Contre le kémalisme : le rapprochement entre les dachnaks, les nationalistes kurdes et les réactionnaires ottomans
"L’arrivée de M. Albert Sarraut en Turquie.", Bulletin périodique de la presse turque, n° 40, 17-18 juin 1925, p. 7 :
"Le Djumhouriyet du 29-5 enregistre avec satisfaction, comme premier effet des bonnes dispositions de M. Sarraut [premier ambassadeur français à Ankara], que le gouvernement turc appréciera. Voici la genèse de l’incident auquel il est fait allusion.
Le 17 mai, le même journal avait publié une correspondance d’Alep d’après laquelle « les pires ennemis de la Turquie » tous inscrits sur la liste noire « des 150 », s’étaient réunis en cette ville pour intriguer contre la patrie. Indépendamment de Refik Khalid, directeur du journal anti-kémaliste Doghrou Yol, publié à Alep, on y voyait des hommes comme Tcherkes Edhem, Mevlan-Zade Rifat , Nemrod Moustafa, Djelal Kadri, Ali Ilmi, Kelisli Saadullah et le Dr Arif Hikmet, tenir des conciliabules suspects. Le directeur de Djumhouriyet (Younous Nadi) s’étonnait qu’au moment même où sévissait la révolte kurde, la France tolérât dans une région voisine de la Turquie des menées hostiles au gouvernement turc. Cette attitude lui paraissait en contradiction avec les paroles prononcées par M. Sarraut à son arrivée à Constantinople et que le journaliste turc reproduit à cette occasion ainsi :
« Nos relations sont très amicales et je m’efforcerai de développer davantage encore cette sympathie mutuelle. J’aime beaucoup la Turquie. Dans les moment où vous traversiez des périodes difficiles, je ne voyais pas la nécessité de cacher les sentiments que j’avais pour votre pays. Je viens ici avant tout comme homme de bonne volonté. J’avais commencé à nourrir de la sympathie pour votre pays avant même de le connaître. »
Dans son article du 29-5 intitulé « Un geste amical », Younous Nadi confesse qu’il s’est exprimé en termes un peu vifs dans son premier article. La France a donné pleine satisfaction à la Turquie. Sauf Nemrod Moustafa, qui avait déjà pris la fuite, tous les indésirables ont été invités à quitter Alep et la France a ainsi donné une preuve éclatante de la sincérité de son amitié pour la Turquie."
Gaïdz Minassian, Géopolitique de l’Arménie, Paris, Ellipses, 2005, p. 20-21 :
"Clandestine en territoire soviétique et en exil en Europe notamment, la FRA [FRA-Dachnak] participe à la lutte contre la propagation du communisme de deux manières. D’un côté, elle ne suit pas la stratégie du nationalisme ukrainien de guerre préventive contre l’URSS, préférant l’alternative de la lutte idéologique contre les Soviets dans le cadre de l’Internationale ouvrière socialiste qu’elle rejoint en 1923 , convaincue que le régime soviétique tombera tout seul, sans effusion de sang. Elle confirme en 1924 son projet d’une Arménie libre, indépendante, réunifiée, démocratique et socialiste. De l’autre, la FRA maintient d’importantes forces militaires au nord de l’Iran et signe en 1926 avec la Ligue kurde Hoyboun un traité d’alliance contre la Turquie mais aussi contre la propagation du communisme au Proche-Orient, avec le concours des Britanniques , soucieux de préserver le contrôle des ressources pétrolières en Irak."
Gwynne Dyer, "Correspondence", Middle Eastern Studies, vol. 9, n° 3, octobre 1973, p. 382 :
"Ayant obtenu l’accord du Comité kurde à Paris, le Dashnaktsutiun a ensuite envoyé l’un de ses principaux membres, Vahan Papazian (ancien député de Van au Parlement ottoman) en Syrie et en Irak pour établir des contacts avec les dirigeants kurdes locaux. A la suite de cela et des conversations à Paris, les différents groupes nationalistes kurdes ont été réorganisés et unifiés (en Syrie au moins, et en Irak dans la mesure du possible) en tant que "Jamiya Khoybun’’ , sous la direction de Jeladet Badr Khan à Beyrouth , à l’automne de 1927 (le siège a déménagé plus tard à Alep). Le Khoybun et le Dashnaktsutiun ont alors établi des contacts avec le Comité monarchiste turc en exil (Gümülcineli Ismail Hakkï, Radi Bey, etc.) et il est également devenu une partie de la conspiration anti-kémaliste.
