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L’Education nationale reprend le contrôle de l’enseignement du turc

Publié le | par Engin | Nombre de visite 372
L'Education nationale reprend le contrôle de l'enseignement du turc

L’Education nationale reprend le contrôle de l’enseignement du turc

A Bourganeuf (Creuse) ou à Montargis (Loiret), les familles franco-turques ne pourront plus confier leurs enfants à des professeurs nommés par Ankara et ne parlant pas un mot de français.

Cette évolution découle directement de la politique de "lutte contre les séparatismes". La volonté est là, les moyens doivent suivre.

Lorsqu’il s’est emparé du terme de « séparatisme », le 18 février 2020, à Mulhouse, le président Emmanuel Macron a établi une stratégie pour lutter contre « l’islam radical », en affirmant que « l’islam politique n’a pas sa place dans la République ». Il a reformulé cette ligne « antiséparatiste » dans son discours du Panthéon du 4 septembre.

Ce qu’a déclaré Emmanuel Macron le 4 septembre au Panthéon  

Deux dispositifs ont été désignés par le président de la République comme des chevaux de Troie de l’islamisme : la nomination des imams par les pays dont sont originaires les principales communautés musulmanes et l‘enseignement en langue et culture d’origine (ELCO).

Instauré en 1977 comme un accompagnement de la politique de regroupement familial, le dispositif ELCO est bâti sur des accords avec neuf pays. Historiquement, il s’agissait de l’Espagne, du Portugal, de l’ Italie, de la Serbie, de la Croatie, de l’Algérie, de la Tunisie, du Maroc et de la Turquie. Ces pays nomment et rémunèrent des enseignants dispensant des cours dans les écoles de la République. 80.000 enfants en bénéficient.

Un sujet de discorde avec Ankara

Ce dispositif pédagico-diplomatique avait déjà été pointé en 2003 par un rapport parlementaire comme présentant un « risque de dérive communautariste ».

Même sans prosélytisme avéré, la « perte de contrôle et « l’influence étrangère » son devenues sensibles avec la Turquie, à partir de l’arrivée au pouvoir du parti AKP de Recep Tayyip Erdogan.

En 2016, la ministre Najat Vallaud-Belkacem a réformé le dispositif ELCO en le versant dans celui, plus standard, des Enseignements internationaux en langue étrangère (EILE).

Des négociations ont été engagées avec les pays partenaires pour mener cette transition. Elles se sont déroulées sans accroc, excepté avec la Turquie. En février 2020, le président Emmanuel Macron a annoncé que le dispositif ELCO serait supprimé « à la rentrée 2020 ».

Un enseignant ne parlant pas français remercié à Bourganeuf (Creuse)

Les cours d’ELCO ne reprennent traditionnellement qu’en octobre. La question est en train d’être tranchée rue de Varenne.

Pour l’instant, l’enseignement du turc en primaire n’est pas remis en cause à Bourganeuf (Creuse), 3.000 habitants, où des familles turques se sont fixées depuis les années 1980 .

« Nous avions anticipé en 2019 en changeant d’enseignant à Bourganeuf. On avait quelqu’un qui n’avait aucun contact avec les autres enseignants et qui ne parlait pas français ».

LAURENT FICHET (Inspecteur d’académie de la Creuse)

L’inspecteur d’académie de la Creuse a également déplacé les cours de turc de l’école élémentaire vers le collège : « L’enseignant ELCO était seul dans l’école avec ses élèves le mercredi matin. On ne pouvait rien contrôler. Je n’étais pas rassuré, néanmoins je n’ai jamais eu de retour négatif. Désormais on a une enseignante parfaitement bilingue qui peut échanger avec l’équipe du collège ».

Le turc, une langue vivante facultative comme les autres au collège

Dans l’agglomération de Montargis (Loiret), où vivent environ 5.000 personnes d’origine turque (pour 60.000 habitants), on attend aussi les directives du ministère.

Une communauté franco-turque historiquement bien structurée à Montargis

Murat Tuysuz, qui habite Châlette-sur-Loing, est le président de l’association locale des parents d’élèves turcs. Ce père de famille de 46 ans, arrivé à Chalette « il y a 43 ans », décrit un contexte local apaisé, avec une communauté active au plan économique et associatif.

« On ne peut pas faire de la politique de Turquie ici. On essaie d’être neutres. On subit ce qui vient d’en haut. Sur Montargis, on a grandi tous ensemble, on ne pense pas à ces tensions diplomatiques. Les Franco-turcs sont bien intégrés »

MURAT TUYSUZ (Président de l’association de parents d’élèves turcs de Montargis)

300 à 400 élèves suivent des cours de turc sur l’agglomération. Murat Tuysuz précise que toutes les familles concernées ne prennent pas cette option « car il y a désormais de la mixité », se félicite-t-il.

Le président des parents d’élèves turcs a déjà suivi un cours d’ELCO : « Je suis formel, il n’y a aucun problème d’endoctrinement. Les livres viennent d’Allemagne et les professeurs sont obligés d’avoir un certain niveau de français ».

un peu de culture

Cette année, l’un des enseignants de turc de Montargis n’a pas obtenu l’habilitation en raison de son faible niveau en langue française.

Pour l’instant, les parents envisagent que « ça continue comme en avant en primaire » mais Murat Tuysuz a été informé qu’au collège « le turc va devenir une langue vivante facultative comme les autres et donc ouverte à tous les élèves ».

Un seul prof certifié en turc dans le Loiret  

Avec un gros obstacle pour l’Académie : trouver des professeurs certifiés ou agrégés en langue turque. Il n’y en a qu’un dans le Loiret et il exerce à l’université d’Orléans.

Sauf contre-indication ministérielle, les enseignants habilités par l’ambassade de Turquie risquent d’être encore réquisitionnés au collège : « le Turc dans le secondaire, on y tient. Et ça permet à nos enfants qui prennent l’option de gagner des points au bac ! », glisse malicieusement Murat Tuysuz.


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