L’économie ce n’est pas si compliqué !
Quelle que soit l’entité économique dont on parle, les capitaux sont un élément primordial pour leur réussite. Il s’agit alors de dégager des capacités de financement nécessaires à la bonne marche de toute entreprise, et la finalité consiste à créer des richesses conséquentes dans un monde en perpétuelle compétition. Robert Benayoun, critique et auteur français avait pour coutume de dire « À consommer avec modération », ce sont des paroles qui pourraient nous inciter à nous autoréguler de notre faim de la finance. À vrai dire, cette autorégulation est aujourd’hui impossible, car l’ensemble des structures bancaires, et publicitaires joue sur notre psychologie du désir. Et c’est par ce même désir qu’ils arrivent à leur fin : nous inciter à avoir recours à leurs services. Mais rassurez-vous, sans finance l’économie n’aurait jamais vu le jour. En revanche, c’est parce que l’homme est au centre de ce pécule qu’il finit par succomber aux charmes de la finance. Il s’agit alors de déterminer le point d’équilibre qui permettrait de ne pas abuser de la finance sans son consentement.
Beaucoup de lecteurs doivent se poser la question suivante : après la crise de 1929 et de 2008 peut-on dire que la finance en nombre trop conséquente peut agir négativement sur la croissance ?
L’économie a besoin de la finance
À défaut de trouver un objet de même valeur que celui qu’on souhaitait échanger, l’homme cherchait un moyen universel de donner de la valeur à ce qu’il produisait. Dès l’instant où on avait inventé l’argent, on avait également donné naissance à la finance. Par tâtonnement, se dessinait alors une nouvelle organisation des échanges, et plus précisément une nouvelle économie. Le passage d’une économie fondée sur le troc à une économie qui reposait sur une nouvelle monnaie fut difficile, mais son adoption fut définitive. Nonobstant le pays, la finance a toujours eu un rôle prépondérant dans son évolution et ce, à toutes les périodes de l’histoire. Lorsque les ressources financières faisaient défaut, on avait recours aux crédits par l’intermédiaire des banques. Mais un drame n’arrive jamais seul. Rappelez-vous, nous avons vu dans l’article intitulé « la main mise sur la finance ? » que 99% des crises économiques étaient précédées d’une crise de crédit. Ainsi, en nourrissant son désir d’atterrir dans l’Éden de l’argent facile, l’homme a contribué à braver l’interdit : il a débloqué la porte de sa propre cellule. C’est pourquoi, par expérience, on peut dire avec certitude aujourd’hui que le crédit doit être consommé avec modération. En effet, dépassé une certaine orée, le crédit devient inefficace, voire contreproductif. La crise des subprimes est le parfait exemple de cette turpitude de l’être humain. Lorsque ce type de comportement se généralise, il conduit l’économie mondiale dans les abysses. Et c’est ce que nous vivons actuellement.
Dans les pays en voie de développement où les revenus sont faibles, la propension à épargner (c’est-à-dire l’argent qu’on dépose à la banque à la fin du mois) est également inconsistante (faible), car le revenu est directement consommé. Il s’avère que les banques dans ces pays ont également une mauvaise réputation. Ces deux raisons expliquent la présence galopante de l’épargne dans ces pays. En l’absence d’implication particulière des ménages dans le domaine bancaire, les projets sont souvent financés par le « microcrédit ». Je vous invite à lire mon article relatif à ce sujet. Dans ces mêmes pays, les individus très riches ont tendance à épargner non pas dans les banques nationales, mais auprès des banques étrangères, car celles-ci sont plus rémunératrices et plus sûres.
