Ne jetez plus vos masques !
Avec AESIO MUTUELLE
Depuis l’interdiction des masques en tissu dans les espaces publics, les masques jetables bleus utilisés pour lutter contre le Covid-19 ont envahi notre quotidien… mais aussi la voie publique et nos poubelles. Fin janvier 2021, la Commission « flash » chargée d’étudier le traitement des masques usagés a remis son rapport.
Bilan : vos masques ne sont pas vraiment à "usage unique" : vous pouvez – devriez – les réutiliser ! Et voici pourquoi.
La commission du Développement durable et de l’Aménagement du territoire a mandaté une mission « flash » sur le traitement des masques chirurgicaux usagés, accusés d’être responsables de 40.000 tonnes de déchets nos recyclés, rien que sur l’année 2020 en France !!
Quel est l’impact sanitaire et environnemental des masques ?
S’ils sont incontournables pour éviter la transmission du virus et aident à lutter contre la propagation du Covid-19, les rapporteurs de la mission se sont demandés comment mieux valoriser ces déchets ? Et comment réussir à créer une filière de recyclage des masques ?
Ils ont sollicité l’avis de nombreux spécialistes du recyclage, des scientifiques spécialisés sur la collecte et le retraitement des déchets (CEA, INSERM, CNRS), les élus locaux et les grands organismes de sécurité et d’écologie (ANSES, ADEME)… pour construire leur rapport.
Les masques à usage unique, dits "chirurgicaux", sont constitués à 90% de polypropylène et sont une grande source de pollution pour l’environnement.
Les conséquences de la consommation de masques, en termes de pollution
L’Agence pour la diffusion de l’information technologique (ADIT) estime que nous utilisons entre 6,8 et 13,7 milliards de masques jetables par an, équivalents à 40.000 tonnes de déchets par an. En comparaison avec les 3,4 millions de tonnes de déchets plastiques produits annuellement, ce chiffre peut paraître faible.
Sans remettre en question l’utilité des masques, force est de constater, au vu du nombre de masques qui décorent nos trottoirs, caniveaux et espaces verts, que cette pollution générée par les masques ne peut pas être ignorée. Et on ne parle évidemment pas là, que de pollution visuelle.
Des masques qui polluent, dès leur fabrication
Ces masques sont exclusivement fabriqués en Asie, à base de pétrole et de matériaux non dégradables. Ajoutons à cela, le bilan CO² nécessaire à leur transport : l’impact écologique est déjà critique !
Lorsqu’ils sont abandonnés par terre ou dans l’eau, ils se dégradent en micro et nanoplastique, polluant les sols et les eaux durant plus de 400 ans, et se révélant être un piège pour des animaux – qui se retrouvent étouffés ou coincés dans les élastiques –. Et lorsqu’ils sont jetés dans la poubelle, leur enfouissement ou incinération n’est pas non plus une bonne solution écologique.
L’ONU estime que la production a été multipliée par 200 et que 1,5 milliard de masques ont déjà fini dans les océans.
Si l’abandon sauvage des masques est pénalisable (l’amende est passée de 68 à 135 euros), la commission souhaite aller plus loin, en étudiant les possibilités de recyclage et en incitant à réutiliser ces masques dits "jetables".
Inciter à mieux collecter et à recycler les masques
Rappelons que le port du masque est recommandé, voire obligatoire dans de nombreux lieux publics, afin de ralentir la transmission du Covid-19 !
Les difficultés liées aux caractéristiques de ces masques
À cause de leur usage, justement, ces masques chirurgicaux présentent un risque infectieux lorsqu’ils sont manipulés (le Haut Conseil de santé publique estime que le virus reste viable 7 jours sur ces masques).
Bien qu’ils soient composés essentiellement de plastique, ces masques ne peuvent pas être jetés dans les poubelles de tri, car ils sont trop légers pour être correctement traités par les machines des centres de tri. Or, on compte jusqu’à 80 masques /minute sur les tables de tri, ce qui n’est pas sans risque pour les salariés.
Le coût de retraitement de ces déchets est prohibitif, à 19.000 € la tonne, contre 442 € la tonne pour valoriser d’autres emballages plastiques.
Le manque de visibilité sur l’évolution de la consommation de masques encourage peu les industriels à investir dans une filière de recyclage dédiée. Puisqu’en perspective de l’amélioration de la situation sanitaire, le port du masque pourrait rapidement devenir marginal (à moins d’adopter une vraie "mode" sociétal pérenne, comme en Asie).
Pour ces différentes raisons, le recyclage des masques n’était pas une priorité jusqu’à présent.
Quelques exemples d’initiatives locales de collecte et de recyclage
Heureusement, des initiatives locales émergent, proposant des solutions intéressantes.
A l’exemple de NeutraliZ, à Tours, que la Métropole soutient dans son système reposant sur l’économie circulaire. 500 bornes de collecte, réparties sur 180 endroits très fréquentés, ont permis de récupérer 500.000 masques en tissus et chirurgicaux (soit 2 tonnes) en 2 mois seulement. Un chiffre prometteur – déjà multiplié par 4 entre décembre et janvier – pour ces masques qui sont désinfectés par une entreprise de réinsertion, puis broyés et lavés pour produire ensuite du polypropylène pur.
Citons aussi ces entreprises de l’Ain, qui se sont alliées à Cycl-Add pour confectionner des vêtements techniques haut de gamme, à partir de masques recyclés.
Ou la mairie de Paris, qui transforme en matériel de géométrie redistribué aux élèves (règles, équerres ou rapporteurs), les masques collectés et recyclés par la start-up Plaxtil, selon un processus mis au point et validé par l’Agence régionale de santé.
"Massifier" la collecte et le recyclage
Multiplier les points de collecte dédiés dans les lieux collectifs est une bonne piste, comme nous l’avons vu dans ces exemples.
Il serait possible d’en installer en entreprises, en sortie de supermarchés, dans les lieux publics, etc. De nombreuses entreprises proposent déjà des dispositifs et des circuits de collectes. Citons Lemon Tri, recyGo, keeNat, Versoo…
Exception faite des masques utilisés à l’hôpital, qui sont traités comme des déchets particuliers (DASRI).
Le rapport considère que la collecte en circuits courts, qui s’appuie sur l’économie sociale et solidaire (recours aux entreprises d’insertion, aux sociétés coopératives d’intérêt collectif…) est la plus pertinente pour apporter une réponse viable, demain, à ce problème de pollution. Et envisage d’étendre le label « Anti-gaspillage alimentaire » créé en février 2020, pour reconnaître les entreprises qui s’engageront dans le recyclage des masques.
La meilleure piste : réutiliser les masques en les lavant
Si l’idée avait ses détracteurs au début de l’épidémie, force est de constater qu’aujourd’hui, les études démontrent que les masques "à usage unique" peuvent être réutilisés et « gardent leurs performances de protection après plusieurs cycles de lavage à 60°C avec détergent ».
À noter qu’il n’existe aucune étude à ce jour, sur le risque d’augmenter la présence du virus du Covid-19 dans les eaux usées, dû aux lavages de masques par les particuliers.
Malgré les idées reçues, les masques en tissu sont encore les bienvenus !
Si les masques de catégorie 1, dont le pouvoir filtrant est supérieur à 90%, sont recommandés par le Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP) depuis mi-janvier, ce conseil vaut pour le port de masques chirurgicaux. Mais également pour ceux en tissus, du moment qu’ils ne sont pas fabriqués artisanalement.
Laver et porter plusieurs fois les masques reste donc bien la meilleure façon, à notre échelle individuelle, de réduire nos déchets pour l’instant !