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Histoire

Question arménienne : Débat contradictoire entre Yusuf Halaçoğlu et Sevan Nissanian

Publié le | par Ali Bal | Nombre de visite 3075
Question arménienne : Débat contradictoire entre Yusuf Halaçoğlu et Sevan Nissanian

Nous vous proposons de découvrir un débat télévisé édifiant opposant l’ancien président de l’Institut d’Histoire Turque, le professeur Yusuf Halaçoğlu à l’écrivain, historien et chroniqueur d’origine arménienne Sevan Nişanyan.
Cette vidéo en langue turque, divisée en 14 parties, est tirée de l’émission « Teke Tek » (Face à Face) présentée par le journaliste Fatih Altaylı et diffusée sur la chaine HaberTürk le 9 mars 2010.

Remarque : Pour visionner la suite de la vidéo, cliquez sur l’encadré : « bolum x » avec le fond rouge, en haut à droite.

Sans jamais appuyer ses accusations par des éléments concrets, Sevan Nissanian argue inlassablement :
« L’Etat turc a continuellement poursuivi et poursuit toujours une politique visant à nier l’existence des Arméniens, à les humilier, à les insulter. Une politique de déni et de rejet de la réalité est destructrice pour la communauté arménienne (…) Il est certain que la politique turque a toujours vu les Arméniens comme des ennemis ».

Devant l’approche pragmatique et scientifique de Yusuf Halaçoğlu le contredisant, Sevan Nişanyan extrêmement mal à l’aise ne trouve d’autres postures que celle de se réfugier dans le registre des sentiments et de verser dans les émotions.
Face aux documents d’archives présentés systématiquement par Yusuf Halaçoğlu pour étayer ses dires, Sevan Nişanyan se contente de répliquer que ce sont « des documents de propagande turcs ». Yusuf Halaçoğlu lui présente alors des documents analogues issus des archives russes, anglaises ou françaises.
Furieux, Sevan Nissanian va même jusqu’à exiger le silence de son contradicteur : « Un instant, écoutez-moi ! » ordonne-t-il en criant.
« Pourquoi criez-vous, reprenez-vous svp » lui conseille alors Yusuf Halaçoğlu.

Sevan Nissanian invective régulièrement Yusuf Halaçoğlu le qualifiant de « menteur », « propagandiste à la solde de l’état », « vous faites du show, vous désinformez et détournez les documents d’archives de leur sens réel », ainsi que d’autres douceurs poétiques.
Yusuf Halaçoğlu, quant à lui, reproche à Sevan Nissanian de ne pas avoir «  la culture du débat contradictoire » en le vilipendant ainsi.

Au sujet des protocoles turco-arméniens, le professeur Halaçoğlu fait part de son scepticisme tout en soulignant la nécessité d’une réconciliation. En effet, « il y a faute des deux côtés. La Turquie a lié le règlement du conflit du Haut-Karabagh aux protocoles alors que ce sujet ne figure nulle part dans le texte. Donc, c’est une erreur. Quant à l’Arménie, sa cour constitutionnelle a émis une réserve majeure en disant que les protocoles ne pouvaient contredire la « reconnaissance internationale du génocide », ce qui est contraire au texte signé. Comment voulez-vous dans ces conditions établir une sincère réconciliation si les deux parties ne respectent même pas un document qu’elles ont signé ? ».

De plus, Yusuf Halaçoğlu affirme que les parlements étrangers n’ont « aucune légitimité à juger l’histoire de la Turquie. Qu’en outre, leur comportement est totalement en contradiction avec l’article 11 de la Déclaration universelle des droits de l’homme qui stipule que toute personne accusée est présumée innocente et que les garanties nécessaires à sa défense doivent être assurées. Or, on ne reconnaît même pas le droit de se défendre à la partie turque. Les pays qui légifèrent au sujet de 1915 ne consultent même pas leurs propres archives. L’affaire est parfaitement politisée et dénuée de fondements académiques rationnels. »

Sevan Nissanian colérique réplique que « la politique turque repose sur le mensonge et l’immoralité ». Il rejette catégoriquement la mise en place d’une commission d’historiens car « il y a un consensus général dans le monde. Tout le monde accepte et reconnaît le génocide arménien » prétend-il.