En réalité, il s’avère que la plupart des financements sont d’origine familiale car le système bancaire est quasi-ineistantt. Dans mon article intitulé « Le microcrédit » j’ai développé un tableau récapitulatif de la part du crédit dans le PIB. Voyons à nouveau ce tableau :
Part du crédit provenant des banques | |
---|---|
Cote d’ivoire | 5.7 |
Inde | 6 |
Indonésie | 25.3 |
Mexique | 17.4 |
Pakistan | 1.5 |
Panama | NC |
Pérou | 0 |
Timor oriental | 0 |
Cette situation traduit la difficulté à laquelle les entreprises doivent faire face pour émerger, et à fortiori se développer. Si les marchés financiers ont pris l’ascendant sur l’économie réelle en occident, dans les pays en voie de développement, c’est encore loin d’être le cas. En effet, les structures et les connaissances ne sont pas à jour et il est difficile de mettre en place ce type d’établissement. Tout simplement parce qu’on manque de financement. Soyons maintenant objectifs : lorsqu’un individu lambda place son argent dans un établissement financier, ce dernier utilise cette nouvelle « ressource » de deux manières. Par exemple, si c’est une banque, elle peut prêter de l’argent à ceux qui en ont besoin. Le second moyen d’utiliser cette « bourse » est d’investir, c’est le leitmotiv des fonds d’investissement. Ainsi, on comprend que le rôle de la finance est inhérent à l’économie, car elle permet de diffuser l’épargne pour ceux qui veulent démarrer un projet d’entreprise. Plus généralement, la finance permet de créer de la richesse, et je vais le répéter une nouvelle fois : sans finance l’économie n’existerait pas. Un dernier élément substantiel est à prendre en compte : la finance apporte une gestion inconditionnelle du risque. À ce titre, il y a pléthore d’exemples, et nous pouvons les illustrer en ces termes : la finance permet à de jeunes créateurs d’entreprises de leurs apporter les éléments dont ils en besoin pour faire florès (réussir) leur création.
La finance est-elle dans une air de démesure ?
Rappelez-vous, dans un de mes articles intitulés « la main mise sur la finance », nous avions vu que les bulles de crédits précédaient les crises. Par conséquent, la finance peut parfois s’avérer être contreproductive en cas d’excès. Plusieurs chercheurs de la banque des finances internationales (ceux qui ont proposé la mise en place de Bale III) ont montré qu’au moment où le crédit des établissements privés atteignait 100% du PIB, cela avait un effet contreproductif. Ainsi, dépasser ce seuil c’est donner la mort à la productivité d’un pays. Pire : lorsque ces crédits proviennent exclusivement du secteur bancaire, c’est la croissance qui en subit les conséquences. Mais comment est-ce possible ? Illustrons ce phénomène par le modèle ci-dessous :
à partir du moment où le crédit a un impact positif sur l’économie réelle, cette situation devient également positive pour le domaine de la finance. Cet événement confortable donne de la confiance aux marchés. Dès lors, les banques vont se mettre à investir dans des nouveaux produits financiers très risqués, mais également très rémunérateurs. Ainsi, voulant faire des profits à grande échelle, elles vont se mettre à emprunter pour spéculer sur ces mêmes produits. Se développe alors ce qu’on appelle un comportement « mimétique ». Autrement dit, toutes les banques vont singer (copier) le comportement de la première banque : elles vont acheter ces nouveaux produits pour faire du profit. Mais vient un jour où la bulle de crédit gonfle tellement qu’elle finit par exploser. Enfin, c’est l’économie qui est directement touchée. Car l’explosion de cette bulle entraîne une chute cruelle de la confiance et provoque des hausses pour les attributions de crédits. Par conséquent si le verrou du crédit devient actif, c’est toute l’économie qui en pâtit. Ce modèle assez simple nous montre la façon dont les bulles se forment et explosent dans nos sociétés contemporaines. Si la finance contribue à limiter les risques, elle a cependant une contrepartie : elle est aujourd’hui devenue le canal de diffusion principal de ces aléas.
Beaucoup d’entreprises avaient vu arriver ce type de crise (la crise des subprimes en est un parfait exemple). Et généralement, plus les risques sont élevés, plus la rémunération est importante. C’est pourquoi la plupart des investissements financiers vont couvrir les spéculations qui sont les plus rémunératrices et vont s’efforcer de trouver un bouc émissaire lorsque la bull va éclater. Bien sûr, avant que la bulle n’éclate, les dirigeants vont faire en sorte de toucher leurs dividendes ! Somme toute, la finance est primordiale et reste l’élément moteur de l’économie, mais une finance qui dérive trop et dans laquelle on cherche le profit à outrance peut être contreproductive.
