En réponse à cet article :
 Arménie/Turquie : Faut-il ratifier les accords ?

Comité de Coordination des Associations Franco-Turques - région Lyonnaise

Avant tout, deux réflexions que se font les Turcs et les Français d’origine turque de la région lyonnaise :
Nous sommes extrêmement touchés et même reconnaissants de l’attention portée par les Français envers les efforts de rapprochement entrepris par l’Arménie et par la Turquie. Nous sommes heureux d’être dans vos pages et sous les feux de l’actualité grâce à un effort commun de réconciliation plutôt qu’à l’occasion d’un tremblement de terre ou d’un nouveau conflit dans le Caucase.
Ça nous change et c’est plutôt agréable.

Les regards attentifs des Lyonnais en particulier, des Français en général et de l’opinion publique internationale nous donnent aussi des responsabilités particulières. Nous devons lutter contre nos propres préjugés. Et nous ne nous sentons pas le droit de verser de l’huile sur le feu, de loin et dans le confort des rives du Rhône et de la Saône, car les premiers à souffrir de nos excès de langage seraient les populations de là-bas, des deux côtés du Mont Ararat.
Téléguider de France les décisons difficiles et prudentes d’Erevan et d’Ankara n’est pas notre ambition.

Deux Etats représentés par deux gouvernements démocratiquement élus ont engagé des négociations.
Leur responsabilité est de trouver les équilibres, de préparer les évolutions les plus constructives qu’il soit possible.
Personne ne peut sortir totalement satisfait d’un dialogue qui a tant tardé.
Accepter des compromis et ne pas prolonger à l’infini les affrontements, c’est la règle du jeu.

Nos gouvernements respectifs mènent ce difficile travail sous le regard et parfois les conseils des autres gouvernements.
Ils se font aider par tous leurs ministères, par leurs parlements.
Est-ce à nous, qui vivons en France, de leur mettre des bâtons dans les roues ?
Nous ne le croyons pas.
Nous voulons placer au-dessus de tout la perspective d’une paix durable.
Une paix dont les deux pays ont besoin plus que jamais dans le contexte de la crise mondiale et plus encore dans le contexte du Caucase.

Nous savons que partout il y a des activistes qui ne survivent qu’en faisant durer les conflits.
Chacun peut voir sur Internet les photos des locaux où des sympathisants du PKK d’un côté et des sympathisants du Dashnak [1] de l’autre, affichent les mêmes cartes où les uns et les autres revendiquent les mêmes territoires en Turquie. Or, ce n’est pas à coup de revendications extrêmes qui rivalisent dans l’exagération que la paix aura sa chance.

Nous allons, les uns et les autres, faire l’expérience d’une nécessaire solidarité pour bâtir des économies nouvelles qui vont exiger de nous des efforts sans précédents. Pour la première fois de notre histoire, nous sommes du même côté de la barrière. Notre combat contre l’adversité sera un combat commun et la stabilité retrouvée sera une victoire commune particulièrement chargée de sens dans une région où les conflits sont multiples depuis des siècles et des siècles.

Il ne faut pas tuer cet espoir. Côte à côte pour relancer le commerce, côte à côte pour faire circuler les marchandises, côte à côte pour mieux protéger la nature, côte à côte pour vouloir la paix dans une région dont tous les habitants ont inutilement souffert.

Cette démonstration d’une solidarité fructueuse entre Turcs et Arméniens doit être exemplaire. C’est elle qui rendra possible et même facilitera le nécessaire examen des drames du passé.

Il est plus urgent et plus efficace de rebâtir la confiance mutuelle entre les peuples d’Arménie et de Turquie. Là est le socle de l’avenir.
Nous avons expérimenté depuis de longues années l’art tristement amer des reproches mutuels. Nous avons ainsi retardé -en vain- l’heure d’affronter les problèmes d’aujourd’hui. Quel gâchis ! Quel gaspillage de temps, pour nous, pour nos enfants et pour tous ceux que nous aimons.
Tournés désormais ensemble vers le présent et vers l’avenir, il sera plus efficace d’examiner le passé. Tout le passé, sans aucune exclusive. Y compris le jeu trouble et pervers des grands puissances qui se sont combattues pour contrôler le Caucase en se servant des Arméniens et des Turcs.
Les uns et les autres veulent retrouver la pleine maîtrise de leur destin. C’est là le fait nouveau. Comme disent les Anglais : "Un fait est plus important qu’un Lord Maire". Personne n’a le droit d’écraser du talon l’espoir et la volonté des peuples qui veulent un meilleur avenir.

Cordialement

Ahmet Koçak Engin Akgürbüz
Président Secrétaire

Lire également :
 Arménie/Turquie : Faut-il ratifier les accords ?
 Accords arméno-turcs : Communiqué du CCAFTL