Mevlanzade Rifat devint par la suite le principal canal de communication entre le Khoybun, dans lequel il se classait probablement parmi les cinq dirigeants les plus importants, et ce Comité monarchiste turc. (Le Dr Tutunjian, président du Comité Dachnak en Syrie, était le leader arménien sur place.) Au printemps 1928, la combinaison de Kurdes, d’Arméniens et de Turcs anti-kémalistes a été signalée par les renseignements britanniques comme recevant un soutien financier russe par le biais du front du Mouvement international des minorités à Odessa. Il y a un certain fondement dans ce rapport, du fait que Mevlanzade Rifat était à ce moment-là en visite en "Roumanie" , de même que Mgr Zaven , l’ancien patriarche arménien à Istanbul (qui avait fait en sorte que le catholios [catholicos] arménien d’Erevan le nomme comme son représentant en Irak, et venait vainement de tenter de transférer l’allégeance de l’église orthodoxe arménienne de Bagdad à Erevan)."
Hamit Bozarslan, Conflit kurde : le brasier oublié du Moyen-Orient, Paris, Autrement, 2009, p. 39-41 :
"En Turquie, pas moins de 18 révoltes [kurdes ou zazas] éclatent en moins de quinze ans. Trois d’entre elles, celle de 1925 menée par le cheikh Said de Piran, celle d’Ararat de 1927 à 1930 sous la direction de l’officier Ihsan Nuri et des frères Bedirkhan et enfin celle de Dersim de 1936 à 1938 avec à sa tête Seyyid Riza, ébranlent le pouvoir kémaliste. Les Kurdes syriens prennent une part active à ces révoltes, notamment celle d’Ararat. Qu’elles touchent l’Irak, la Turquie ou l’Iran, ces insurrections sont invariablement accusées de connivence avec les puissances étrangères , et pire, d’être à leur solde ; souvent transfrontaliers, les soulèvements mobilisent les Kurdes de plus d’un pays, mais la plupart sont écrasés par une coalition régionale regroupant l’ensemble des pays concernés, ainsi qu’occasionnellement la France , la Grande-Bretagne et l’URSS [ce revirement des Soviétiques (cf. ci-dessous) explique probablement pourquoi Mevlanzade Rıfat a repris le thème du "judéo-bolchevisme" , dans son livre sur les "dessous de la révolution turque" (paru à Alep, vers la fin de 1929)].
En Turquie, et en Syrie (où se sont réfugiés de nombreux combattants kurdes fuyant la répression kémaliste), les révoltes marquent les étapes d’un rapprochement forcé, parfois d’une fusion inédite, entre l’intelligentsia nationaliste éduquée à l’occidentale, comme les frères Celadet et Kamuran Bedirkhan, Nuri Dersimi ou encore les Cemilpaşazade, et les dignitaires tribaux et religieux, dont des anciens des hamidiyye. Ces deux groupes ne présentent ni les mêmes profils sociologiques ni les mêmes aspirations. Les premiers sont aussi hostiles que les kémalistes, les effendis arabes ou encore les « modernisateurs persans » aux « forces d’arriération » que représentent à leurs yeux les tribus, les confréries religieuses et les notabilités urbaines connues pour leur conservatisme. S’ils contestent l’ordre étatique, c’est parce qu’il est synonyme de domination arabe , persane et turque sur les Kurdes. Les deuxièmes, en revanche, auraient tout à fait pu s’accommoder d’un système de type impérial limité à l’impôt et à la conscription en contrepartie de larges marges de manœuvre qui leur auraient été laissées. Ils passent massivement à la contestation à partir de 1919 et 1920 en Iran et en Irak, et après la proclamation de la république en 1923 en Turquie, parce que les Etats s’attaquent ouvertement aux institutions sociales et politiques comme les tribus et les confréries, redessinent, par des mesures draconiennes comme les réformes vestimentaires , l’espace de visibilité dans les centres urbains , ou encore militarisent les frontières au point de les rendre étanches.
La convergence de ces deux types d’opposition, de nature pourtant si différente, contre un ennemi commun oblige les intellectuels nationalistes, parfois ouvertement athées, à recourir aux ressources humaines et matérielles des dignitaires tribaux et religieux qu’ils définissaient autrefois comme leurs ennemis sociaux."
