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Turcophobie : Aveu significatif de Sylvie Goulard

Publié le | par Ilker TEKIN | Nombre de visite 924

Juillet dernier, lors d’une émission de radio (« Esprit Public ») diffusée sur France Culture, un aveu significatif et révélant nous venait de la politologue Sylvie Goulard [1]. Fervente européiste, Sylvie Goulard est depuis fin 2006 présidentes de l’association du Mouvement européen France, elle est en outre une des principales figures du « non » à la Turquie dans l’UE. Le thème de l’émission étant l’Union européenne, nous nous attendions, comme ce fut le cas ces derniers temps, à ce que la question de l’adhésion turque y prend une grande place, voire la place centrale. Or, première surprise, cette question fut discrète, presque évitée… en particulier par Sylvie Goulard, pourtant d’habitude si diserte sur ce thème — l’animateur de l’émission devant relancer deux fois une question sur la Turquie pour qu’on en parle enfin. Ici fut notre principale surprise d’écouter Sylvie Goulard alors affirmer :

« Là-dessus [sur l’adhésion turque] j’ai écrit un livre il y a 3 ans pour alerter sur les difficultés
que l’Europe a, à définir son projet, non point forcément en termes identitaires. Je crois qu’il faut rappeler aux auditeurs que ce qui a faits la vertu de la démarche européenne, c’est cette capacité à attirer un certain nombre de personnes, il est peut-être temps de dire qu’à un moment donné, nous ne pouvons pas répondre à ces attentes, mais nous ne pouvons sans doute pas, surtout en raison de notre faiblesse institutionnelle, de nos divisions internes, etc. mais il faudrait vraiment veiller à ce que, si ce processus ne peut pas aboutir, nous avons avec la Turquie des relations aussi étroites que possible, et ce ne soit pas uniquement une exclusion [de la Turquie] "à cause de, ça peut aussi une pause ou une exclusion à cause de nos faiblesses, et je crois vraiment que nous avons franchi une étape avec le traité institutionnel réformé. Mais effectivement l’Europe n’est pas à l’heure actuelle en mesure d’accueillir un pays de cette taille et de cette nature, il y a eu tellement d’arguments à caractère xénophobe dans ce débat, que je tiens à dire qu’il y a quand même un grand intérêt aussi, à ce que les pays qui sont autour nous considère l’Europe comme un phare vers lequel on se tourne et non point un endroit duquel on se détourne.
 »

Voici donc dit, et clairement dit, ce que nous, franco-turcs, savions et subissions : que le processus d’adhésion turque à l’UE a été porté par une xénophobie exacerbée. En effet, une fois évanouis les conjonctures et les hystéries qui, au plus fort de la tempête, ont entouré ce « non » à la Turquie, ce qui reste est un sentiment de turpitude, d’abaissement, humain : « il y a eu tellement d’arguments à caractère xénophobe dans ce débat », nous dit Sylvie Goulard, se
remémorant cet épisode. Remarquable par ailleurs l’utilisation du passé pour caractériser la folie anti-turque en France, comme si l’adhésion à l’UE renvoyée aux calendes grecques, il était désormais possible de dire la vérité.

Nous comprenons dès lors la volonté d’évitement, et de dépassement, de la « question turque » par Sylvie Goulard, qui européiste fervente, veut en finir avec une question qui a fini par empoisonner et par abaisser l’UE elle-même : le rejet de la Constitution européenne, la banalisation du racisme, l’instrumentalisation des mémoires, les petits calculs politiques tout ce qui délite une construction européenne ambitieuse et stable, sont des effets plus ou moins directs, non du rejet de l’adhésion turque, mais de la forme folle et xénophobe qu’a pris ce
rejet.

Il ne s’agit pas tant ici, de la part de Sylvie Goulard, de rendre justice à la Turquie et aux Turcs.
 [2], que de recentrer l’essentiel du débat sur l’UE elle-même, une UE « divisée » et dont les « faiblesses institutionnelles » constituent un risque de délitement. Ne doutons pas que si l’adhésion turque à l’UE revenait à se préciser, les mêmes causes engendreraient les mêmes effets…


[2En effet, cette dernière a utilisé plus qu’à son tour d’images et d’étiquettes repoussantes afin de rejeter la perspective d’une adhésion turque à l’UE.

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