Récemment, le célèbre magazine américain « Forbes », source majeure de nouvelles d’affaires et de l’information financières, a publié un article signé Ilan Berman affirmant, que les relations entre l’Iran et l’Azerbaïdjan éprouvent des moments difficiles, et que la République Islamique, qui connaît une grave crise dès le début du 20e siècle, passe sa colère sur l’Azerbaïdjan.
Il peut sembler étrange et déraisonnable, que Téhéran soit capable d’entrer en conflit avec ses voisins au moment où il est sous la pression internationale en résultat du développement du programme nucléaire et compte tenu de l’échec du dernier round de négociations avec l’Occident. Cependant, nous l’observons au moins, dans l’une des destinations. Il y a eu une baisse dans le commerce entre la République islamique d’Iran et la République d’Azerbaïdjan, qui est situé au nord-ouest de Téhéran.
La raison en était la tenue de la conférence, le 30 mars sur « L’avenir de l’Azerbaïdjan du Sud moderne » un groupe des Azéris d’Iran et d’autres étrangers qui aspirent à l’indépendance en Iran. L’événement a été organisé par le Front de libération nationale de l’Azerbaïdjan du Sud. Les participants ont discuté des processus politiques internes d’Iran dans le contexte du programme nucléaire de Téhéran et de l’attitude des États-Unis et de l’UE à cet égard. Au cours de l’événement, il a été noté que l’Iran faisait face à sa plus grave crise depuis le début du 20e siècle, et tous les facteurs régionaux et mondiaux sont contre le régime de Téhéran. Lors de cette réunion, qui s’est tenue à Bakou, en Azerbaïdjan, il a été proposé d’exhorter les militants en Iran à utiliser la pression occidentale sur le régime iranien et « d’établir un état dans la province du nord-ouest, à la frontière avec la République d’Azerbaïdjan ».
L’événement a provoqué de profondes contradictions à Téhéran. L’Ambassadeur azerbaïdjanais en Iran a immédiatement été appelé au ministère des Affaires étrangères de la République Islamique, où on lui a remis une note de protestation. Cette réunion a été diffusée sur la télévision d’Etat, où l’événement a été considéré comme un « dommage grave », qui a été fait aux relations bilatérales.
Mais le scandale n’est pas terminé. Début avril, Mansour Haguigatpur, l’influent président du Comité national du Parlement iranien sur la sécurité et la politique étrangère, a publiquement appelé à un référendum sur l’opportunité de rejoindre l’Azerbaïdjan à l’Iran, affirmant que le peuple d’Azerbaïdjan brûle d’un réel désir de conclure une telle alliance. Quelques jours plus tard, Hossein Shariatmadari, rédacteur en chef d’un journal très puissant et sans compromis « Kayhan », qui est proche du chef suprême de l’Iran, Ali Khamenei, a publié un article appelant à l’intervention iranienne dans le but de « sauver » les Azerbaïdjanais vivant en Azerbaïdjan. Cet article est une indication claire, que le gouvernement religieux de l’Iran approuve cette idée.
Comme on l’attendait, de nombreux politiciens ont fourni beaucoup d’arguments en faveur de l’appui du public pour l’adhésion de l’Azerbaïdjan. Le parlement iranien a même commencé à rédiger un projet de loi pour la ré-adhésion du pays.
Ces démarches ne sont pas sans précédents. Les relations entre Bakou et Téhéran ont toujours été tendues. Les différences remontent à l’année 1800, lorsque l’Empire russe, qui a étendu son influence dans le Caucase du Sud, a réussi à prendre le contrôle de la majeure partie du territoire, qui était sous l’influence de l’Iran, occupé désormais par la République moderne de l’Azerbaïdjan. Cependant, les régions méridionales de l’Azerbaïdjan sont restées sous le contrôle de la République Islamique. Selon les estimations officielles du gouvernement américain, à ce jour, les Azéris constituent la plus grande minorité ethnique en Iran, ce qui représente près d’un cinquième de la population iranienne totale de 79 millions de personnes. En Iran, il y a environ 13 millions d’Azerbaïdjanais, un nombre plus important que celui de la population totale de la République d’Azerbaïdjan.
Il n’est pas étonnant, que le régime iranien soit préoccupé sérieusement d’un fantôme du séparatisme azerbaïdjanais. Autrement dit, la République Islamique considère, que l’Azerbaïdjan politiquement dynamique et économiquement florissant soutiendra les tendances séparatistes latentes au sein de la population azérie d’Iran, en tenant compte du fait, que les conséquences seraient potentiellement catastrophiques pour la République islamique. Ainsi, au cours des deux dernières décennies, le régime au pouvoir en Iran a mené une campagne persistante, à long terme et secrète visant à déstabiliser le régime en Azerbaïdjan voisin pour que le séparatisme azerbaïdjanais n’ait jamais eu assez de puissance pour menacer l’intégrité territoriale de la République Islamique.
Mais les derniers temps, les relations bilatérales se sont encore détériorées. L’une des raisons est l’élargissement et le renforcement des liens politiques de l’Azerbaïdjan avec l’Israël. Ces faits ont soulevé des soupçons à Téhéran, bien que Bakou déclare le contraire. L’Iran estime, que suite à leurs actions, les responsables de Bakou peuvent porter préjudice au programme nucléaire de l’Iran de la part d’Israël, s’il a lieu. Les hommes politiques iraniens locaux jouent également un certain rôle dans cette affaire. A la veille des élections présidentielles dans le pays, qui se tiendront dans deux mois, le régime au pouvoir de la République islamique cherche à prévenir toute agitation interne possible. L’Iran a des préoccupations, que le nord du pays où habitent les Azerbaïdjanais ethniques, peut être un véritable point chaud.
Il n’est pas étonnant, que la récente flambée du séparatisme azerbaïdjanais, même si elle n’est limitée que par la rhétorique politique et l’approbation de Bakou, ait causé une réaction violente de la part des dirigeants iraniens. La République Islamique s’inquiète pour sa légitimité politique à la veille du vote national et fait face au renforcement du blocus économique en raison de pressions budgétaires de l’Ouest. À cet égard, actuellement, le régime iranien est concerné, peut-être, par la question nationale la plus urgente et controversé. La République Islamique cherche à garder le secret sur la variété et l’anxiété de son peuple.
Renseignements sur l’auteur : Ilan Berman est le vice-président du Conseil américain pour la politique extérieure, une sorte de brain trust, qui conseille, élabore des projets et réfléchit sur les questions de la politique extérieure et la sécurité nationale, basé à Washington, district de Columbia.
Berman se focalise sur la sécurité régionale au Moyen-Orient, l’Asie centrale et la Russie, donne des consultations à l’Agence centrale de renseignement (Central Intelligence Agency) et le ministère américain de la Défense, fournit une assistance à un certain nombre d’organismes gouvernementaux et de bureaux du Congrès. Ilan Berman est également l’éditeur de la revue sur la sécurité internationale. Son livre récent publié, était « Gagner la longue guerre » (2009).
Lien/Source : http://gulustan.info/2013/04/forbes-teheran/