16 avril 2024

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100e anniverssaire de la république de Turquie

Le dynamisme de l’économie turque au cours des deux dernières années, caractérisée par une croissance qui a été la plus forte de celle des pays de l’OCDE, n’a pas manqué de susciter des interrogations : l’économie turque était-elle en surchauffe ? Le déficit des paiements courants pouvait-il être financé par des capitaux à long terme ? L’atterrissage allait-il être brutal ? L’année 2012 devrait répondre à toutes ces questions.


Economie

Tableaux de bord de l’économie turque

Publié le | par Sophie C. | Nombre de visite 504

1- Une croissance 2012 qui pourrait être celle d’un atterrissage en douceur
Certains observateurs de l’économie turque, le FMI notamment, prévoyait il y a quelques semaines encore une croissance quasi atone en Turquie en 2012 (+0,4%) alors que les autorités locales tablaient sur un chiffre de +4%.

Les derniers résultats de l’économie turque semblent donner raison au gouvernement turc : la croissance du dernier trimestre 2011 (+5,2%) a été plus forte que prévue et a porté celle de l’ensemble de l’année 2011 à 8,5% après une croissance elle-même révisée à la hausse en 2010 à +9,2%. Dès lors, le FMI a remonté sa prévision de croissance pour l’année 2012 à 2,3% et rend crédible la prévision nationale à 4%.

Ainsi la Turquie entrerait depuis le quatrième trimestre 2011 dans une période de « soft-landing ». Au cours de la période de forte croissance des années 2010 et 2011, après une année 2009 marquée elle-même par un recul du PIB de 4,7%, le moteur de la croissance a été le dynamisme de la demande interne obtenue par une hausse de l’investissement (+25% en 2011) et de la consommation privée (+6,8% en 2011) . La forte progression du crédit (+30% en 2011) a largement alimenté la demande intérieure.

Dès lors, la question est posée de savoir si la contribution des échanges extérieurs à la croissance, jusqu’alors négative, allait au contraire devenir positive et compenser une moindre croissance de la demande intérieure. Pour autant les perspectives d’évolution de l’environnement international et notamment celui de la zone euro, principal client de la Turquie, n’apparaissait pas très favorable, tout comme celui du Moyen Orient avec notamment la crise syrienne.

En l’absence de chiffre consolidé de la croissance au 1er trimestre 2012, quelques indicateurs avancés montrent que l’on est bien rentré dans une phase de moindre croissance : la production industrielle a accusé en janvier une baisse de 3% par rapport à décembre 2011 et en février une légère hausse de 0,7% n’a pas totalement compensé le recul du mois précédent. Le taux d’utilisation des capacités de production n’atteint pas les niveaux observés avant l’éclatement de la crise financière en 2008-2009.

2- Les effets de ce ralentissement sur les grands équilibres
a- Bonne maitrise cependant des finances publiques malgré l’inflexion de la conjoncture et l’accroissement de la charge de la dette
Le ralentissement de l’activité économique pouvait laisser craindre un certain creusement du déficit des finances publiques par moindre progression des rentrées fiscales. Le rebond économique rapide enregistré en 2010 et en 2011 avait en effet permis au gouvernement de ramener le niveau du déficit public de 5,5% du PIB en 2009 à 3,6% en 2010 et à 1,4% en 2011. L’on enregistrait même en 2011 un excédent primaire hors intérêts de la dette de 1,9% du PIB.

Au premier trimestre 2012, l’on a observé une augmentation des dépenses de 15% en raison notamment de l’accroissement de la charge d’intérêt de la dette (+25%) et des dépenses de personnel (+15%). En parallèle, les recettes ont cru de 12,5% grâce notamment à l’impôt sur le revenu. Au total, l’exécution budgétaire du gouvernement central au 1er trimestre 2012 présente un déficit de 6,4 Mds TRL, soit une augmentation de 56% par rapport à la période équivalente de 2011. Malgré cela, le déficit budgétaire reste en dessous de 2% du PIB avec un excédent primaire de 11 Mds TRL en très légère augmentation par rapport au 1er trimestre 2011.

