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L’État islamique sème la terreur pour déstabiliser la Turquie

Publié le | par Engin | Nombre de visite 301
L'État islamique sème la terreur pour déstabiliser la Turquie

L’État islamique sème la terreur pour déstabiliser la Turquie

Le cœur historique et culturel d’Istanbul a été frappé mardi matin par un attentat suicide attribué par le gouvernement turc au groupe État islamique. Dans un pays pourtant en état d’alerte maximum, l’attaque a fait au moins douze morts, dont onze touristes allemands, et plusieurs blessés graves.

Un nuage de peur et de panique a recouvert les ruelles du quartier de Sultanahmet.
Il est aux environs de 10h18, ce mardi matin, lorsqu’une énorme déflagration secoue le centre historique d’Istanbul.
Le bruit de la détonation, entendu jusqu’à la place Taksim, à près de cinq kilomètres, a secoué une grosse partie de la rive européenne de la ville. Le visage blême, Alp Uncu est encore sous le choc : « C’était si fort, tellement fort. Je n’ai jamais entendu une telle déflagration. J’ai vu le sol trembler, les livres tomber.
Un vrai chaos… » Ce bouquiniste de 37 ans tient boutique juste derrière l’esplanade surmontée du fameux obélisque de Dikilitas, là où est survenue l’explosion. Son premier réflexe a été de courir vers les lieux : « J’ai vu cinq à six corps inanimés, jonchant le sol. Il y avait du sang partout. »

Énorme déflagration à 10h18

Très vite, le périmètre sinistré, situé non loin de la basilique Sainte-Sophie et de la mosquée Bleue, est quadrillé par la police. Des barrages sont érigés à la va-vite. Les hélicoptères se mettent à raser le ciel à basse attitude. Témoins et reporters locaux parlent de blessés graves et d’une dizaine de morts, tous évacués par ambulance vers les hôpitaux les plus proches dans un concert strident de sirènes.
Les touristes, nombreux à fréquenter ce lieu, n’osent plus sortir de leurs hôtels. La rumeur évoque le risque d’une deuxième explosion. « J’étais sur le toit-terrasse de mon motel quand j’ai entendu un grand boum. J’ai demandé au serveur : que se passe-t-il ? Aussitôt, les gens ont commencé à crier qu’il s’agissait d’une bombe. Avec mes amis, on s’apprêtait à faire un tour de la ville en bus. On a tout annulé », raconte, paniqué, Ovidiu Berdila, un touriste roumain.

Au bout de deux heures, à peine, la piste terroriste est confirmée. D’abord par le président Erdogan en personne, qui évoque, dans un premier temps, un attentat suicide d’origine syrienne. Puis par le premier ministre Ahmet Davutoglu qui, après avoir convoqué une réunion de ciritse à Ankara, est intervenu en direct à la télévision pour pointer du doigt l’organisation de l’État islamique, en précisant que l’assaillant était un membre de Daech. Mais la confusion règne sur les conditions précises de l’attaque et l’identité du kamikaze. D’après la police d’Istanbul, il s’agirait d’un jeune homme âgé de 27 ans, prénommé Nabil Fadli, et qui serait né en Arabie saoudite. Le vice-premier ministre, Numan Kurtulmus, évoque, lui, un « suspect qui est arrivé en Turquie depuis la Syrie ».
Des équipes de secours turques interviennent mardi sur le lieu du drame où gisent plusieurs cadavres.
Tandis que les déclarations s’enchaînent, le bilan des victimes se précise : en fin de journée, une source diplomatique européenne évoquait au moins douze morts, dont onze ressortissants allemands et un Péruvien. Plusieurs personnes auraient également été blessées. Dans un communiqué, le ministère allemand des Affaires étrangères a appelé ses ressortissants à éviter « provisoirement » les lieux de rassemblements et les sites touristiques à Istanbul. Deux cellules de crise ont été mises en place par la France au Quai d’Orsay et au consulat général d’Istanbul.
« Je ne veux accuser personne, mais en laissant passer tout le monde à sa frontière avec la Syrie, ­Erdogan a préparé le terrain à de telles attaques »
Tuna Gödes, gérant d’un hôtel proche du lieu de l’explosion
Photo de l’explosion prise par un touriste mardi vers 10 h 18. Le bruit de la détonation a été entendu à près de cinq kilomètres.
La Turquie, touchée en plein cœur, vit depuis plusieurs mois en état d’alerte, notamment depuis l’attentat d’Ankara qui coûta la vie à plus de 100 personnes, le 10 octobre dernier. Cette attaque, la plus meurtrière jamais survenue sur le sol turc, a été imputée à l’organisation de l’État islamique - mais non revendiquée. Il y a un an, un autre attentat avait frappé le cœur historique d’Istanbul. Le 6 janvier 2014, une kamikaze originaire du Daguestan s’était fait exploser près de la mosquée Sultanahmet, causant la mort d’un policier. L’attaque avait été revendiquée par un groupe d’extrême gauche, mais les autorités avaient ensuite évoqué l’existence de liens entre la kamikaze et Daech. Le 23 décembre dernier, l’aéroport Sabiha-Gökçen, situé sur la rive asiatique, a été pour sa part visé par un tir de mortier. L’attentat, qui a fait un mort et un blessé, a été revendiqué par une organisation terroriste kurde, les Faucons de la liberté du Kurdistan, en riposte à l’offensive militaire antiterroriste kurde actuellement en cours dans le Sud-Est du pays.
Pour beaucoup, la tragédie de ce mardi est le signe d’une « contagion » de la guerre syrienne. « Je ne veux accuser personne, mais en laissant passer tout le monde à sa frontière avec la Syrie, Erdogan a préparé le terrain à de telles attaques », peste Tuna Gödes. Ce gérant d’un petit hôtel, mitoyen du lieu de l’attentat, s’inquiète aujourd’hui des retombées économiques de l’attaque. « Juste après l’explosion, mes cinq clients anglais m’ont annoncé qu’ils écourtaient leur séjour et qu’ils voulaient prendre le premier vol pour Londres. C’est très mauvais signe pour le tourisme, une de nos principales ressources économiques », dit-il.

LES PRÉCÉDENTS ATTENTATS À ISTANBUL

10 octobre 2015

103 personnes sont tuées et plus de 500 blessées dans un double attentat suicide devant la gare principale d’Ankara lors d’un rassemblement prokurde. Cette attaque, la plus meurtrière survenue en Turquie, est attribuée par les autorités d’Ankara au groupe État islamique (EI).

20 juillet 2015

Un attentat à Suruç, près de la frontière syrienne, fait 34 morts et une centaine de blessés parmi de jeunes militants de la cause kurde. Il s’agit sans doute de la première attaque de l’EI en Turquie. Les Kurdes dénoncent la « complicité » du gouvernement dans ce crime, ce qui contribue à relancer la guerre entre l’armée turque et le PKK, un groupe terroriste kurde.

11 mai 2013

Une double attaque fait 52 morts à Reyhanli, grosse bourgade du sud de la Turquie près de la frontière syrienne.

11 février 2013

Un attentat au poste-frontière de Civelgözü (Sud-Est) fait 17 morts.

15 et 20 nov. 2003

Quatre attentats suicides à Istanbul contre deux synagogues, contre le consulat britannique et la banque britannique HSBC, font 63 morts. Ils sont revendiqués par une cellule turque du réseau al-Qaida.


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