Quelques propos recueillis à lire, à tête reposée...
Lorsque je parle à mes collègues de certaines plaintes concernant la vie en France des Franco-Turcs, nombreux sont ceux qui ont montré des réactions allant de :"Les Turcs ne peuvent pas être ainsi traités" à "Quoique tu veuilles dire, ne le dis pas fort, dis-le ici mais pas à tout le monde, sinon tu auras des problèmes".
Cette histoire m’a rappelé ma défunte grand-mère. Elle avait pris l’habitude de nous dire quand nous l’embêtions "Böyle devam etmeyin yoksa sizleri kimse sevmez" [1]. Je me suis dit en moi-même : "Et, bien je suppose que nous avons commencé à vivre avec cette histoire de haine des Turcs assez tôt dans la vie !
J’ai été capable de tirer une leçon de cet incident plusieurs années plus tard et je voudrais donner mes quelques idées.
Savoir se taire
Un franco-turc ne doit pas parler de la Turquie lorsqu’il est en France. Et bien sûr, la position la plus sage de toute est de tout simplement ne jamais mentionner quoi que ce soit qui pourrait sembler être une plainte pour quiconque. De fait, moins vous parlez, plus cela vous sera bénéfique !
L’idéal est le silence total. Encore moins que le silence. Il faut "savoir où est sa place." Si un franco-turc sent qu’il ou elle doit parler d’un sujet , alors l’un des sujets à aborder serait "l’injustice des politiques appliquées par la Turquie ". Mais avant de se lancer dans de telles discussions, il faut un minimum de préparation. Alors n’hésitez pas à naviguer sur la toile internet.
Assumer l’incitation à la haine
Un autre point concerne la méfiance ou la haine à l’égard des turcs. Ce phénomène n’est pourtant pas nouveau. On peut retracer sur plusieurs années ce sentiment anti Turc. Mais il est encore plus vrai aujourd’hui.
Autant par le passé, il est agréable de se souvenir que la première génération des turcs ayant immigré en France avaient été accueilli à bras ouverts, autant maintenant, il n’est pas bon d’avoir un ami Turc. C’est une triste réalité. Je n’oublie pas de remercier naturellement tous ceux qui oeuvrent pour aider à considérer que le Turc est un élément étranger sur lequel peut se focaliser les haines et l’hostilité.
Mais je veux aussi attirer l’attention sur ces franco-turcs qui ont honte / peur de montrer leurs origines. Par expérience, je sais que ce comportement fait souffrir, entraîne un rejet, développe l’isolement. Alors, mes chers(es) français d’origine turque, n’ayez pas honte, exprimez-vous, chacun à votre niveau.
Quelle libération lorsqu’on assume ses origines !
Quelle victoire de faire découvrir une autre version de l’histoire qui est pourtant imposée...
La pulsion de haine qui se traduit par la persécution de certains franco-turcs faibles, incapable de se défendre, a enraciné quelques mentalités. Pourtant, il est loin le discours proclamant que le Turc est néfaste, impurs et souillant le lieu où ils se trouvent. Il n’y a aucune raison pour que les franco-turcs deviennent les souffre douleur d’extrémistes. La mentalité des masses ignares a été imprégnée par cette haine durant un moment et se développe aujourd’hui. Mais il faut se battre pour rétablir une vérité car heureusement, il reste des hermétiques à la pensée unique .
Rappeler l’accueil à la française
Les Turcs sont arrivés en France grâce la convention de main d’oeuvre entre la France et la Turquie le 8 avril 1965. [2]
45 ans après, De Gaulle le signataire de cette convention et le président de la République turque, doivent se retourner dans leurs tombes s’ils voyaient comment la situation a évolué dans les 2 pays respectifs. Notamment le mal qui a été fait aux descendants de ces 1er immigrés tant attendu par l’économie française durant ces années difficiles.