Celal Sayan, La construction de l’Etat national turc et le mouvement national kurde (1918-1938), Villeneuve d’Ascq, Presses Universitaires du Septentrion, 2002, p. 614 :
"VI-B.3- La capture d’Ardasir Muradyan par les Soviétiques
L’été 1929 va réserver aux combattants d’Ararat une mauvaise surprise et à travers elle un signe annonciateur de la politique soviétique à l’égard de la résistance kurde.
Cette surprise sera la chute, par la ruse, du représentant arménien [dachnak] Ardasir Muradyan dans les mains des soviétiques."
Vahé Tachjian, La France en Cilicie et en Haute-Mésopotamie : aux confins de la Turquie, de la Syrie et de l’Irak (1919-1933), Paris, Karthala, 2004, p. 376 :
"(...) il semble qu’à travers le réseau occulte, mais infiltré , du Tachnagtsoutioun en Arménie, les Soviétiques aient pu exercer un certain contrôle sur le mouvement kurde d’Ararat. Le sort réservé à l’Arménien Ardachês Mouradian est à cet égard révélateur. Celui-ci était l’unique représentant permanent du Tachnagtsoutioun auprès du commandement militaire des rebelles d’Ararat. Le GPU parvint à identifier Mouradian comme étant le contact officiel du Tachnagtsoutioun avec les insurgés kurdes. Au cours de l’été 1929, les Soviétiques préparèrent dans la zone frontière un guet-apens contre Mouradian et parvinrent à l’arrêter. Il fut par la suite envoyé à Moscou et exécuté. Le message était bien clair : le régime soviétique avait les yeux sur les affaires d’Ararat et pouvait intervenir au moment opportun.
L’attente de Moscou ne dura pas longtemps. Entre juillet et septembre 1930, l’armée turque organisa une vaste offensive contre le fief des insurgés, dans la région d’Ararat, afin d’en finir avec le mouvement. En coopération avec les Turcs, l’Armée rouge pourchassa, de son côté, les rebelles kurdes dans la zone frontière."
Jordi Tejel Gorgas, Le mouvement kurde de Turquie en exil : continuités et discontinuités du nationalisme kurde sous le mandat français en Syrie et au Liban (1925-1946), Berne, Peter Lang, 2007, p. 246-247 :
"De surcroît, le gouvernement de Moscou permet à Ankara d’utiliser le réseau ferroviaire soviétique et ainsi d’acheminer rapidement les troupes turques dans la région de l’Ararat.
Le comité kurde aspire à travers tous ces contacts à s’insérer dans un système d’alliances et à devenir un acteur régional incontournable. Si bien que la Ligue Khoyboun a assurément été l’une des premières organisations kurdes à avoir eu recours à la « diplomatie parallèle ». Certes, l’instrumentalisation de la carte minoritaire (utilisation de l’élément kurde contre un Etat adverse) est a priori un atout des Etats dans lesquels existent des régions ou enclaves kurdes.
La « diplomatie parallèle », cependant, peut également être une source de tension et de déstabilisation entre les entités étatiques. Ainsi, par exemple, lors des négociations au sein de la SDN concernant le futur du vilayet de Mossoul , la Grande-Bretagne comme la Turquie utilisent le groupe kurde afin d’obtenir des avantages économiques et stratégiques dans la région. De même, pendant les négociations bilatérales entre la France et la Turquie sur le tracé de la frontière au nord de la Syrie , les deux gouvernements jouent la « carte kurde » afin de fragiliser l’« adversaire ». Il s’agit là, en définitive, d’une conséquence inévitable de la dimension régionale et trans-frontalière du problème kurde."
