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Histoire

L'Association de relèvement turco-arménienne

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L'Association de relèvement turco-arménienne

"Les Turcs et les Arméniens", Stamboul,  :

"Le maréchal Moustapha Kémal pacha vient de transmettre la réponse suivante à un message d’une association arménienne de notre ville :

Je suis très heureux et très touché des sentiments d’amitié et d’attachement que vient de témoigner à l’égard du gouvernement de la Grande Assemblée nationale de Turquie et envers moi-même, votre association créée dans le but de travailler dans le domaine des arts et des sciences et de s’employer au maintien de bons rapports entre les éléments turc et arménien. Je déclare que tous les jeunes gens qui consacreront leurs efforts et leurs pensées aux choses de la science et du savoir et travailleront pour le salut et le bien être de la patrie, sans se laisser prendre aux intrigues et aux excitations de l’extérieur ou de l’intérieur, pourront toujours compter sur l’appui et la protection de tous ceux qui aiment leur pays et qui lui sont dévoués. Je vous souhaite un plein succès et recommande surtout aux jeunes camarades à qui s’adressent ces paroles d’être des patriotes sincères pour la Turquie et de ne plus prêter l’oreille aux suggestions extérieures qui ont créé la séculaire question d’Orient."

"Pour le rapprochement entre Turcs et Arméniens", Stamboul,  :

"La réunion dont l’ « Association de relèvement turco-arménienne » avait pris l’initiative s’est tenue dans l’après-midi d’hier au premier étage de l’ancien immeuble Duz de la grand’rue de Péra, où s’éditait la Renaissance, dans le local du Club arménien mis à sa disposition et décoré aux couleurs turques. Le portrait du maréchal Moustapha Kemal pacha occupait la place d’honneur.

L’assistance se composait à parts presque égales de Turcs et d’Arméniens. Le docteur Adnan bey [Adnan Adıvar , époux de la nationaliste turque Halide Edip ] s’était fait représenter par Madjid bey, directeur des affaires politiques, et le patriarcat arménien par le grand-vicaire. Le préfet de la ville Zia bey, le vali colonel Essad bey, le gouverneur de Péra Assim bey, le directeur de la police étaient là, de même que l’ancien ministre de l’intérieur Djélal bey [Mehmet Celal Bey, prédécesseur de Bekir Sami au poste de vali d’Alep ].

Les honneurs étaient faits par le bureau de l’association, tandis que l’on remarquait aussi par les présents un certain nombre de membres du Club arménien et de la colonie arménienne , des jeunes gens et des journalistes turcs.

Il s’agissait, en donnant publiquement lecture de la lettre d’approbation et d’encouragement du maréchal Gazi Moustapha Kémal pacha, adressée à l’association, en réponse à son hommage, et que nous avons reproduite en son temps, de contribuer à poser les bases d’une réconciliation entre deux éléments qui vécurent confondus durant six siècles [en réalité, plus de huit siècles ], — ainsi que le relevèrent les discours qui furent prononcés. Comment ? En oubliant le passé. Les différents orateurs se tinrent dans dans la note discrète et académique qui convenait, ne se livrant à aucune récrimination , à aucune justification , ne rappelant du passé, des « temps heureux » comme ils dirent , que la longue période d’harmonieuse cohabitation qu’il est dans le désir des organisateurs de rétablir. Seul, l’inspecteur de l’association se livra, dans son allocution, à une incursion en tirailleur dans le domaine de l’histoire des autres peuples pour y chercher ce qui lui paraissait ressembler à des analogies.

Nous avons pu constater ainsi que les Arméniens comptent parmi la jeunesse turque des amis dont l’accent convaincu semblait révéler une sincérité des sentiments d’autant plus manifeste qu’ils n’auraient pu avoir quelque intérêt à en faire étalage ; et c’est la sincérité qu’ils ont réclamée aussi à leurs coopinionnaires arméniens, les assurant de la possibilité, à ce prix, du retour de l’intimité ancienne.

La lettre du maréchal a été chaleureusement applaudie.

LES DISCOURS

M. Bédros Zeki [Petros Zeki Karapetyan ], directeur de l’établissement de Scutari d’où proviennent les promoteurs de l’association, s’est félicité d’avoir pu leur inculquer les idées qu’il voit mettre maintenant en pratique et les en a félicités. Il a lu ensuite une pièce de vers pour glorifier l’auteur de la lettre d’approbation qu’ils ont reçue.

M. Kérestédjian [Berç Keresteciyan ], l’un des présidents honoraires, a remercié l’assistance d’avoir répondu à son appel. Il a relevé le caractère élevé et sacré de l’œuvre poursuivie.

