"Je suis en danger" : à Annemasse, la femme poignardée par son ex-mari avait appelé à l’aide
avec : France Bleu
Quelques semaines avant d’être mortellement poignardée par son ex-mari, le 28 janvier, à Annemasse (Haute-Savoie), une femme s’était confiée à l’association "Espace Femmes" de la Roche-sur-Foron. Après cinq dépôts de plainte pour violences, elle se sentait en danger de mort et n’a pas été écoutée.
"Elle allait partout pour dire : je suis en danger, faites quelque chose !" : dans les locaux de l’association "Espace Femmes" à La Roche-sur-Foron, en Haute-Savoie, Caroline peine à contenir son émotion et sa colère. Depuis deux ans, cette éducatrice spécialisée accompagnait Gulcin dans la séparation d’avec son ex-mari. Cette association vient en aide aux victimes de violences familiales.
Le 28 janvier, au pied de son immeuble, le mari poignarde son ex-femme venue récupérer leur quatre enfants
Le jour de sa mort, Gulcin n’était pas venue seule chercher ses enfants, comme le lui avait conseillé l’association d’aide aux victimes. La jeune femme s’était faite accompagner d’un ami, lequel a été sérieusement blessé par l’ex-conjoint. Cet homme, âgé de 44 ans, est aujourd’hui en détention provisoire, mis en examen pour meurtre par conjoint et tentative de meurtre.
Gulcin avait 34 ans, quatre enfants, un travail de monitrice d’auto-école et un appartement à Annemasse. "Elle avait repris sa vie en main et son indépendance, mais ça se passait mal. La dernière fois que je l’ai vue, c’est au mois de décembre 2018, un mois avant son assassinat. Elle est arrivée très en colère, en disant que personne n’était là pour la protéger, qu’elle avait déposé cinq plaintes, que Monsieur n’avait jamais été convoqué. Elle était très inquiète pour sa vie et elle disait c’est soit lui, soit moi".
"Comment on fait après ça pour aider ces femmes qui passent leur temps à dénoncer, à essayer de se faire entendre".Caroline, éducatrice spécialisée.
Le frère de la victime, que nous avons joint en Turquie, où se déroule cette semaine l’enterrement, nous a confirmé le dépôt de cinq plaintes, et "qu’il détient des preuves concernant les menaces" proférées par l’ancien mari de sa sœur.
"Pour elle, la justice ne l’entendait pas. Elle criait partout, à l’école, au commissariat, mais elle avait le sentiment que rien n’était fait pour la protéger"
Sur ces plaintes déposées et sur les menaces évoquées, le procureur de la République de Thonon-les-Bains, Philippe Toccanier, que nous avons interrogé a indiqué qu’il n’avait "rien à dire sur l’enquête en cours. Si les proches des victimes estiment qu’il y a eu des manquements, ils peuvent se constituer parties civiles".
"Gulcin est l’une des 19 femmes mortes depuis le début de cette année "
Anne, la directrice de Espace Femmes, martèle ce chiffre. "Quand on répète qu’en France, une femme meurt tous les trois jours sous les coups de son conjoint, ou de son ex-conjoint, c’est encore pire que cela en ce début 2019".
"On dit aux victimes de porter plainte. Elles le font de plus en plus. Mais après ???"