Si l’on enregistre une légère augmentation du déficit public en raison principalement des intérêts de la dette, il convient toutefois de noter que celle-ci ne représente que 39,5% du PIB, et est constituée à hauteur de 71% par la dette domestique.

Il convient surtout de noter que la maturité moyenne de la dette domestique est en nette augmentation après un palier de stagnation, passant de 2 ans en 2009 à 2,6 en 2010 et 2011 et 2,9 ans en mars 2012. Pour la dette publique extérieure, la maturité moyenne s’est stabilisée à 9 ans en mars 2012.

b- Un niveau d’inflation qui n’arrive plus à repasser sous la barre des 10%
La hausse des prix des produits pétroliers, la forte dépréciation de la livre turque et la surchauffe économique ont eu des conséquences importantes sur le niveau de l’inflation qui se situe désormais à 10,4% à fin mars 2012 (10,5% en décembre 2011) contre 6,4% observé fin 2010. Ce niveau est certes préoccupant mais doit être relativisé pour un pays qui a connu sur les décennies 1990 et 2000 des inflations à deux chiffres, voire à trois chiffres. L’évolution de la livre turque (1,78 TRY/ USD le 30 mars 2012 contre 1,53 TRY/USD fin décembre 2010) et l’évolution des cours des produits pétroliers seront déterminants pour ramener l’inflation au niveau de 5%, niveau - cible déterminé par la Banque centrale pour 2012. Cet objectif est néanmoins devenu désormais hors de portée.

c- Un déficit des opérations courantes en réduction mais qui subit les effets de la hausse de la facture énergétique
Le principal point noir de l’économie turque réside dans son manque de compétitivité qui se traduit par une forte corrélation entre la croissance et le déficit des paiements courants.

Les observateurs de l’économie turque espéraient que la moindre croissance de 2012 pourrait se traduire par un recul significatif du déficit des paiements courants qui, en 2011, a atteint 77,1 Mds USD soit 10% du PIB (contre un déficit représentant 2,2% du PIB en 2009 et 6,6% du PIB en 2010). Ce creusement s’était expliqué quasi exclusivement par celui de la balance commerciale, passée dans le même temps de 71,6 Mds USD en 2010 à 105,8 Mds USD en 2011.

Le recul observé du déficit des paiements courants de 12 Mds USD en janvier-février 2011 à 10,1 Mds USD en janvier-février 2012 est net mais sans doute insuffisant. L’on signalera une croissance des exportations (données FAB) de 13% et une augmentation des importations (données FAB) de 3,3% provoquant un déficit commercial (en données balance des paiements) en réduction de 12,3 Mds USD à 10,7 Mds USD sur la période considérée. Le solde des services est lui-même en légère augmentation de 900 millions USD à 1,2 Mds USD.

L’augmentation de la facture énergétique sous l’effet des prix a sans doute beaucoup contribué à la moindre réduction du déficit des opérations courantes.

Si la reprise économique a été accompagnée d’une forte augmentation des IDE (15,9 Mds USD en 2011 contre 8,9 Mds USD en 2010), ce niveau est cependant éloigné de la moyenne annuelle de 20 Mds USD observé sur la période 2006-2008, et s’avère surtout insuffisant pour financer de manière significative le déficit des paiements courants.

d- Une perspective de stabilisation du chômage.
Sous l’effet de la forte croissance des années 2010-2011, le taux de chômage officiel est redescendu de 13,5% en 2009 à 9,8% en 2011. Pour autant, l’économie informelle reste à un niveau élevé. Ceteris paribus, le gouvernement considère qu’une croissance de 4% en volume pour 2012, devrait être suffisante pour provoquer une très légère réduction du chômage.

