La nouvelle ministre des Affaires sociales à Hanovre, Ayguel Oezkan, 38 ans, est devenue du jour au lendemain le modèle d’une communauté qui peine à s’intégrer en Allemagne.
Issue de parents « travailleurs invités », qui avaient émigré de Turquie il y a quatre décennies, cette avocate d’affaires est une musulmane « pratiquante modérée ». Mais, plutôt que de rejoindre les Verts ou les sociaux-démocrates, réputés plus progressistes, c’est au sein de l’Union chrétienne démocrate (CDU), conservatrice, qu’elle choisit de s’engager en politique il y a six ans. Oezkan, qui dit fêter Noël avec ses enfants pour cultiver la proximité avec les Allemands de souche, y a connu une ascension fulgurante. « J’ai choisi la CDU parce que le parti est celui qui porte les valeurs auxquelles je m’identifie le plus : la famille, la solidarité et l’amour de son prochain, affirme-t-elle. Et puis la CDU est un parti ouvert : pas besoin d’être le Christ pour y entrer. »
Quinze millions d’immigrés dans le pays
Selon le quotidien Süddeutsche Zeitung, cette nomination porte un message positif pour les 15 millions d’immigrés que compte l’Allemagne. Et en particulier pour les 3 millions de Turcs et leurs descendants binationaux turcs-allemands : « Vous pouvez réussir jusqu’au sommet. »
L’intégration des immigrés turcs est jugée particulièrement problématique outre-Rhin, notamment en raison de leur faible taux de réussite à l’école. Oezkan s’est engagée à faire son possible pour envoyer les enfants issus de l’immigration dès leur plus jeune âge dans les crèches et les jardins d’enfants. « Il est essentiel que les enfants issus de l’immigration fréquentent les crèches le plus tôt possible, pour apprendre la langue et la culture locale. Je vais me battre pour cela », dit la ministre.
Les médias allemands lui promettent un bel avenir politique. Oezkan vient déjà d’offrir à Merkel, régulièrement critiquée par la presse turque pour son refus de l’adhésion de la Turquie à l’UE, son premier compliment dans le journal Hurriyet. « Merci Frau Merkel », a titré le quotidien turc, louant la « décision historique » de nommer une ministre d’origine turque. Félicité de toute part pour avoir su repérer et sortir du lot cette « femme au potentiel exceptionnel », le ministre président de Basse-Saxe, Christian Wulff, se serait ainsi placé en position de force pour se faire élire au poste de président fédéral allemand en 2014.
Par Patrick Saint-Paul pour Le Figaro