"Le Parlement.", Bulletin périodique de la presse turque, n° 85, 24-25 juillet 1931, p. 3 :
"Quelques-uns des réfugiés connus sous le nom des « 150 indésirables » ont adressé au Gazi, le 14 mai, une dépêche en français dénonçant comme arbitraires les dernières élections, accusant Moustafa Kemal Pacha de s’être fait élire par la contrainte président de la République et protestant avec violence contre « l’usurpation des droits primitifs de la nation turque ». Le lendemain, cette dépêche était communiquée à la Grande Assemblée Nationale, où elle souleva une discussion des plus violentes, discussion que la Djumhouriet du 16 résume de la sorte : « Les sans-patrie cloués au pilori », et qui se termina par le vote, à l’unanimité, d’un hommage au président de la République. Non moins violent que cette discussion est l’article de la Djumhouriet du 17, intitulé : « Les vagabonds sans patrie... », prenant à partie Mehmed Ali, ministre de l’Intérieur de Damad Férid , aujourd’hui à la tête du groupement qui s’intitule « Association des Réfugiés ». Voici la conclusion de cet article :
« Voyez donc, ô traîtres infâmes que la nation a définitivement rejetés de son sein, l’unique sort qui vous est réservé à tout jamais et qui consiste à vous voir toujours couverts d’opprobre et l’objet de l’exécration publique ! »
Le Vakit du 15 s’exprimait ainsi :
« Le traître Mehmed Ali, qui figure sur la liste noire des 150 et qui a fait partie de ceux qui durant l’armistice eurent recours à tous les moyens pour rendre le pays aux étrangers , a eu l’outrecuidance de lancer un télégramme à Moustafa Kémal, l’idole de la nation turque. La réélection du Gâzi à la présidence de la République est contraire, paraît-il, non point à notre Charte organique, mais à la Constitution de l’Empire Ottoman tombé en ruines dans les mains de ces traîtres. » "
"L’ex-sultan Adbul-Medjid. — Autres ennemis de la Turquie.", Bulletin périodique de la presse turque, n° 86, 31 août 1931, p. 11 :
" « Le rideau s’ouvre... » dit le Vakit qui, dans ses numéros des 11 et 12-7, commente les déclarations faites par l’ex-sultan [sic] Abdul-Medjid au Petit Parisien :
« Nous avions attribué d’abord ces paroles à l’ignorance de l’auteur ; mais après les avoir relues attentivement nous avons acquis la conviction certaine que ces déclarations décèlent des intentions malveillantes, voire même la traîtrise. Ce passage des déclarations d’Abdul-Medjid confirme en effet notre opinion :
« En Turquie le mécontentement est général. Il suffit de jeter un coup d’œil sur les rapports parvenus aux pays étrangers pour se rendre compte que la situation du pays empire de jour en jour. Moustafa Kemal, au lieu de la civilisation, ne nous en a apporté que l’ombre. »
Il est clair que le khalife déchu puise ses renseignements sur notre pays dans les rapports envoyés par les organisations étrangères d’espionnage qui travaillent chez nous. Cela ne constitue-t-il pas un aveu terrible ? Nous avons cru jusqu’ici que les agissements néfastes contre le pays étaient menés seulement par les cent cinquante « indésirables ».
Abdul-Medjid ouvre le rideau et se présente comme l’instigateur, le chef principal de cette organisation des traîtres. Nous le voyons ainsi donner la main aux épaves de l’ancien sultanat et aux espions étrangers. »
Le 28, le Vakit publie un article dans lequel les Arméniens sont accusés, une fois de plus, de complicité dans la révolte kurde. Dans tout cela, on est assuré de retrouver des indésirables comme Dervich Vahdet, Saïd Molla et Mehmed Ali."
"Arméniens et Kurdes.", Bulletin périodique de la presse turque, n° 88, 30 novembre 1931, p. 21-22 :
"L’information suivante est prise dans la Djumhouriet du 2-10 :
« Les gestes suspects d’un passager nommé Hérant Djanikian, arrivé du s/s Rumania, dans notre ville (Istamboul), ont attiré l’attention de la police qui a voulu l’arrêter à bord même du bateau.
Mais le personnage suspect entra soudain dans la toilette et n’en sortit plus. On a forcé la porte ; puis on s’est aperçu qu’il s’était pendu.
150 livres égyptiennes, 163 livres sterling, 281 dollars, 2 Crédit Foncier Egyptien et 300 drachmes furent trouvés sur lui. Le ministère public a ouvert une enquête à ce propos. Hérant Djanikian est originaire de Guenlik ; il a été chargé, par le Comité révolutionnaire arménien, d’assassiner Karakkhan [Lev Karakhan/Karakhanian], ministre des Affaires Etrangères de Russie. Mais la police soviétique avait pu l’arrêter. Djanikian a trouvé plus tard le moyen de s’enfuir, et il s’était rendu en Grèce. Il a été expulsé par la police grecque, et se rendait en Roumanie. »
Djanikian était le fils d’un Arménien d’Egypte, Mguirditch Efendi, et l’agent du Comité Dachnak. Il s’était enfui d’Istamboul quelques jours avant la rentrée des troupes turques , et se rendait à Budapest au moment où la police turque allait l’appréhender. Un autre Arménien, Agop Apikian, a été arrêté à bord de la Rumania ; malgré ses dénégations, on a lieu de croire qu’il était le complice du suicidé (ibidem, 3-10). Une enquête a été ouverte ; Krikor, frère d’Agop Apikian a été interrogé. Le patriarche arménien, Mgr Mesrouf [Mesrob] Naroyan , a exprimé son indignation, se portant garant de l’attachement inébranlable de sa communauté à la République turque :
« Les Arméniens ont une profonde gratitude pour les bienfaits que la République leur prodigue ; aussi, la vie de chaque homme d’Etat turc constitue-t-elle un bien précieux pour tout Arménien.
