La CPI juge que sa « juridiction territoriale » s’étend aux territoires palestiniens
La CPI juge que sa « juridiction territoriale » s’étend aux territoires palestiniens et déclenche la polémique
Avec Liberation
En se déclarant compétente pour enquêter sur d’éventuels crimes de guerre survenus en 2014 dans la bande de Gaza, la Cour pénale internationale a déclenché l’ire d’ Israël, soutenu dans ce dossier par l’administration Biden.
C’est un communiqué qui a fait l’effet d’une petite bombe diplomatico-judiciaire.
La Cour pénale internationale s’est déclarée vendredi compétente pour les faits survenus dans les territoires palestiniens occupés, ce qui pourrait ouvrir la voie à une enquête pour crimes de guerre. C’est une « victoire pour la justice », a réagi dans la soirée le Premier ministre palestinien Mohammed Shtayyeh. Tandis que son homologue israélien Benjamin Netanyahu y voyait la preuve que la CPI est « un organe politique et pas une institution judiciaire ».
La CPI a expliqué avoir « décidé à la majorité que la juridiction territoriale de la Cour pour la situation en Palestine (qui en est membre depuis 2015, ndlr) s’étendait aux territoires occupés par Israël depuis 1967 ». Fatou Bensouda, la procureure de ce tribunal international créé en 2002 et qui a son siège à La Haye pour juger les crimes les plus terribles commis sur la planète, lui avait demandé un avis juridique sur ce point. Et ce après avoir annoncé en décembre 2019 vouloir ouvrir une enquête complète sur d’éventuels « crimes de guerre » - sans toutefois désigner leurs auteurs - dans les territoires occupés par Israël. L’Etat hébreu est quant à lui resté en dehors de la CPI. Fatou Bensouda, qui doit quitter ses fonctions en juin prochain, souhaite que la CPI prenne le relais d’une enquête préliminaire de cinq ans à la suite de la guerre de 2014 dans la Bande de Gaza.
La Cour a eu beau préciser qu’avec sa décision, elle « ne statuait pas sur un différend frontalier en droit international ni ne préjugeait de la question de quelconques futures frontières » mais avait eu l’« unique objectif de définir sa juridiction territoriale ». Cela n’a pas suffi à calmer l’ire du Premier ministre Israélien. Il a jugé que par sa décision, la CPI nuisait au « droit des démocraties à se défendre contre le terrorisme ».
Washington « préoccupé ».
De leur côté Etats-Unis, alliés historiques d’Israël, se sont dits « sérieusement préoccupés par les tentatives de la CPI d’exercer une juridiction sur les militaires israéliens ».
« Nous avons toujours adopté la position selon laquelle la juridiction de la cour devrait être réservée aux pays qui l’acceptent ou qui y sont renvoyés par le Conseil de sécurité de l’ONU », a dit à la presse le porte-parole du département d’Etat américain, Ned Price, signe que l’administration Biden se place dans la continuité de l’ère Trump.
Israël avait déjà vigoureusement condamné la Cour quand sa procureure avait réclamé une enquête approfondie. Les Etats-Unis, qui ne sont pas non plus partie aux statuts de la CPI, avaient eu une réaction similaire. Le gouvernement de Donald Trump avait même pris en septembre des sanctions contre Fatou Bensouda qui a de son côté demandé à Joe Biden de les lever.
Pour sa part, le ministre palestinien pour les Affaires civiles, Hussein al-Sheikh, a estimé sur Twitter que la décision de vendredi de ce tribunal était « une victoire pour le droit, la justice, la liberté et les valeurs morales dans le monde ».
L’ONG de défense des droits de l’homme Human Rights Watch estime quant à elle qu’il est « grand temps que les auteurs israéliens et palestiniens des plus graves violations » des droits rendent des comptes devant la justice.