Serpil Körpe est une enseignante turque. Elle effectue une mission de cinq ans, à Sens, pour apprendre la langue à une centaine de jeunes.

La cloche a sonné. Il est 17 heures, ce lundi, au collège Mallarmé. La journée continue pour les dix-sept élèves qui assistent au cours de turc de Serpil Körpe. Ces collégiens suivent un enseignement de langue et culture d’origine (ELCO).

Une fois par semaine, le professeur leur apprend l’orthographe, la grammaire, l’histoire, la géographie et la culture du pays dont leur famille est originaire, pour la plupart. Gokhan Denden, 14 ans, assiste au cours pour se perfectionner : « Je parle un petit peu le turc à la maison, mais je ne sais pas l’écrire », explique le collégien.

Un alphabet de 29 lettres

Avec ses 29 lettres, l’alphabet turc donne du fil à retordre aux élèves. Le professeur Serpil Körpe évoque la culture du thé dans la région de Rize, située au bord de la Mer Noire. L’occasion de faire passer les élèves au tableau pour reprendre les fondamentaux.

La fonctionnaire turque est missionnée par son pays pour une période de cinq ans. Avant de venir à Sens, Serpil Körpe était professeur en école primaire, à Ankara. « J’ai passé un concours en Turquie pour avoir le droit d’enseigner en Europe, détaille l’enseignante. Lorsque mon travail sera terminé, je retournerai en Turquie et je retrouverai mon poste dans la même école. »

Cette année, le professeur enseigne le turc à plus de cent élèves scolarisés dans les collèges Mallarmé, Montpezat, Champs-Plaisants, André-Malraux, à Paron, et les écoles Pierre-Larousse, Paul-Bert, Champs-d’Aloup et Jules-Ferry. « Je joins mes notes au bulletin scolaire de chaque élève pour que les familles soient informées de ce que l’ont fait en classe », poursuit le professeur.

Serpil Körpe n’aborde aucun sujet politique ou religieux. « Nous vivons dans un pays laïc. Mon travail consiste à enseigner la langue et c’est tout. » En 3e, les collégiens passent un test, validé par une attestation de compétence. « Avec ce diplôme, un élève peut poursuivre sa scolarité dans un lycée turc, puis dans une université. »

Mis en place par le gouvernement en 1973, les ELCO avaient pour but initial de permettre à des élèves de pratiquer leur langue maternelle dans l’hypothèse éventuelle où les familles retourneraient dans leur pays d’origine. La France a signé des accords avec plusieurs pays. À Sens, les cours de turc ont été proposés, dès 1989. Actuellement, l’arabe et le portugais sont aussi enseignés.

« Aujourd’hui, ces cours n’ont plus le même objectif, précise Claude Picano, l’inspecteur de l’académie de l’Yonne. Ils permettent aux élèves de se construire leur identité nationale, tout en respectant les valeurs de leurs familles. Tout cela dans un esprit de laïcité. Ces cours sont d’ailleurs ouverts aux jeunes qui n’ont pas forcément ces origines. »

par Estelle Dissay pour Lyonne