La Turquie, dans le cadre d’Istanbul capitale européenne de la culture, a été l’invité d’honneur de la foire d’exposition de l’île d’Oléron, pays natal de Pierre Loti : une délégation turque s’est rendue sur place. Yılmaz Kurt, secrétaire général de l’Agence Istanbul 2010, Patrick Moquet, maire de St-Pierre d’Oléron, et Didier Quentin, député de Charente Maritime, ont évoqué la mémoire de l’écrivain mais également l’importance des liens qui unissent la France et la Turquie.
Lors de son discours d’ouverture de la foire, qui coïncidait avec le 87ème anniversaire du décès de l’écrivain Pierre Loti, Yılmaz Kurt a remercié les habitants, le maire et les représentants de la région. Ses mots étaient également destinés au maire d’Eyüp, İsmail Kavuncu, ainsi que vers l’attaché culturel de la Turquie à Paris, le docteur Hasan Yavuz. II a souligné leur engagement au sein de ce projet : rapprocher, par l’œuvre de Pierre Loti, les cultures françaises et turques, grâce notamment à l’agence İstanbul 2010. Avant l’ouverture de la conférence, M. Yılmaz Kurt s’est recueilli sur la tombe de Pierre Loti. Dans son discours, il a souligné : « les Stambouliotes aiment ceux qui aiment Istanbul. Pierre Loti, amoureux d’Istanbul, occupe à ce titre une place particulière dans le cœur des Stambouliotes. L’écrivain a vécu sur une des plus belles collines d’Istanbul, Eyüp, qui est aujourd’hui ouverte aux visiteurs tout comme le café portant son nom. Quand les touristes s’y rendent, ils y boivent un café en pensant à l’auteur d’Aziyadé, qui a toujours été un lien entre nos deux pays : il a su assimiler la culture et la tradition turque ».
Il a poursuivi son discours en précisant que « Les relations entre nos deux pays ont connu des difficultés, concernant l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne notamment. Or, les organisations culturelles, comme la saison de la Turquie en France, et Istanbul Capitale européenne de la culture 2010 œuvrent à l’amélioration des relations bilatérales".
M. Yılmaz Kurt a, par la suite, visité la maison de Pierre Loti, devenue musée, dans la ville de Rochefort.
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Patrick Moquet, quelle est l’importance de l’événement qui nous rassemble ici et de la délégation turque ?
P.M : La délégation turque est l’invitée d’honneur de la foire d’exposition de St-Pierre d’Oléron. Mais le vrai motif de cette présence est avant tout le rapprochement entre Rochefort et Eyüp. Cependant, l’ouverture de la foire tombait le jour de l’anniversaire de la mort de Pierre Loti : ce hasard donnait donc un prétexte à cette visite et à cette rencontre.
Cet évènement met en scène les relations entre la France et la Turquie, dont nous avons oublié la nature et la force, alors que nous sommes dans une atmosphère d’inquiétude par rapport aux autres et au monde musulman. Ainsi la présence de cette délégation est importante : c’est l’occasion de montrer la réalité de la Turquie et de donner envie de découvrir sa culture et son peuple.
De plus, c’est dans votre île qu’est enterré Pierre Loti.
Bien sûr, pour nous le point de départ, c’est la présence de la tombe de Pierre Loti sur l’île d’Oléron. Il y a ainsi une relation qui s’est créée de par l’itinéraire personnel de Pierre Loti, son attachement et son amour pour la Turquie.
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Monsieur Quentin, vous êtes député de la Charente Maritime. On m’a dit que vous étiez, comme Pierre Loti, un ami de la Turquie. Comment l’êtes-vous devenu ?
D.Q. Je le suis depuis longtemps car j’ai fait beaucoup de langues anciennes. Or, quand on étudie l’histoire de l’Antiquité, on s’intéresse à tout le bassin méditerranéen. J’ai fait l’Ecole Nationale de l’Administration. A un moment, dans ma carrière diplomatique, au Ministère des Affaires étrangères, j’ai été sous-directeur de l’Europe méridionale. Là, j’ai été très impressionné par la qualité des diplomates turcs en postes à Paris.
Je me suis alors beaucoup intéressé aux relations franco-turques. J’ai été collaborateur de Jacques Chirac, qui avait aussi beaucoup d’intérêt pour la Turquie. Il avait ainsi reçu le Premier ministre turc, Turgut Özal. Depuis cette époque je suis très attaché à l’amélioration des relations entre la France et la Turquie : je fais donc partie des parlementaires, des députés de l’UMP, favorables à l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne. Je fais à ce titre partie du groupe d’amitié France-Turquie, à l’Assemblée nationale.
Comment voyez-vous l’évolution des relations franco-turques ?
D. Q : Ces relations se sont améliorées. Il y a parfois des malentendus parce que, du côté français, Nicolas Sarkozy, que je soutiens par ailleurs, a eu des positions un peu abruptes. Il y a une longue tradition de relation entre la France et la Turquie. Elle possède de plus une position géostratégique tout à fait essentielle. La Turquie est un pays de rencontres, c’est un trait d’union, entre l’Orient et l’Occident. Nous avons aussi des intérêts communs : la France, avec l’entreprise Bouygues, a construit le pont du Bosphore.
Nous avons tout intérêt à ce que la Turquie soit bien ancrée dans l’Europe, autrement, il y aurait un double risque : d’une part que la Turquie n’ait plus comme partenaire occidental que les Etats-Unis, et d’autre part, qu’il y ait un basculement vers l’islamisme et l’intégrisme. Nous avons toujours été très attentifs aux mesures prises pour défendre la laïcité. Ce que je regrette c’est que, bien souvent en France, il y a de fausses idées reçues sur la Turquie. C’est un pays à majorité musulmane mais avec un État laïc.