeur-adjoint du Figaro Magazine est de ceux-là. Hélas pour la presse française.

Source : https://www.lagazetteaz.fr/news/societe/11883.html


Editos & Tribune libre

Jean-Christophe BUISSON : Le journalisme degré zéro

Publié le | par Engin | Nombre de visite 1558
Jean-Christophe BUISSON : Le journalisme degré zéro

11 novembre 1986.
Paris, rive gauche.

Au Quartier latin, non loin du bâtiment de l’Université de la Sorbonne, a débuté une manifestation massive d’étudiants. Ils sont descendus dans la rue pour protester contre le projet de loi présenté par M. Alain Devaquet – ministre chargé de la recherche et de l’enseignement supérieur dans le gouvernement du Premier ministre Jacques Chirac.

Le projet prévoit notamment de sélectionner les étudiants à l’entrée des universités, de donner une large autonomie aux universités, et de les mettre en concurrence. En clair : du point de vue financier, les universités auraient la possibilité de fixer librement leurs frais d’inscription. Ensuite, concernant les étudiants, la loi laisserait des possibilités de sélection afin d’adapter les flux d’étudiants aux besoins du marché du travail, aux capacités d’accueil des établissements et aux capacités des postulants. Pour finir, les universités seraient libres de choisir leur méthode pour former les étudiants ainsi que les diplômes délivrés.

Après plusieurs semaines de contestation étudiante contre ce projet de réforme universitaire, dans la nuit du 5 au 6 décembre 1986, à Paris, Malik Oussekine - un étudiant d’origine algérienne, est battu à mort par les policiers français. Un témoin, Paul Bayzelon, qui était sur le lieu à ce moment-là, affirme que « Ils (les policiers) le frappaient, tous les deux, sur la tête, à coups de matraque ! ».

Dès le lendemain du décès, le samedi matin, les étudiants organisent une marche silencieuse, tandis que le ministre délégué Alain Devaquet présente sa démission. Deux jours plus tard, le projet de loi Devaquet est retiré. Le tribunal décide de poursuivre les policiers directement impliqués dans le meurtre. Deux des trois policiers qui ont frappé mortellement Malik Oussekine sont ensuite jugés et condamnés, sanctionnés professionnellement, mais aucune peine de prison ferme n’est prononcée.

Les étudiants continuent à commémorer Malik Oussekine en déposant des fleurs devant le bâtiment où il a été battu à mort et condamnent aujourd’hui encore les violences policières.

5 août 2019.
Trente deux ans et huit mois après le meurtre de Malik Oussekine, un invité de RTL dans l’émission « On refait le monde » affirme que « Finalement, on s’est aperçu qu’il n’avait pas reçu de coups. » Dans cette séquence largement relayée sur les réseaux sociaux, l’intervenant qualifie les faits datant de 1986 de « factuellement faux ». Selon lui, en décembre 1986, Malik Oussekine est décédé à cause de son « problème d’insuline ».

Cet invité n’est pas un simple représentant de l’extrême droite suprémaciste dont le négationnisme oscille entre la honte et le grotesque. Il s’agit de Jean-Christophe Buisson, directeur adjoint du « Figaro Magazine ».

Face aux protestations, le journaliste publie ses excuses dès le lendemain après-midi. « Je tiens à m’excuser pour mes propos tenus hier sur RTL donnant à penser que je mets en doute le fait que Malik Oussekine soit mort à la suite d’une intervention policière le 5 décembre 1986. La justice a rendu son verdict dans cette affaire et je n’entends pas la contester » écrit-il dans un tweet. Le moins que l’on puisse dire c’est que ces excuses ne sont pas très claires.

« Cette immonde créature, qui se dit journaliste, viole constamment les principes du journalisme », commente aussitôt un internaute.

On est en droit de s’étonner qu’un magazine de référence comme « Le Figaro-magazine » mette à l’honneur un individu qui ne refuse les décisions rendues par la justice de son pays, c’est-à dire « au nom du peuple français », qu’il falsifie les faits et les vérités historiques et fasse fi des normes internationales universellement acceptées.

Dans les bas-fonds de la pensée unique

En réalité, la concentration des médias français dans les mains de quelques milliardaires catholiques intégristes engendre une espèce de « pensée unique », qui corrobore l’extrémisme antimusulman français et lui sert de bras armé.

Nouveaux philosophes, nouvelles technologies, nouveau journalisme, ce qui est « nouveau » nous plongerait-il en réalité dans les abîmes de la médiocrité ? René Guénon disait que nous sommes entrés dans l’ère du « Kali Yuga », l’âge sombre, et que tout pas en avant nous enfonce encore un peu plus dans les ténèbres.

Pour le « nouveau journaliste » (nous employons ce terme par opposition aux grands journalistes comme Albert Londres ou Joseph Kessel), Jean-Christophe Buisson, le seul fait que l’homme tué à la suite des violences policières soit un musulman, normalise ce meurtre. En fin de compte, ajouter Malik Oussekine aux 1,5 millions d’Algériens tués pendant 132 ans de régime colonial, ne change finalement pas grand-chose aux statistiques. Un de plus ou de moins

Pourtant il ne s’agit ici ni la première, ni de la dernière forfaiture de Monsieur Buisson. Pas étonnant qu’il se comporte en groupie de la maire de Paris, Anne Hidalgo, qui a réussi l’exploit de transformer la ville en un immonde dépotoir. Machiavélique et astucieux, il n’hésite pas non plus de se référer aux normes et principes du droit international et pour travestir les faits et donner à ses mensonges un semblant de crédibilité.