3- Une politique visant à réduire les points faibles de l’économie turque
L’amélioration de la compétitivité de l’économie turque est un objectif majeur, faute de quoi toute forte croissance entrainera un déséquilibre majeur des comptes extérieurs dont le financement ne pourra être assurée que par de la « hot money » comme ce fut le cas dans les années de forte croissance 2010 et 2011.

Les autorités turques ont décidé de s’appuyer sur trois volets pour desserrer la contrainte extérieure :

 Une politique monétaire plus stable ;

 Un encouragement à l’investissement de substitution aux importations et d’accroissement des exportations ;

 Un accroissement de la production d’énergie d’origine nationale ;

a- Une politique monétaire plus stable
Fin 2010 – début 2011, la Banque centrale a en effet adopté une politique visant à déprécier le taux de change et à contenir la croissance du crédit, atteignant son premier objectif mais pas le second. Confrontée à de fortes entrées de capitaux au 3ème trimestre 2010, qui faisaient peser un risque de trop forte appréciation de la livre, les autorités monétaires ont adopté à partir de novembre 2010 une politique de réduction des taux d’intérêt pour diminuer l’attractivité de la livre et d’accroissement des taux de réserves obligatoires pour contenir le crédit. Si cette dernière mesure n’a pas permis d’infléchir la croissance du crédit qui s’est poursuivie au même rythme, la livre s’est dépréciée de près de 30% entre novembre 2010 et août 2011. La dégradation de l’environnement international, à l’été 2011, a contraint à un revirement complet de stratégie, visant à soutenir la livre, mais les réserves de change se sont rapidement révélées insuffisantes. A partir du mois d’août, la Banque centrale a décidé de relever son taux au jour le jour et a commencé à vendre des devises pour soutenir la livre. Ces interventions de change ont pesé sur le niveau des réserves de changes brutes qui sont passées de 94 Mds USD en août 2011 à 78 Mds USD fin 2011 (soit 3,9 mois d’importations).

L’adéquation du niveau des réserves de change aux besoins de financement - estimés à près de 200 Mds USD en 2012 est essentielle. Les taux de refinancement (« roll-over ») de la dette à court terme sont habituellement bons, et même supérieurs à 100%. Le maintien de ces bons niveaux de roll-over dépend en partie de la santé des banques domestiques, qui représentent près de la moitié des besoins de refinancements à court terme de la Turquie.

En février 2012, les réserves de change sont stables à 78 Mds USD soit 4,5 mois d’importations, traduisant une légère augmentation de ce ratio.

b- Une politique d’incitation à l’investissement clairement centrée sur l’amélioration de la compétitivité extérieure de l’économie turque
Une note spécifique reprise dans le numéro de mai de la revue du SER « lumière turquoise » indique les mesures d’incitation que les autorités turques vont prendre afin d’encourager les investissements locaux et étrangers qui permettront une certaine substitution de la production locale aux importations et une augmentation des exportations. Ainsi, l’élasticité du déficit extérieur à la croissance intérieure devrait s’en trouver réduite.

c- Réduire la facture énergétique par le développement d’énergies locales
Si la Turquie occupe une position stratégique entre l’Europe et le Moyen Orient pour le transport d’énergie, ses ressources propres en énergie sont limitées. Dès lors, la dépendance énergétique de la Turquie est grande, près de 75%.

Sous l’effet, de la hausse des prix, la facture énergétique de la Turquie a représenté en 2011, la moitié du déficit commercial du pays et cette proportion pourrait augmenter encore en 2012.

Dès lors, les autorités turques encouragent la production de toute forme d’énergie électrique qui pourrait réduire cette dépendance : énergie nucléaire, énergies éoliennes et solaires, énergies hydroélectriques, centrales thermiques….

Pour avoir plus d’informations sur des données économiques cliquez sur ce lien : Tableau de bord de l’économie turque

Sources : Trésor Direction Générale


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