Les traîtres qui oseraient se livrer à d’aussi lâches attentats encourront la malédiction des Arméniens, qui ont la ferme intention de vivre en citoyens dévoués de la République turque (ibidem, 7).
Chacun des deux agents ayant découvert ces personnages suspects a été vivement félicité pour la sagacité dont il avait fait preuve et a reçu une gratification de 500 livres turques. La Milliet du 6 rend hommage à leur zèle, dans un article où elle attire l’attention sur les méfaits des comitadjis :
« Nous le savions depuis longtemps : en dehors de nos frontières, un certain nombre de Comités arméniens travaillent contre la Turquie.
Nous savons aussi que, ces derniers temps, ils ont redoublé d’activité.
On comprend que ces traîtres, voyant une occasion favorable, dans le voyage en Europe d’Ismet Pacha , ont voulu mettre leurs projets à exécution. Mais la vigilance de nos agents et l’heureuse fortune de la nation viennent de démontrer que, dans la Turquie nouvelle, les comitadjis ne pourront plus commettre de crimes. »
Après l’enquête judiciaire, Agop Apikian a été expulsé de Turquie (Djumhouriet, 10). L’Akcham du 22 termine un article sur les agissements des Dachnaks par les mots suivants :
« Les Turcs, en se rendant compte que le but des comitadjis est d’attaquer la République, la laïcité, le chapeau et les caractères latins, éprouvent tout naturellement le besoin de dresser, avec leurs corps, une cuirasse contre les mains impies qui voudraient attenter à ces conquêtes de la Turquie nationaliste. »
Les 9, 14, 16, 2 et 25-10, la Hakimiet-i Millié publie une série d’articles de Burhan Assaf Bey sur les comitadjis arméniens, faisant connaître leurs méthodes pour tromper l’opinion publique et préparer des attentats : L’organisation kurde Khoyboun, est un de leurs meilleurs moyens d’action (21). Il prend à partie le Dre Bletch Chirkouh, l’un des chefs de la révolte kurde, auteur de publications (dont certaines en français) présentant les événements sous un aspect complètement faux (25). Le mouvement kurde est artificiel : c’est une révolte des deré beys, c’est-à-dire de la féodalité dont le régime républicain voulait supprimer les privilèges et les abus. La première manifestation a été la révolte de Cheikh Saïd. Vaincus, les deré beys se sont réfugiés à Nevendouz, auprès de Cheikh Taha, faisant alliance avec le clergé rétrograde et, ensuite, avec les comitadjis arméniens. Cette dernière alliance a provoqué une scission : un Arménien, Papazian, ayant été élu président, une partie des Kurdes s’est retirée, tandis que le groupe des Bederkhanis acceptait la présidence de Papazian :
« Les Arméniens ont transformé en « haypouyn » le mot kurde « Khoyboun ». Les groupes dégénérés de la Russie tzariste, les Russes blancs, ayant avec eux les 150 (indésirables) et les Itilafdjis (partisans de l’Entente) se sont unis aux non-dissidents.
Tous ces corps morts ont fait un assaut collectif pour poursuivre leurs intérêts personnels, mais comme ils étaient, tous, des gens de mauvaise foi, ils se sont évertués à se tromper mutuellement.
L’ex-ministre de l’Intérieur, Mehmed Ali , et Ismaïl Hakki, de Gumuldjina, ont fourni un exemple frappant de cette mentalité. Après avoir touché une somme de 75.000 francs des Dachnakistes pour les besoins de la propagande, ils sont allés faire la noce à Nice. » "
Voir également : Le prétendu "massacre jeune-turc" d’Adana en avril 1909
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