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Culture

Soliman et François Ier : quand Français et Turcs étaient amis

Publié le | par Hakan | Nombre de visite 786
Soliman et François Ier : quand Français et Turcs étaient amis

Les premiers pas des relations franco-turques, vieilles de 500 ans, s’exposent en région parisienne. Intitulé « François 1er et Soliman le Magnifique. Les voies de la diplomatie à la Renaissance », l’événement est organisé dans le cadre de la Saison culturelle turque en France.

A cette occasion, le musée national de la Renaissance du château d’Ecouen (Val d’Oise) propose un panorama historique des relations franco-turques. Derrières les vitrines d’une exposition finement montée, plusieurs pièces inédites font revivre la genèse des liens franco-turcs. Les différents documents présentés : traités de paix, d’alliance et plans de batailles, soulignent les termes militaires du rapprochement. Les intérêts commerciaux ne tardent cependant pas à suivre, offrant aux navires français le privilège de commercer avec toutes les côtes de l’empire turc. Ceci aura notamment pour effet d’assurer la prospérité de Marseille. Enfin, élément significatif des relations de l’époque, le roi de France se voit confier la protection des lieux saints et des chrétiens de l’Empire ottoman. Cimenté par le traité des capitulations signé en 1536, l’alliance marque le moment où l’intérêt national l’emporte sur la solidarité des chrétiens face aux menaces d’une religion vue comme ennemie. L’Empire ottoman est à cette époque aux yeux de la France un Etat comme les autres, avec lequel on s’allie, on fait la guerre et on commerce en fonction des intérêts de chacun. Les deux souverains entretiendront d’ailleurs des relations privilégiées, où le respect mutuel dépasse les clivages religieux.

Des intérêts stratégiques communs

Un intérêt d’abord stratégique domine cette alliance. Ce rapprochement pour le moins inattendu entre François Ier, champion de la chrétienté, et celui que, dans un mélange de fascination et d’aversion, on appelait en Occident « le Grand Turc », Soliman Ier dit « le Magnifique » (Kanuni Sultan Süleyman) tient au personnage de Charles Quint. La politique extérieure de la France sous François Ier sera entièrement dominée par cette rivalité avec la maison de Habsbourg, c’est-à-dire avec l’empereur Charles Quint, dont les ambitions hégémoniques constituaient une réelle menace pour l’intégrité du royaume. Or l’Empire ottoman, première puissance en Europe, possède aussi la flotte militaire la plus puissante : voulue par François Ier, la coopération étroite entre le royaume de France et la Sublime porte permettra de fait de combattre efficacement la flotte espagnole en Méditerranée, au grand scandale de l’Europe chrétienne. De son côté, Soliman le Magnifique avait ainsi les coudées franches pour progresser en Europe orientale.

L’image du Turc en chrétienté

L’exposition se clôt sur un volet iconographique et culturel consacré à la perception du Turc au XVIe siècle, au travers de sa représentation dans l’art occidental. L’image négative de cet autre par excellence évolue au fil du temps et se voit renouvelée au cours des échanges diplomatiques et commerciaux. Au rejet pur et simple succède une certaine forme de curiosité, nourrie par les relations de voyage. Ce sentiment glisse ensuite vers la fascination pour un Empire ottoman érudit et raffiné. Pour autant, la réalité ne s’effacera pas devant l’imaginaire. Le fantasme du Turc à l’altérité menaçante continuera de prédominer bien au-delà du XVIe siècle. Aux antipodes de la Realpolitik de François Ier, les déclarations faites en 2004 par celui qui est devenu le premier président de l’UE, semblent, hélas, le démontrer.

SEYFEDDINE BEN MANSOUR PARIS

Source "Zaman"


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