Je suis persuadée que les franco-turcs auraient eu une histoire en France différente si à l’époque le gouvernement turc avait eu l’envie de coloniser la France.
Je m’explique, imaginez que la Turquie ait envoyé des intellectuels ou des instruits plutôt que des personnes en condition précaire.
Pensez-vous que la perception des Turcs de France eût été la même ? On aurait eu un échange constructif entre des personnes de même niveau qui débattraient sur des idées plutôt que d’avoir aujourd’hui un combat non équilibré.
La mauvaise image des franco turcs de France n’incombe en rien aux Turcs de 1ère génération. Leur défi était tout autre.
Je n’en veux pas non plus à la France d’écouter pour l’instant la propagande de diasporas organisées dans toutes les instances. Mais une petite alerte est nécessaire à mes amis de la politique clientéliste qui ne réfléchissent pas toujours.
Ces immigrés ont été sélectionnés par l’Etat français, c’est ce qui est indiqué dans la convention d’accueil et notamment dans son article 3 où un bref passage rappelle que." ... les frais de sélections définitives sont à la charge du gouvernement français"...
Ces Turcs ont été accueilli plus que correctement, leurs enfants ont été éduqués par la République française. Il serait préjudiciable de ne pas les entendre maintenant ou de les rendre coupable d’actes qui ne les concerne en rien.
On ne fait pas grandir son enfant pour qu’il devienne un ennemi de sa famille.
La France aime les franco-turcs
Aussi, je reste positive sur le fait que la France n’a aucun problème avec les franco-turcs. Je constate qu’il est entrepris une véritable action de désinformation auprès de plusieurs composantes de la société française. Et j’entends plus souvent la remarque de mes amis qui constatent qu’en France des lobbys communautaristes déstabilisent les institutions à des fins personnels, utilise la propagande pour raison d’Etat avec l’argent et les moyens publics. [3]
La mauvaise image dont bénéficie plusieurs milliers de franco-turc a d’évidence des causes anciennes et profondes. Souffrent-ils comme disent certains, d’une schizophrénie identitaire ou sont-ils victimes d’une nouvelle forme de discrimination due à leurs origines ? Le sort que cette société française leur réserve, a-t-il un lien avec la longue histoire de l’Europe de s’unir afin de montrer par tous moyens que l’ennemi est le Turc ! Ces enfants de la République subissent-ils les carcan d’une diaspora, d’une guerre anti-turc relayée par certains médias ou subissent-ils des décisions prises par l’Etat turc ?
Quelle que soit la réponse qui peut être donnée, la France ne devrait pas mépriser ces personnes car pour l’instant, elle les met en situation d’otages. Le vrai secret de la sérénité réside dans une réelle entente. J’aimerai tellement que mon pays de coeur qu’est la France m’aide en voulant construire une réconciliation. Je ne comprends pas pourquoi aujourd’hui, elle cautionne la diffusion de messages de haine. [4]
Je veux qu’elle brille par son ingéniosité comme elle sait le faire.
En serais-je le témoin vivant, qui sait ?
Sophie C.
[1] Traduit cela donne : "Si vous continuez comme cela, personne ne vous aimera."
[2] Décret n" 65-447 du 10 juin 1965 portant publication de la convention de main-d’œuvre entre la France et la Turquie du 8 avril 1965.
[3] A titre d’exemple, selon l’observatoire des subventions publiques 500 000 Euros ont été octroyé par le Ministre de la relance pour le Fonds arménien de France (Source : observatoiredessubventions.com)
[4] Les éditions Bamboo proposent à compter du 7 avril une BD à destination des juniors (entre autre) sur le génocide arménien ainsi qu’un livret pédagogique "Le cahier à fleur" . Ne pensez-vous pas qu’il y ait une volonté de lavage de cerveau des petits bouts à ce sujet ? Et moi qui pensait que parler d’un génocide était néfaste pour la santé mentale d’un enfant. Est-ce un moyen de transmettre une haine des turcs ?