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HOMMAGE À EBULFEZ ELÇIBEY

Publié le | par Özcan Türk (Facebook) | Nombre de visite 494
HOMMAGE À EBULFEZ ELÇIBEY

HOMMAGE À EBULFEZ ELÇIBEY

Il y a 19 ans, le 22 août 2000, nous perdions Ebulfez Elçibey, 1er président non-communiste de l’Azerbaïdjan et l’un des plus grands patriotes de l’histoire du peuple turc.

Ce modeste Turc azerbaïdjanais a croupi dans les geôles soviétiques en 1975 pour avoir milité en faveur de l’indépendance de son pays.

Sa personnalité et ses idées ont été fortement influencées par Atatürk et Gandhi.

Lorsqu’il accède à la présidence de l’Azerbaïdjan le 7 juin 1992 avec 64% des voix, son pays guerroie contre l’Arménie pour le Haut-Karabagh, territoire azerbaïdjanais qui sera occupé par l’armée arménienne. D’ailleurs, l’ONU exige, encore aujourd’hui, par 5 résolutions, le retrait inconditionnel et immédiat de l’Arménie des 20% de l’Azerbaïdjan qu’elle occupe illégalement.

La rivalité stupide entre le président turc Özal et son Premier ministre de l’époque, Demirel puis ensuite l’apathie démesurée de Demirel, devenu président, empêcheront toute aide de la Turquie à cet homme, éperdument amoureux de la Turquie et de la nation turque.

Le président Elçibey devra fuir Bakou suite au retournement de veste de Haydar Aliyev en faveur du commandant Surat Hüseynov.

Environ un million personnes assisteront aux funérailles d’Ebulfez Elçibey. A l’arrivée de Haydar Aliyev, la foule scandera : « Gloire à Elçibey, il n’y a pas plus grand dirigeant que lui ! » ce qui contraindra Aliyev à quitter la cérémonie.

Ému, je me courbe devant la mémoire de ce grand homme passionnément amoureux des Turcs.

Pour finir, je vous propose la traduction, ci-dessous, d’un article, daté du 23 février 2017, du chroniqueur Yılmaz Özdil.


TRADUCTION

Le président azerbaïdjanais, Ilham Aliev, a nommé, mardi 21 février 2017, sa femme, Mehriban Alieva, au poste de vice-présidente, renforçant le contrôle de sa famille sur ce pays du Caucase. Si le président azerbaïdjanais est empêché d’exercer le pouvoir, c’est sa femme qui va tenir les rênes du pays.

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Dans ce pays, l’expression « couple présidentiel » n’est pas prise à la légère. Elle s’applique à la lettre. Le chef d’État désigne sa femme au poste de vice-présidente.

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Puisque le pouvoir était concentré dans une seule main, désormais, il est concentré dans un seul couple.

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Comment en est-on arrivé là ?

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Ebulfez Elçibey !
Il était certain que son pays l’Azerbaïdjan gagnerait un jour son indépendance et que la souveraineté du peuple s’imposerait dans une République démocratique.

Son modèle était Mustafa Kemal Atatürk.
Il clamait « Moi, je suis un soldat d’Atatürk ».
Il a été arrêté et condamné à 1 an et demi d’emprisonnement.
Il a survécu aux geôles du KGB ainsi qu’aux conditions épouvantables dans les mines russes.
« Ils m’ont torturé, ils m’ont fait souffrir, j’ai résisté à tout. Mais, ce qui m’a fait le plus de mal, c’est lorsqu’ils ont arraché de ma veste une épinglette d’Atatürk qui me donnait espoir et force. » regrettait-il.

Dès qu’il a été libéré, il a poursuivi son combat pour l’indépendance de son pays. Il a fondé Le parti du Front populaire d’Azerbaïdjan. Il se battait d’un côté pour la liberté et de l’autre pour récupérer les territoires occupés par l’Arménie.

Après l’effondrement de l’URSS, avec 64 % des voix, il devient le premier président non-communiste de l’Azerbaïdjan.
Il choisit la Turquie pour sa première visite officielle de chef d’Etat. Il visite le mausolée d’Atatürk et écrit ces mots très émus : « Ô majestueux commandant du majestueux peuple turc, je suis honoré de me courber devant toi, en mon nom personnel et au nom de mon peuple. » puis signe : « Ton soldat Ebulfez Elçibey ».

Ensuite, il se rend à la Grande Assemblée Nationale de Turquie, monte à la tribune et s’adresse aux députés turcs : « Lorsque j’ai débuté mon combat, ils m’ont demandé ce que j’allais faire, j’ai répondu : je ferai ce qu’Atatürk a fait, nous allons fonder un Etat démocratique ! ».

