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HRANT DINK : La souffrance, on l’endosse avec dignité et on la porte sans simagrées.

Publié le | par Engin | Nombre de visite 176
HRANT DINK : La souffrance, on l'endosse avec dignité et on la porte sans simagrées.

En hommage à Hrant Dink, journaliste turc d’origine arménienne assassiné il y a 15 ans, Turquie-News met en ligne une traduction de l’une de ses interviews.
 
Elle est édifiante à plus d’un titre. Comme à son accoutumée, Hrant Dink propose des solutions et promeut le dialogue et la paix.
 
Turquie News était présente aux commémorations qui ont eu lieu devant le journal Agos à Istanbul.
 
Hrant n’appartenait pas à cette partie de diaspora arménienne de la France qui se nourrit de la haine du Turc. Hrant aimait Istanbul, aimait la Turquie, aimait ses compatriotes turcs, c’est pourquoi de son vivant, cette partie raciste de la diaspora détestait aussi Hrant Dink. Aujourd’hui, les activistes arméniens haineux versent des larmes de crocodile. Turquie News / 19 Janvier 2022
Commémorations de Hrank Dink devant le journal Agos à Istanbul
Commémorations de Hrank Dink devant le journal Agos à Istanbul
Commémorations de Hrank Dink devant le journal Agos à Istanbul
Commémorations de Hrank Dink devant le journal Agos à Istanbul

HRANT DINK : « La souffrance, on l’endosse avec dignité et on la porte sans simagrées. »
Il y a 15 ans, jour pour jour, mourait Hrant Dink, journaliste turc d’origine arménienne, assassiné par un extrémiste turc.

Hrant Dink militait ardemment pour « guérir » ses deux peuples, Turcs et Arméniens, à travers « le dialogue ».

Hrant Dink, même s’il a été lâchement instrumentalisé par les dirigeants de la diaspora arménienne, ne les a jamais rejoints car eux ne cultivent qu’un projet revanchard haineux à l’adresse des Turcs.
Peu, y compris dans la propre famille de Hrant Dink, ont compris et ont été fidèles à son enseignement de paix et de dialogue pour solutionner le différend turco-arménien.
Pour lui rendre hommage, je republie la traduction d’un reportage réalisé avec le défunt Hrant Dink.


TRADUCTION

Hrant Dink : « Nous sommes deux peuples malades. Les Arméniens vivent un grand traumatisme à l’égard des Turcs et les Turcs vivent une paranoïa envers les Arméniens. Nous sommes véritablement deux cas cliniques ! Qui va nous soigner ? Qui va nous guérir ? Est-ce que ça sera la décision de l’Assemblée nationale française ? Ou bien celle du Sénat américain ? Qui va nous délivrer une ordonnance ? Qui est notre médecin ?

Je vais vous le dire. Les Arméniens sont le médecin des Turcs et les Turcs sont le médecin des Arméniens. Inutile de chercher ailleurs, il n’y a nul autre docteur, médecin, guérisseur, ou thérapeute ! Le médicament est le dialogue et l’un est le guérisseur de l’autre ! Il n’existe nulle autre solution, nulle autre cure, nulle autre guérison ! Aucune, aucune, aucune !
Je vais dire les choses très franchement, je demande clairement à la diaspora arménienne de cesser de s’enchaîner à 1915 : ne vous asservissez pas aux décisions des étrangers qui décident ou non de qualifier ces évènements de génocide !

Oui, c’est une terrible souffrance historique, nous l’avons vécue, nos ancêtres l’ont vécue.
En Anatolie, il existe un joli dicton, et nous sommes des enfants d’Anatolie, nous avons pour habitude de dire : « La souffrance, on l’endosse avec dignité et on la porte sans simagrées. ».
Je dis aux étrangers : "que vous reconnaissiez ou que vous ne reconnaissiez pas ma douleur comme génocide ne vaut pas un seul sesterce à mes yeux !".

Les Arméniens n’ont-ils pas tué des Turcs ? Oui, ils en ont tués. En 1918, après 1915, les Russes attaquaient le pays en provenance du Caucase et ils ont été rejoints par des Arméniens qui se sont vengés, je maudis ce mot vengeance, mais ça a existé.

Aux Turcs, je leur demande de réfléchir à la raison qui pousse les Arméniens à insister autant. Arrêtez-vous sur cette question, faites preuve d’empathie. Peut-être verrez-vous de la dignité dans leur comportement.

Réciproquement, je demande aux Arméniens de réfléchir au comportement des Turcs qui clament que non, il ne s’agit pas d’un génocide et d’y trouver de la dignité. Oui, de la dignité. Quelle dignité ? "En tant que Turc, je suis opposé à tout génocide, je suis opposé au racisme, un génocide est un fléau de dieu, mes ancêtres ne peuvent avoir perpétré pareille horreur pour la raison très simple que moi, je ne le commettrai jamais !"

Donc, oui, il y a de la dignité dans ce comportement.

Mon téléphone a sonné un jour, c’était un vieux villageois de la province de Sivas. Il m’a dit : "Fils, on m’a parlé de toi et je t’ai trouvé. Une femme âgée est arrivée de France dans notre village, elle a vécu une dizaine de jours parmi nous. Puis, elle est décédée. Nous l’avons donc inhumée conformément à nos rites et l’avons accompagnée de prières. Ensuite, nous avons appris que c’était l’une des vôtres. On m’a orienté vers toi. Je suis heureux de t’avoir trouvé. Cherche s’il te plaît et trouve qui elle était, trouve sa famille, ses enfants. Informe-les. Nous sommes à leur disposition. Qu’ils soient nos invités dans notre village. Certes, nous avons enterré cette dame mais évidemment s’ils souhaitent récupérer le corps de la défunte et l’emmener, nous leur apporterons toute l’assistance nécessaire."

Après avoir raccroché, j’ai appelé un vieil ami à Sivas, il m’a aussitôt orienté vers le cordonnier situé juste en face de chez moi ! Lorsque je m’y suis rendu et les ai interrogés sans évoquer le décès, la gérante m’a répondu qu’il s’agissait de sa mère. Je lui ai alors demandé si elle savait où était sa mère. Elle a expliqué : "Elle vit en France et si elle vient en Turquie, il n’est pas certain qu’elle passe nous voir, elle préfère aller à Sivas, dans son village natal. Elle vit 10-15 jours là-bas avec les villageois et au retour, c’est selon son gré mais il n’est pas certain du tout qu’elle passe me voir avant de s’envoler en France".

Alors, je l’ai informée du décès de sa maman. Elle a éclaté en sanglots. Ils sont tous partis à Sivas. J’ai reçu un appel, la jeune femme pleurait au téléphone et elle m’a passé le vieil homme qui m’avait appelé, il disait : "Fils, je leur ai dit qu’ils étaient libres bien évidemment d’emmener le corps de leur mère, c’est leur droit le plus naturel et légitime mais je me suis permis de suggérer : l’eau a trouvé son sillon, elle est heureuse ici, laissez-la dans cette félicité qu’elle chérissait tant".
Les paroles de ce vieil homme m’ont énormément ému. J’étais bouleversé. J’ai pleuré des heures entières. Quelle métaphore magnifique de ce paysan turc : « l’eau a trouvé son sillon » ! Quels mots mon dieu ! Quelle littérature, quelle sagesse digne d’un derviche, c’est l’âme de l’Anatolie que l’on ne peut décrire avec des livres entiers. C’est tellement vrai, oui, l’eau avait trouvé son sillon. »
©Traduit du turc par Özcan Türk
25/04/2021


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