Les autorités turques répriment durement
Un millier d’opposants au Premier ministre Recep Tayyip Erdogan se sont à nouveau réunis à Ankara, après les trois premiers jours de heurts en Turquie. Les manifestants, composés en grande partie de jeunes et d’étudiants, se sont rassemblés sur la place centrale de Kizilay, où de violents affrontements avaient eu lieu dimanche, faisant de nombreux blessés.
Dimanche soir le ministre de l’Intérieur, Muammer Guler établissait le bilan des affrontements à Istanbul et dans d’autres villes à 79 blessés, dont 53 civils et 26 policiers.
Malgré cela, le Premier Ministre en déplacement au Maroc jusqu’au jeudi, persiste à nier tout et a réaffirmé le fait qu’il ne céderait pas à la pression de la rue : "Nous resterons fermes (...) calmez-vous, nous dépasserons tout ça", a lancé M. Erdogan à la presse.
Erdogan reconnaît que la police a agi de façon "extrême" contre les manifestants
La police turque s’est retirée samedi en milieu d’après-midi de la place Taksim, au centre d’Istanbul, immédiatement occupée par des milliers de personnes au deuxième jour de violentes manifestations contre le gouvernement en Turquie.
Le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan a concédé samedi que la police avait agi dans certains cas de façon "extrême" pour réprimer les violentes manifestations qui dénoncent depuis deux jours à Istanbul la politique de son gouvernement.
"Il est vrai qu’il y a eu des erreurs, et des actions extrêmes dans la réponse de la police", a estimé Erdogan dans un discours. "Les mises en garde nécessaires ont été faites".
La police ont utilisés une quantité importante de gaz lacrymogène et de jet d’eau sur les manifestants
Après la mort dimanche d’un jeune homme percuté par une voiture lors d’une manifestation à Istanbul.
A Istanbul, Ankara ou encore Izmir, les scènes d’affrontements se sont répétées en début de semaine. La police a répliqué avec du gaz lacrymogènes et canons à eau, faisant de nombreux blessés. La situation est ensuite revenue au calme.
Selon la même source, le président turc Abdullah Gül et le vice-Premier ministre Bülent Arinç avaient rendez-vous ce mardi matin pour faire le point de la situation.
Depuis le début du mouvement, les deux hommes, issus du même parti politique que M. Erdogan, ont plutôt prôné l’apaisement.
La brutalité de la répression, largement évoquée sur les réseaux sociaux turcs, a suscité de nombreuses critiques dans les pays occidentaux, notamment aux Etats-Unis, en France et au Royaume-Uni.
La Turquie critiquée
Le secrétaire d’Etat américain John Kerry a tancé aujourd’hui l’allié turc en condamnant l’usage "excessif" de la force par la police contre le mouvement de protestation en cours dans le pays. Le chef de la diplomatie américaine a réaffirmé l’attachement des Etats-Unis aux "libertés d’expression et de rassemblement".
"Nous espérons évidemment qu’il y aura une enquête complète sur ces incidents et que la police fera preuve d’une grande retenue dans le recours à la force contre ce genre d’incidents", a prévenu John Kerry. Ce dernier se défend toutefois d’interférer dans les affaires intérieures de la Turquie, un très proche alliée de Washington notamment sur le dossier syrien.
Les réseaux sociaux, "pire menace pour la société"
Des le dimanche, le Premier ministre turc l’a compris et a eu des propos très critiques contre la "menace" Twitter.
Selon France24, La Turquie, qui compte 75 millions d’habitants, est un pays très connecté. Plus de la moitié de la population a accès à Internet et, selon un rapport du Pew Research Center publié en décembre 2012, 35 % des Turcs utilisent les plateformes sociales de type Facebook, Twitter, Tumblr ou Instagram. Selon une étude publiée samedi par deux doctorants de la New York University (NYU), l’usage de Twitter par les Turcs depuis le début des manifestations a été "phénoménal". Pour suivre les événements, plusieurs mots-clés ont été utilisés sur le réseau de microblogging : #direngeziparki, #occupygezi et #geziparki.
Selon les deux étudiants-chercheurs de NYU, l’utilisation de Twitter par les Turcs au cours de ces derniers jours est "unique", comparée à d’autres mouvements de contestation. Dans la nuit de vendredi à samedi, dès les premiers débordements, 90 % des tweets géolocalisés à propos des événements en Turquie étaient envoyés depuis le territoire turc - dont environ 88 % en langue turque -, et 50 % de ces tweets étaient envoyés depuis Istanbul même.
Recep Tayyip Erdogan : "La menace, aujourd’hui, s’appelle Twitter. C’est là que se répandent les plus gros mensonges. Les réseaux sociaux sont la pire menace pour la société".
Ce positionnement pourrait apparaître comme paradoxal quand on sait que le Premier ministre turc dispose d’une page Facebook "likée" par plus de 2 millions de personnes et que son compte Twitter est suivi par plus de 2,7 millions de personnes.
Les manifestants devant les locaux de la presse locale
Plusieurs centaines d’autres se trouvaient devant le siège du quotidien pro-gouvernemental "Sabah" et la chaîne "NTV". Si les médias traditionnels ne retransmettent pas en direct les événements, les activistes ont pris les devants.
Depuis plusieurs jours, un flux vidéo ininterrompu en provenance du centre-ville d’Istanbul est diffusé sur Internet. C’est pour toutes ces raisons qu’Erdogan traite en ennemis les réseaux sociaux qui s’érigent en sources d’informations alternatives.
Les fonctionnaires turcs se joignent aux manifestations
Quelque 250.000 fonctionnaires manifesteront mardi pour protester contre la répression des manifestations qui se déroulent depuis une semaine dans le centre d’Istanbul, a annoncé lundi la Confédération des syndicats de fonctionnaires.
Selon la confédération, le mouvement de grève démarrera mardi à midi.
La confédération rencontrera des représentants de la Confédération des syndicats progressistes, de l’Association médicale turque, de l’Association des ingénieurs turcs et des associations des architectes turcs pour discuter plus avant de la grève.
Les manifestations antigouvernementales se sont étendues à 67 provinces à travers le pays, y compris à la capitale Ankara et aux villes côtières d’Antalya et Izmir.
Quelque 200 personnes ont été blessées dans les affrontements et des milliers de personnes ont été arrêtées.
Message du Ministére français
La Turquie, et particulièrement Istanbul, est une destination très prisée des touristes. Sur son site, le ministère des Affaires étrangères ne conseille pas aux Français qui sont sur place ou qui s’y rendent de prendre des dispositions particulières. Simplement d’« Eviter provisoirement la place Taskim à Istambul et se tenir à l’écart des manifestations. »