Ebulfez Elçibey était cet homme profondément patriote,
Ebulfez Elçibey était cet homme intensément amoureux de la démocratie,
Ebulfez Elçibey n’était pas pro-Atatürk dans le verbe mais dans l’action,
Ebulfez Elçibey a commencé à mettre en œuvre les réformes d’Atatürk dans son pays : passage de l’alphabet cyrillique à l’alphabet latin, adoption de la langue turque comme langue officielle, choix d’une monnaie nationale avec l’abandon du rouble russe pour le manat azerbaïdjanais, retrait des troupes russes du sol azerbaïdjanais, signatures d’exploitation du pétrole et du gaz azerbaïdjanais sur la seule base des intérêts nationaux de l’Azerbaïdjan.

Mais, il était allé un peu trop loin pour certains !
Il fallait donc se débarrasser au plus vite de ce trouble-fête !
Une insurrection a été fomentée avec des militaires corrompus. Le pays était poussé vers le chaos.

Elçibey a décroché son téléphone. Il a demandé l’aide d’Ankara.
Et qu’a-t-il obtenu ? Rien, absolument rien ! Un vide énorme. La vacuité dans toute sa puissance et en prime, une déception incommensurable.
Ankara refusait de bouger le petit doigt : ni armes, ni argent, ni assistance militaire. Une détestable et nauséeuse situation !

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Elçibey ne le savait pas encore mais les dirigeants d’Ankara avaient malheureusement vendu ce pays frère, l’Azerbaïdjan !

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Sans aucune décence, Ankara se permettait de le sermonner : « Abandonne le pouvoir, invite Heydar Aliyev aux responsabilités, nomme-le à la présidence du parlement. Il connaît les Russes de près, il est très expérimenté. Il est le seul capable de calmer la rébellion. »

Heydar Aliyev était un ancien général du KGB et député de l’Union soviétique durant 20 ans. Aliyev était tombé en disgrâce, à l’heure de la Perestroïka, avec Mikhaïl Gorbatchev. En 1991, il est élu président de l’assemblée locale de la République autonome de Nakhitchevan où il fonde son propre parti, le Parti du nouvel Azerbaïdjan (Yeni Azərbaycan Partiyası, YAP), dont il devient président.

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Elçibey était abandonné, il n’avait pas le choix. Aliyev est devenu président du Parlement azerbaïdjanais.
Le piège était en place….

Dès qu’il s’assoie sur le fauteuil de la présidence de l’Assemblée, Aliyev conclut une alliance avec le puissant commandant militaire rebelle Surat Hüseynov pour évincer Elçibey !
Les milices armées de Hüseynov entrent dans la capitale Bakou.
Le peuple fait alors une erreur historique : au lieu de soutenir son président élu, il cède à la peur et se soumet.

Le « soldat d’Atatürk » est abandonné de tous.
Ebulfez Elçibey est contraint de fuir en exil le 7 juin 1993 dans sa région du Nakhitchevan et à abandonner la présidence à Heydar Aliyev, le commandant rebelle Hüseynov obtenant le poste de Premier ministre.

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Avec ce coup d’Etat bien huilé, le pays avait été abandonné dans les mains d’un seul homme.

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La première action d’Heydar Aliyev en tant que président est d’annuler les accords signés par Ebulfez Elçibey sur le pétrole et le gaz azerbaïdjanais. De nouveaux accords partagent les ressources du pays aux sociétés russes, américaines et britanniques.

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Ebulfez Elçibey, définitivement évincé, meurt à 61 ans, à l’hôpital GATA d’Ankara en Turquie, d’un cancer. Environ un million de personnes assistent à ses obsèques mais il est trop tard. Désormais, l’Azerbaïdjan n’appartient plus au peuple azerbaïdjanais.

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Bien évidemment, les élections à venir ne seraient qu’une formalité. Peu importe le résultat réel des urnes, Haydar Aliyev gagnerait les élections avec 80 à 90% des voix. Durant 11 ans, il a dirigé seul le pays. Il a d’abord fait de son fils Ilham un député puis son Premier ministre. A sa mort, c’est évidemment son fils qui lui a succédé. Depuis 14 ans, c’est le fils qui dirige seul le pays. Le fils a d’abord fait de sa femme Mihriban une députée puis sa vice-présidente. Il est fort probable que Mihriban laisse le pouvoir soit à sa fille, soit à son petit-fils.

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Un pays appartient à un peuple, pas à un dirigeant qui l’utilise comme une propriété personnelle qu’il a héritée de son père !

C’est le plus grand enseignement qu’Atatürk ait tenté de nous inculquer tout au long de sa vie.

Soyons des individus citoyens et non des individus inféodés.

Yılmaz Özdil
23 février 2017

©Traduit du turc par Özcan Türk

Source : https://www.sozcu.com.tr/…/al-sana-turk-tipi-baskanlik-169…/


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