Redoutable de précisions sur les dates, les noms des protagonistes, les lieux, les intervenants, les enjeux des pays impliqués dans la tragédie de 1915, le professeur Yusuf Halaçoğlu conclut :
« Nous sommes toujours prêts à débattre mais dans le respect sans se faire insulter de menteur comme c’est le cas maintenant. En 2005, nous avons participé à la « Vienna Armenian-Turkish Platform » sous la médiation d’historiens autrichiens. Nous avons pu échanger des documents d’histoire. Malheureusement, force est de constater que 15 jours après cette réunion, la partie arménienne s’est retirée de cette initiative sous la pression vraisemblable des activistes de la diaspora arménienne. Nous sommes, à tout moment, disposés à discuter des événements de 1915 sur la base de témoignages, de documents d’archives, et pas uniquement ottomanes mais aussi les archives arméniennes de Erevan, ou celles de Boston. Il y a aussi celles à Jérusalem. Nous avons étudié les archives russes mais aussi les documents du Dachnak en Russie. Prenons aussi en compte les documents des pays en guerre à l’époque avec l’état ottoman tels la France et l’Angleterre mais aussi ceux des pays alliés comme l’Allemagne et l’Autriche. N’oublions surtout pas les archives de la Société des Nations basée à Genève dont on ne peut douter de l’impartialité puisqu’aucun Turc n’a participé à leur rédaction. Elles ont été constituées par des Américains et des Anglais.
Pourquoi n’entreprenons-nous pas des recherches conjointes pour établir toute la vérité en adoptant une méthodologie scientifique rigoureuse acceptée de tous ? Pourquoi sont-ils contre ?
 ».

Le professeur Halaçoğlu n’hésite pas non plus à étayer ses arguments avec un document publié par Ara Sarafian, historien britannique d’origine arménienne.

On comprend mieux le respect qu’exprime le chercheur allemand pro-arménien Hilmar Kaiser à l’égard du Professeur Halaçoğlu :
« Halaçoğlu est le seul historien turc qui m’a présenté des matériaux que je ne peux pas concilier avec mes connaissances actuelles. C’est quelqu’un de très intelligent, très professionnel. Il me dépasse à certains égards.
– Il a le matériel des poursuites judiciaires des criminels de guerre pendant la guerre. (…)
Selon ce matériel, les gens qui ont volé de l’argent, qui ont tué, etc… ont été condamnés. La liste identifie les coupables, ce qu’ils ont fait, et quelle a été leur sanction. Nous savons, par exemple, que les meurtriers de Zohrab et de Vartkès Efendi ont été exécutés par Cemal, et il y a eu d’autres exécutions. Les gens qui ont volé de l’argent à la population arménienne et qui l’ont mis dans leur poche au lieu de le remettre au gouvernement ont été pénalisés.
(…)
Ne sous-estimez pas Yusuf Halaçoğlu. Je le respecte. Il se peut que je ne sois pas absolument d’accord avec lui, mais je suis assuré que je ne me battrais pas avec lui à ce sujet. Les ressources universitaires de toute une scène convergent vers cette seule et unique personne. Les Arméniens n’ont personne d’équivalent même de son ombre.
D’autre part,(…) Halaçoğlu s’intéresse au dialogue (...). Il n’a aucun problème à causer avec moi, à causer avec d’autres…
 ».

Édifiant.
D’un côté, il y a les activistes arméniens qui accusent les Turcs du pire des crimes sans aucune preuve scientifique. De l’autre, la partie turque qui ne demande que la création d’une commission scientifique pour établir la vérité et à qui on ne reconnaît même pas le droit de se défendre.
Turcs ! Taisez-vous et acceptez d’être criminels !
Et, on ne discute pas !


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