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Türk Telekom Arena : une inauguration gâchée

Publié le | par Hakan | Nombre de visite 1933

Le nouveau stade de Galatasaray, la Türk Telekom Arena, a été inauguré samedi 16 janvier, marquant un véritable tournant dans l’histoire du club qui abandonne son enceinte vieillissante d’Ali Sami Yen. Sur le terrain, Galatasaray et l’Ajax d’Amsterdam se sont neutralisés 0-0 mais ce sont surtout les tribunes qui ont créé une énorme polémique en Turquie.

Cela fait des années que Galatasaray planifiait de déménager d’Ali Sami Yen. Stade vieillissant, trop exigu (seulement 23 000 places) pour accueillir le nombreux public du club, un changement s’avérait nécessaire. Les rouges et jaunes avaient bien tenté de s’exiler au stade Olympique Atatürk en 2003 mais l’expérience n’avait durée qu’une saison, la faute à des infrastructures de transport défaillantes qui faisaient (et font toujours) de l’arrivée à ce stade un périple. Non, il fallait donc son propre stade à Galatasaray. Depuis 1996, le projet de construire un nouveau stade à la place de Ali Sami Yen existait, mais n’aboutira jamais, la faute à un endettement qui ne cesse de croître.

Alors que le rival Fenerbahçe termine la construction du nouveau Sükrü Saracoglu en 2007, Galatasaray n’a toujours pas de stade, ni les moyens de s’en construire un, vu l’état catastrophique des finances du club.

Le coup de pouce de l’Etat

Galatasaray conclut finalement un accord avec l’Etat turc, qui propose de financer la construction du stade (environ 150 millions d’euros) et des infrastructures avoisinantes (route, métro). En échange, le club cédera son droit à utiliser le terrain de Ali Sami Yen, d’une forte valeur constructible par sa situation géographique en plein coeur de la partie européenne d’Istanbul. Un geste vu par beaucoups comme un cadeau de l’Etat, Galatasaray ne déboursant par un centime dans l’opération.

D’une capacité de 52 000 places, le stade de Galatasaray sera doté de toutes les technologies modernes, y compris un toit ouvrant et sera situé à Seyrantepe, dans un endroit vide jusqu’avant.

Les travaux commencent en 2007, avec une fin prévue fin 2009. En 2008, Galatasaray signe un contrat avec Türk Telekom qui sponsorise le nom du stade en échange d’une somme estimée à 4 millions de dollars par an.

Malgré des péripéties (arrêt du chantier plusieurs mois, changement d’entreprise de construction...), l’Etat met les moyens nécessaires et la pression pour finir les travaux à temps. Une nécéssité car Galatasaray a déjà vendu les abonnements et les loges pour le début de l’année 2010. Un retard dans la livraison du stade signifierait pour le club des grosses pénalités financières. Deux ouvriers trouveront la mort dans le chantier. Les normes de sécurité ont-elles été négligées dans la précipitation ? Peu d’informations ont filtré sur cette affaire...

15 janvier 2010 : un tournant pour Galatasaray

Finalement, le samedi 15 janvier est un grand jour pour Galatasaray. Le stade semble terminé, la station de métro attenante de Seyrantepe, est déjà inaugurée. Malgré une saison d’ores et déjà ratée sur le plan sportif, tout semble prêt pour ouvrir une nouvelle page dans l’histoire du club. A cette occasion, l’Ajax d’Amsterdam est invité pour disputer un match amical.

Pourtant certains couacs sont déjà prévisibles. L’obligation de Galatasaray de commencer à jouer dans ce stade début janvier fait que tous les détails ne sont pas encore prêts. Ainsi, à l’heure de débuter dans sa nouvelle enceinte, le club n’avait pas eu le temps d’imprimer les cartes d’abonnement, et a donc du distribuer des billets aux supporters. Autre exemple flagrant : si l’aménagement intérieur du stade est terminé, l’extérieur ne l’est pas encore. La construction des infrastructures d’accès au stade n’est pas encore au point, notamment les routes. A la sortie du stade, les médias affirment qu’une tragédie a été évitée de justesse, car la station de métro n’est pas conçue pour un afflux massif de dizaines de milliers de personnes. Pour des raisons de sécurité également, le stade n’était rempli qu’à 80% de sa capacité.

Le Premier Ministre sifflé

Mais ces problèmes ont été éclipsé par un autre évènement. Invité à l’inauguration, le premier ministre Recep Tayyip Erdogan qui devait prononcer un discours a été copieusement sifflé par le public et obligé de quitter le stade. En cause d’après certains, la tentative du gouvernement de récupérer à des fins politiques l’évènement. Sur les écrans géants du stade défilent en effet ce soir là des clips vantant les projets de construction du parti au pouvoir l’AK Parti. C’est la que Erdogan Bayraktar, président de TOKI, l’organisme étatique chargé des programmes de construction nationaux, y compris le stade, prend la parole et prononce des mots incroyablement provocants (vidéo). D’après lui, Galatasaray était même incapable de payer le loyer d’Ali Sami Yen, parlant du défunt Özhan Canaydin, ancien président du club, comme d’un "naif". Un discours d’une violence et d’un toupet inouï pour ce qui est censé être...une fête, avec spectacle son et lumières (photo).

La bronca est terrible dans le stade, et le climat décidément plus du tout à la fête. Un malaise sensible chez les supporters de Galatasaray, à qui ont donne le sentiment de ne pas être dans "leur" stade. Les excuses d’Adnan Polat, président du club, et de certains joueurs, comme Arda Turan, au Premier Ministre n’enlève rien à la colère et de l’amertume des supporters de Galatasaray vis à vis des évènements, et de l’agression verbale de M. Bayraktar, qui rappellent que le stade a été construit avec les deniers du contribuable turc et non ceux des hommes au pouvoir.

Certains diront que les sifflets envers Erdogan étaient attendus, le Premier Ministre ayant déjà été sifflé copieusement lors de la finale des championnats du monde de Basketball à Istanbul en septembre, où lors de son dernier passage à Ali Sami Yen, lors du match Galatasaray-Hambourg. Alors, réaction spontanée ou stratégie politique réfléchie, à l’approche des élections, de la part du Premier Ministre ? Nous nous refusons à ce débat, mais constatons avec la plus grande déception le fiasco total de cette inauguration.

Ce qui était censé être la bonne nouvelle dans le présent troublé du club s’est transformé en une crise majeure, sur fond de rivalités politiques, le Premier Ministre menaçant même à demi-mots de priver Galatasaray de "son" stade, rappelant que les accords entre le club et l’Etat n’avaient pas encore été officialisés.

La crise s’amplifie de jour en jour pour Galatasaray, et sur tous les plans. Pointé du doigt, le président Adnan Polat est jugé responsable de la situation actuelle. Il déclarait cependant à la presse turque ne pas réfléchir à l’éventualité d’une démission.

Pour l’anecdote, Galatasaray et l’Ajax ont terminé sur un score nul et vierge 0 à 0. Mais pouvait-on encore avoir le coeur au football après de tels évènements ?

Source Football Turc


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