TURQUIE NEWS vous propose la traduction d’un article de Rusen Cakir paru dans le quotidien Vatan. Les terroristes kurdes, basés dans le nord de l’Irak, ont encore une fois lancé une attaque sanglante contre les Turcs. Ces attaques discréditent le gouvernement en place, sans toutefois servir les intérêts de la population kurde que le PKK prétend défendre.
PHOTO : Le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan a assisté aux funérailles des soldats tués par des rebelles du PKK, 5 octobre 2008.
crédit : AFP
Par Rusen Cakir
L’attentat commis par le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) contre le poste d’Aktütün à la frontière avec l’Irak, au cours de laquelle 15 soldats turcs ont été tués, 2 ont disparu et plus de 20 ont été blessés, est encore plus grave que celle qui avait coûté la vie à 12 soldats en octobre 2007. A l’époque, elle avait débouché sur une intervention de l’armée turque dans le nord de l’Irak. Elle s’était produite peu de temps après les élections législatives de juillet 2007 et l’élection de Gül à la présidence de la République. Celle du 5 octobre s’est déroulée à un moment plus critique. Hormis le contexte international très sensible (crise financière mondiale, élection présidentielle aux Etats-Unis, incertitude concernant l’évolution de la situation en Irak et dans le Caucase), l’attaque meurtrière du 5 octobre s’est produite alors que la Turquie vit une situation de grave crise.
En effet, le processus judiciaire visant à interdire l’AKP, qui n’a pas donné de résultat, et le dialogue de sourds qui caractérise les rapports entre la majorité et l’opposition ont créé une dangereuse polarisation au sein de la société turque. Avec la révélation de scandales touchant l’AKP, c’est désormais la corruption qui a remplacé la laïcité en tant que vecteur de cette crise chronique. Or le PKK montre bien qu’il compte bien profiter de cette ambiance délétère. L’attaque du PKK se produit également alors que la représentation politique légale du mouvement nationaliste kurde en Turquie est dans l’impasse. Le Parti pour une société démocratique (DTP, qui compte 20 députés à l’Assemblée nationale [NDT : Proches du PKK]) est en effet également menacé par une procédure d’interdiction. Pour autant, on ne peut pas dire que les élus kurdes aient beaucoup fait depuis plus d’un an pour contribuer à la résolution de la "question kurde" en Turquie. Ils ont plutôt, volontairement ou inconsciemment, contribué à aggraver la situation. En cause, l’influence du PKK qui pèse sur ce parti et dont les membres ne veulent pas, ne peuvent pas ou n’ont pas le courage de se désolidariser. D’autant plus que la Turquie est déjà en campagne électorale pour les élections municipales de mars 2009 dont l’enjeu principal sera précisément le Sud-Est où l’AKP et le DTP dominent le paysage politique. Si l’AKP réussissait à prendre les mairies DTP de Diyarbakir et de Batman, ce serait un coup très dur pour le mouvement [nationaliste] kurde en Turquie. C’est pour essayer d’enrayer cette évolution que le PKK multiplie ses actions terroristes. Cette situation n’apportera évidemment rien de bon au DTP, mais ce ne sera pas la première fois que le PKK sacrifiera ses vitrines politiques légales pour pouvoir continuer à exister.
Par ailleurs, l’attentat du PKK a eu lieu alors que des heurts sérieux se produisaient dans certaines villes anatoliennes entre Turcs et Kurdes. Affirmer que le PKK a planifié cette attaque précisément au moment des affrontements entre Turcs et Kurdes à Balikesir serait exagéré. Mais ce n’est un secret pour personne que le PKK encourage les affrontements interethniques dans les villes de l’Ouest, au minimum pour l’utiliser comme moyen de chantage. Dans ce contexte, les funérailles des soldats morts lors de cette attaque devraient rendre la situation très sensible dans les prochains jours.
Le PKK est considéré comme une organisation terroriste par la communauté internationale. Les attentats de l’organisation séparatiste ont causé la mort de quelque 40.000 personnes depuis 1984, début des attentats du groupe terroriste qui vise à instaurer un Etat indépendant kurde dans le sud-est de la Turquie.