Les Arméniens tendent la main aux Turcs et les pressent sur leur poitrine : oublions et travaillons. Durant des siècles on fut si intime qu’un Turc, en partant, confiait sa maison à un Arménien, et qu’il a entendu dire qu’il y eut des gérants arméniens de biens de mosquées. C’est un malheur que des politiciens soient venus troubler cette harmonie. Ces deux races ne peuvent vivre distantes l’une de l’autre. D’ailleurs, les Arméniens, dans la proportion de 90 pour cent, n’ont pas partagé les idées de séparatisme émises par les révolutionnaires [loin d’être un "béni-oui-oui", Keresteciyan fait montre ici d’une certaine franchise et objectivité (ni exagération ni minimisation) : en recoupant les sources non-turques, on peut en effet estimer à environ 100.000 le nombre d’insurgés parmi les Arméniens de l’Anatolie ottomane (sans compter les volontaires de l’armée impériale russe ), en 1915 (dans un contexte de guerre multi-frontale )]. C’est pourquoi il sollicite du gouvernement de la G. A. N. T., évitant une différenciation, de les comprendre dans la même protection que les Turcs (Applaudissements prolongés). Cela, au reste, est conforme aux termes de la lettre de Moustapha Kémal pacha. Et, Dieu aidant, on vivra désormais la main dans la main en frères. (Nouveaux applaudissements).

Madjid bey, expliquant les causes de l’absence de S. E. Adnan bey, a apporté son adhésion aux organisateurs, chose qu’il a d’autant plus plaisir à faire qu’il n’est pas lui-même un étranger pour les Arméniens, ayant enseigné , autrefois, dans l’établissement de M. Carabédian [Karapetyan]. Les temps heureux durant lesquels régna l’accord entre les deux éléments reviendra [reviendront], pourvu que la sincérité soit à la base de ces initiatives. Il est persuadé que la mésintelligence, désormais du domaine de l’histoire, a vécu sans retour, et il remercie, tant de la part d’Adnan bey que du sien, pour la but de rapprochement poursuivi.

Mgr Cazazian, au nom du patriarcat, a dit que c’était un bonheur pour lui de participer à cette fête destinée à contribuer à ramener le séculaire accord amoindri par les événements mais que la sincérité se rétablira plus intense. Il n’y aura plus de séparation et, pourvu que l’on laisse les Arméniens vivre en paix avec les Turcs , le bonheur reviendra sur cette terre commune aux deux races. Ceux qui ont fait ce premier pas ont fait une bonne action. Il les félicite, il en espère un succès rapide, et il les remercie au nom de la nation.

Le jeune Châdi bey, membre de l’association, a relevé l’œuvre réalisée. Elle n’a pas été conçue sous l’effet des événements présents, mais il y a trois ans, à un moment où les circonstances n’étaient guère favorables. C’est le résultat de dix ans de réflexions et d’observations qui ont inculqué aux promoteurs la conviction que des affinités de tempérament facilitent aux deux races la cohabitation.

La série des discours a été close par celui du président honoraire Ismail Mouchtak bey, qui, journaliste, a parlé en journaliste, en regrettant l’absence de ses confrères arméniens parce que ceux qui tiennent une plume sont les guides d’une nation et qu’ils peuvent contribuer plus que quiconque à la mener dans la bonne voie comme dans la mauvaise. Ils sont à même de ramener l’opinion. L’erreur est commune aux hommes. On peut se tromper, mais on reconnaît son erreur, on se pardonne mutuellement , on oublie et l’on marche de nouveau d’accord pourvu que l’on soit sincère. La presse peut contribuer à ce résultat et si lui-même n’avait pas la conviction de pouvoir y travailler comme journaliste, en écrivant dans le sens où il s’exprime, il n’aurait pas accepté cette présidence. Il en est des nations comme des individus et sous un drapeau commun, on peut travailler pour un avenir commun et glorieux.

Des applaudissements ont souligné de nombreux passages de ces discours."

Sur Berç Türker Keresteciyan (qui a continuellement travaillé au sein de la Banque ottomane , sous les régimes hamidien et jeune-turc ) : La place des Arméniens dans les révolutions jeune-turque et kémaliste

Berç Keresteciyan : un député arménien sous Atatürk et İsmet İnönü

Les relations italo-turques dans les années 30 : la position de Lev Karakhan et de Berç Türker Keresteciyan

Voir également : Kemal Atatürk et les Arméniens

Kemal Atatürk dans l’imaginaire de Philippe de Zara

Le général Refet Bele et les Arméniens

Le général Kâzım Karabekir et les Arméniens

Bekir Sami Kunduh : entre racisme anti-arménien et pragmatisme

İsmet İnönü et les Arméniens

Le maréchal Fevzi Çakmak et les Arméniens

Yunus Nadi Abalıoğlu et les Arméniens

Un choix du nationalisme kémaliste : conserver les populations arméniennes encore présentes sur le territoire turc

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La lutte d’Ohannès Bey Alexanian au sein de la communauté arménienne catholique

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