La finance pas si mauvaise que ça : l’exemple de la Turquie
L’importance de la finance pour la croissance de l’économie n’est plus à démontrer. Mais comme dit précédemment, un pays ne peut pas mobiliser ses efforts dans tous les secteurs. C’est pourquoi la Banque Mondiale peut parfois intervenir dans ce domaine. L’un des principaux freins des entreprises en Turquie est le financement de leurs activités. Pour pallier cette carence, la mission de la Banque Mondiale a été très particulière : soutenir les PME financièrement. Cette collaboration permet de sustenter la concurrence, l’innovation et la création de richesse dans le pays. La structure de l’économie turque repose à 99% sur les PME qui emploient 80% des actifs en Turquie. Ainsi, les financements de la Banque Mondiale sont des contributions non négligeables à la réussite et à la croissance des PME. La Banque Mondiale a opté pour la coopération avec les PME de l’est de la Turquie car elles étaient moins bien alimentées en crédits. À l’issue de cette collaboration, ce ne sont pas moins de 700 millions de dollars qui ont été prêtés aux entreprises turques. Cette somme astronomique a été déployée pour obvier (atténuer) deux problématiques :
celle du fonds de roulement (les ressources financières qui permettent à l’entreprise de payer ses salariés et de survivre)
celle de l’investissement pour donner de la vigueur à l’innovation ;
Voici un récapitulatif des actions de la Banque Mondiale en Turquie :
cette enveloppe de 700 millions d’euros a contribué à accorder plus de 770 prêts pour aider les entreprises dans leurs phases de développements ;
ces fonds sont pour la toutes les zones géographiques de la Turquie, mais une grande partie a été alloué pour les régions où le crédit est faible ;
on a ainsi créé près de 9300 emplois supplémentaires ;
les PME turques ont remboursé 75 millions d’euros, ce qui a rendu éligible d’autres PME d’avoir accès à ces financements.
Voici le témoignage d’un des bénéficiaires de l’aide de la Banque Mondiale :
Erdal Gülçan, associé de GÜLCAN Furniture : « Quand nous avons lancé le développement de notre entreprise, nous n’envisagions pas du tout de recourir à un prêt. Nous avions prévu pour 2012 le lancement d’une autre usine sur nos propres ressources. Mais la banque avec laquelle nous travaillons nous a dit : ’Nous allons vous prêter de l’argent pour que vous puissiez construire votre usine plus rapidement et démarrer plus tôt son exploitation’. Notre usine faisait 7 500 m2 et nous ne pouvions servir que 5 000 clients sur les 20 000 potentiels. Nous devions être sélectifs, car nous n’arrivions pas à honorer nos commandes à temps. Aujourd’hui, nous sommes dans une usine à quatre étages de 28 800 m2 et sommes en mesure de produire pour des clients originaires non seulement de notre ville, mais aussi d’autres villes du pays, et même pour des clients étrangers. Nous avons connu une augmentation spectaculaire de nos clients, qui sont aujourd’hui 10 000. À long terme, nous espérons devenir une marque mondiale ».
L’appartenance inhérente de la finance à l’économie et le besoin de l’économie d’avoir recours à la finance (marchés financiers, prêts bancaires…) constituent aujourd’hui le point d’orgue de nos sociétés contemporaines. Mais encore faut-il rappeler que ce couple n’a pas connu que des jours heureux. À ce titre, il est bon de mentionner qu’il y a eu plus d’une dizaine de crises après la grande dépression de 1929. Elles proviennent essentiellement d’un système financier et monétaire encore trop jeune et mal ficelé. Car la mise en place d’un tel système nécessite une régulation de tout premier ordre des acteurs. Néanmoins, des exemples comme celle de la Turquie illustre combien une finance bien maîtrisée peut fortement concourir à la croissance. Aujourd’hui, on remarque à quel point la finance a pris le pas sur l’économie réelle, il faut alors se poser la question suivante :
L’économie réelle peut-elle un jour reprendre la place qui lui est due ? Siège qui est actuellement occupé par la finance.
Aujourd’hui c’est la fête des Mères, voici une citation de Jean-Pierre Ostende sur laquelle vous pouvez méditer : « L’asile le plus sûr est le coeur d’une mère »
Ekinci Ender
Lien/Source : Blog Economie.