Le 23 mars 2014, Jean-Christophe Buisson publie un article dans « Le Figaro » intitulé « Belgrade : 15 ans après l’attentat, les Serbes n’oublient pas » (https://amp.lefigaro.fr/vox/monde/2014/03/23/31002 - 20140323ARTFIG00225-belgrade-15-ans-apres-le-bombardementles-serbes-n-oublient-pas.php) .

Comme le titre l’indique, Jean-Christophe Buisson évoque le rôle de la France dans cette opération et l’amertume toujours vivace du peuple serbe envers son allié d’hier. Étonnamment, Jean-Christophe Buisson qui s’érige en expert du droit international, déclare que l’opération est contraire à celui-ci. « Cette opération humanitaro-militaire violait plusieurs lois et conventions internationales (par exemple l’article 2 de la Charte des Nations Unies qui interdit l’usage de la force « contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout Etat »).

Incroyable, mais vrai, il n’hésite pas à détourner la charte de l’ONU pour servir son propos.

Cette idéologie suprémaciste s’est de nouveau illustrée lors d’un débat sur RTL, au cours de l’émission « On refait le monde ». Jean-Christophe Buisson, soutenue par l’essayiste Laurence Taillade, fondatrice du « Conseil des ex-musulmans de France » et pourfendeuse acharnée des repas sans porc dans les cantines scolaires, a tenté d’empêcher la journaliste et militante anti-raciste Rokhaya Diallo de s’exprimer sur le racisme en France et sur les violences policières ciblées.

De l’information à la propagande

Certes la déontologie n’impose pas l’objectivité au journaliste, dans la mesure où même la science nous enseigne qu’on ne peut dissocier l’observateur de l’objet observé. Le journaliste voit non seulement avec ses yeux, mais aussi à travers le filtre de sa personnalité, de son expérience, et même de ses opinions, et nul reproche ne peut lui être fait pour cela.
Ce qu’on lui demande c’est juste l’honnêteté. Et l’honnêteté lui interdit de tromper son lecteur, sciemment en propageant des informations qu’il sait inexactes, ou simplement par négligence parce qu’il n’a pas suffisamment accompli son travail d’investigation.

C’est pourquoi, lorsqu’un rédacteur en chef ne se préoccupe plus de la recherche exclusive de la vérité, et se contente de reprendre à son compte les arguments des extrémistes arméniens, alors il abandonne le terrain du journalisme pour celui de la propagande.

Le 20 août 2021, Jean-Christophe Buisson cosignait avec le photographe Antoine Agoudjian un article sur le conflit du Caucase « Les enclaves, ces territoires en terre étrangère. Karabakh arménien : opération survie ». Un florilège d’affirmations non vérifiées, de rumeurs colportées, et de nouvelles manifestement inexactes, ainsi diffusées sans vergogne. Facile d’ailleurs, lorsque toute parole critique est systématiquement écartée des pages et des antennes. « La région du Karabakh est intégrée à l’Arménie depuis le IVe siècle avant JC. », « L’armée azerbaïdjanaise est commandée par des généraux turcs et s’est appuyée sur des milliers de djihadistes syriens », « Les journalistes n’ont pas eu accès au Karabakh », « Des édifices chrétiens datant du Moyen-âge ont été vandalisés », « Des routes construites avec des dalles volées aux cimetières arméniens ».

En faisant mine de défendre les Arméniens en tant que « Chrétiens d’Orient », lesquels seraient selon lui, menacés par les musulmans, le porte-parole des identitaires français a peut-être le sentiment d’engager une nouvelle croisade destinée à protéger la chrétienté, et par delà, la « civilisation européenne ». C’est naturellement oublier qu’il existe en Azerbaïdjan plusieurs communautés chrétiennes, qui appartiennent elles aussi, et tout autant que les Arméniens, aux « Chrétiens d’Orient ». Ces cultes ont été menacés de destruction par l’Eglise Arménienne, laquelle se pose en « guide spirituel » du nationalisme arménien.

Récemment, l’un des responsables de la communauté chrétienne orthodoxe d’Azerbaïdjan, le Père Constantine, appelait les chrétiens du monde à protéger celle-ci contre les destructions arméniennes.

Jean-Christophe Buisson, en bon soldat de l’Arménie, avait participé, le 23 novembre, à un colloque à Erevan où étaient réunies les principales personnalités pro-arméniennes de France : Pascal Gollnisch, directeur de l’Oeuvre d’Orient, proche de la droite catholique conservatrice, Hovhannès Guervorkian, représentant de la soi-disant république du Haut-Karabagh, Michel Onfray et Valérie Boyer, pourfendeurs médiatiques de l’islam en France, François Pupponi, député et président du « cercle d’amitié France-Artsakh », Alain Simonian, président du Parlement arménien, et Hasmik Tolmajian, ambassadrice de la République d’Arménie en France. Que du beau monde…

Alors, bien entendu, il n’est pas question d’accuser un journaliste français de malhonnêteté.

Mais à bien y réfléchir, on se dit tout de même que ça y ressemble.

En tous cas, le brave soldat Buisson a été récompensé, aux côtés de Sylvain Tesson, excellent écrivain au demeurant, mais qui n’a peut-être plus aujourd’hui, hélas, toute sa raison, par la « Médaille de la Gratitude » délivrée par le Président de la République d’Arménie, Vahagn Khatchatrian lui-même, le 7 octobre 2022 à Erevan.

Une jolie médaille en chocolat qui, parfumée du sang des centaines de milliers de victimes azerbaïdjanaises dont nos « héros » cherchent à camoufler l’existence, doit avoir un goût de chocolat amer.


Lire également