Daphna Poznanski, candidate socialiste aux législatives 2012, dans la 8ème circonscription (qui comprend, entre autre, Israël, la Turquie, l’Italie et la Grèce), vient de faire parvenir un message aux électeurs Français de Turquie.

Un message clair dans lequel elle dénonce le texte de loi proposé par Valérie Boyer, députée UMP de Marseille, région où les organisations nationalistes arméniennes sont fortement actives.

Chers français de Turquie,

Avec le vote, sur proposition de l’UMP, de la loi pénalisant la négation du génocide arménien, mes pensées sont tournées vers vous, vers votre désarroi, votre colère, vos craintes hélas justifiées. Pour Nicolas Sarkozy dont j’avoue ne pas comprendre la détestation de la Turquie, et pour l’UMP, il s’agit d’une simple opération d’arithmétique électorale. Pour eux, les 6000 Français de Turquie ne pèsent pas lourd face aux 450000 Arméniens de France.

Humainement et personnellement, si j’étais députée, j’aurais eu toutes les raisons de voter cette loi. Les génocides, quels qu’ils soient, sont une marque infâmante pour la condition humaine. Et pourtant, je n’aurais pas voté ce texte. Parce qu’en tant que députée, je serais sortie du domaine de la loi pour entrer dans le domaine de l’histoire, domaine des historiens, et parce que j’aurais outrepassé mes compétences en matière de relations internationales et de conduite de la diplomatie, domaine du gouvernement. Or les députés ne peuvent étendre leurs pouvoirs en-dehors des limites imposées par la Constitution. « Il n’est pas bon, » a déclaré au Sénat à propos de cette proposition de loi Robert Badinter (PS), ancien président du Conseil Constitutionnel, « il n’est pas conforme à notre vocation nationale que nous ayons des lois qui disent l’histoire et, pis encore, sous peine de prison. Cet apanage, nous devons le refuser ! Cela ne saurait relever de notre convenance ni, moins encore, de notre compétence ».

Robert Badinter a accepté en septembre dernier d’être le Président de mon Comité de Soutien. Juriste moi-même, je puis vous dire que la loi qui vient d’être votée peut être déclarée par le Conseil Constitutionnel contraire à la Constitution en vertu d’une procédure permise depuis la révision constitutionnelle de 2008, celle de la « question prioritaire de constitutionnalité ».

Daphna Poznanski-Benhamou