(* photo : Des militants Dashnaks [1] brûlent le drapeau turc à Erevan)

La coïncidence est certes fortuite mais pas malheureuse. Alors qu’extrême gauche turque et ultra-nationalistes arméniens instrumentalisaient l’assassinat de Hrant Dink en "commémorant" le premier "anniversaire" de sa mort, l’hystérique chasse aux sorcières anti-turques du lobby arménien de France reprenait de plus belle en région lyonnaise : le maire de Villeurbanne M. Bret demandait la semaine dernière à une candidate verte présente sur sa liste de « reconnaître le génocide arménien », en d’autre termes réciter la version officielle de la France sur les événements de 1914-1922. La candidate est d’origine turque ; mais elle serait aussi la fille de Baskin Oran, "intellectuel" turc plutôt proche des milieux nationalistes kurdes.

Chasse aux sorcières

On tente de lui faire payer, sous couvert d’un bien ridicule aveu public en forme d’humiliation et extorqué par la force, la position de tous ces Turcs qui osent demander justice pour leur ancêtres et demandent que cesse la politique d’un lobby anti-turc qui a trop longtemps, et qui continue par son silence très officiel à nier et oublier les horreurs de son passé et de ses origines plongées dans la violence.

L’oubli et la dénégation empêchant le repos des mémoires et des âmes, le deuil ne s’accomplit pas et la plaie non pansée donne lieu à un substrat identitaire lourd parmi les Turcs, mais aussi parmi les Arméniens de par le monde.

Le monopole de l’extrême droite arménienne (en tête de fil la FRA Dashnaktsoutioun [2]) sur les allégations de "génocide", l’instrumentalisation du sujet à des fins politique et la main mise de ces extremistes (par la violence) sur la majorité des organisations "associatives" de la diaspora arménienne ne trouvant d’autre source que la haine du Turc qui anime ces groupes.

Hrant Dink ne visait pas autre chose lorsqu’il évoquait la nécessité pour les Arméniens de se débarrasser de « cet élément turc de leur identité pour lui substituer un lien vivant et porteur d’avenir avec la République d’Arménie ». C’est d’ailleurs cette affirmation mal comprise qui fera de lui l’ennemi public numéro 1 des ultra-nationalistes arméniens de France, allant jusqu’à le décréter "persona non grata" après une conférence à Paris.

Mais véritable face de cette pièce identitaire entre les mains des nationalistes arméniens, la reconnaissance du "génocide" qui participe d’une volonté d’obtenir des "réparations" sous forme écunière mais également de terres... à relier aux rêves de Grande Arménie des milices arméniennes qui massacraient les Musulmans d’Anatolie au nom de cet idéal national et nationaliste !

Faute d’avoir réussi entre 1914 et 1922, il faut faire payer ce prix aux Turcs d’aujourd’hui.

Et sur un mode conflictuel, le malentendu entre Turcs et Arméniens est total. Les nationalistes Arméniens devenant hystériques lorsqu’on ne prononce pas le fameux mot "génocide". Et les Turcs vivant dans la peur de l’inquisition arménienne qui pourrait leur tomber dessus à tout moment si jamais ils osent user de leur liberté d’expression...

Il est difficile, voire impossible, d’expliquer aux nationalistes arméniens que l’emploi systématique et déplacé du mot "génocide" qui ne signifie pas autre chose que nazisme en Turquie, empêche les Turcs de se prononcer ouvertement sur la souffrance des Arméniens.

Quoi que l’on en dise, chaque Turc sain d’esprit sait et reconnait la souffrance du peuple arménien mais on ne peut attendre d’un peuple de se plier aux éxigences d’un lobby ultra-nationaliste et ouvertement turcophobe qui continue encore aujourd’hui à TOTALEMENT nier ce que les Turcs ont aussi subi de la part des milices arméniennes.

Mais ont-ils seulement envie de comprendre ?
Il est évident que non et que l’utilisation des souffrances des peuples turc et arménien à des fins politiques est bien plus leur priorité.

Les Turcs sont prêts à crier haut et fort et à partager sans concession la souffrance des Arméniens mais doit-on décréter que toute personne qui demande la fin de la mémoire sélective est un négationniste ?

Est-il normal que le fait de demander le respect qui est dû à leurs morts fasse des Turcs d’ "ignobles négationnistes" ?

Ou bien est-il négationniste celui qui ne se souvient que de la moitié des événements ?

Et cette remarque s’adresse tout particulièrement à la bien pensance hexagonale : Pourquoi est-ce ce que nos élus, tout clientélistes qu’ils sont, s’adonnent à ces pratiques quotidiennement ? Pourquoi veut-on embarquer la France et ses lois sur cette pente boueuse du déni tant chéri par les ultra-nationalistes arméniens ?

Le lobbying politique mené par les officines arméniennes de France répond largement à ce questions... les bulletins de vote l’emportent sur la raison, le pouvoir politique l’emporte sur la dignité...

Et le conflit se focalise ainsi sur l’emploi d’un terme qui oblitère toute possibilité de dialogue, de mémoire, de partage et de justice.

Pour finir, posons-nous quelques questions.

La question de savoir tout d’abord s’il faut faire payer un prix aux Turcs d’aujourd’hui et à ceux que certains extremistes font encore passer pour des « enfants de bourreaux » pour un crime commis il y a 90 ans. Non et cela pour deux raisons :

Ils ne sont pas responsables des crimes commis deux générations plus tôt quand bien même celui-ci serait-il imprescriptible.

Ils ne sont pas responsables mais victimes du négationnisme mis en place par le lobby arménien en France depuis bientôt 60 ans et consistant à nier ce que les Turcs ont aussi subi.

Question intermède : revient-il à l’Etat français ou aux édiles d’une certaine géographie électorale de revêtir le costume du justicier dans cette affaire ?

Enfin pourrait-on interroger les objectifs de nos apôtres nationaux de la bien-pensance : faut-il très facilement veiller à perpétuer le malentendu dans l’attente de vaines voies pénales ou bien faciliter une réconciliation qui seule autorisera le travail de deuil ?
Celà sachant que les nationalistes arméniens refusent catégoriquement de discuter du sujet même (surtout pas !) dans un cadre légal, car bien trop risqué de voir leur propagande révisionniste s’éfilocher face à des arguments que leurs oreilles se passeraient bien d’entendre, que leurs yeux se passeraient bien de voir...

Or la réconciliation, reconnaissons-le, risque fort de n’intéresser que les deux parties et seulement elles. Seules la Turquie et l’Arménie seront capables de poser les bases politiques et diplomatiques d’une possible réconciliation. D’une réduction du malentendu actuel vers sa possible résorption.

Quant aux tierces parties, elles seront alors priées de s’abstenir de toute récupération partisane. « Personne ne devrait permettre que l’on utilise encore la question arménienne pour régler ses comptes avec la Turquie », affirmait Hrant Dink. Et personne ne devrait permettre que l’on utilise le contentieux turco-arménien pour dénigrer et stigmatiser le peuple turc.

En attendant, il nous faudra, nous Turcs, continuer à répéter ce que nous avons à dire !