Le Trésor veut prendre le contrôle de la banque Isbank
Le président turc Recep Tayyip Erdogan a déclaré mardi que la banque Isbank, l’une des plus grosses du pays, détenue en partie par le principal parti d’opposition, allait passer sous contrôle du Trésor.
"Avec la permission de Dieu, Isbank deviendra la propriété du Trésor. Si Dieu le veut, le Parlement prendra cette décision historique", a déclaré le chef de l’Etat turc lors d’un discours devant son groupe parlementaire à Ankara.
Isbank, de son nom complet Türkiye Is Bankasi, a été créée en 1924 par le fondateur de la République turque Mustafa Kemal Atatürk.
A sa mort, Mustafa Kemal a légué ses parts à son parti, le Parti républicain du peuple (CHP, social-démocrate), qui détient aujourd’hui quelque 28% de l’établissement et nomme quatre des onze membres du conseil d’administration.
Un peu plus de 40% des parts appartiennent au fonds de pension de la banque et les près de 32% restants sont du capital flottant.
Interrogé par des journalistes à l’issue de son discours, M. Erdogan n’a pas donné de détails sur les modalités de la prise de contrôle envisagée par le Trésor. M. Erdogan s’est à plusieurs reprises dit hostile à la participation d’un parti politique au capital d’une banque.
Il n’était pas clair dans l’immédiat si cette mesure reviendrait à une nationalisation de la banque puisque le Trésor ne détiendra pas la majorité des actions.
Le CHP s’oppose vigoureusement au transfert de ses parts au Trésor, appelant à "respecter le testament d’Atatürk" et soulignant que le parti ne gagne pas d’argent avec ces actions.
Selon la Isbank, les dividendes dus au CHP sont en effet versés directement à l’Institution de la langue turque (TDK) et à la Société d’histoire de Turquie, suivant le testament de son fondateur.
Les déclarations de M. Erdogan ont fait reculer l’action de la banque : à 11H00 GMT, elle baissait de 1,2%.
Ces propos surviennent au moment où les banques turques sont fragilisées par la défiance des investisseurs à l’égard des politiques économiques d’Ankara et par la chute de la livre turque qui a perdu 30% de sa valeur face au dollar l’an dernier.
En septembre dernier, M. Erdogan avait déjà appelé à transférer au Trésor les parts détenues par le CHP, qui avait dénoncé une manœuvre politique.
Le Parti de la justice et du développement (AKP, islamo-conservateur) de M. Erdogan ne détient pas suffisamment de sièges au Parlement pour mettre en place les conditions d’un transfert des parts du CHP au Trésor.
Il aurait pour cela besoin de l’appui de son partenaire de coalition, le Parti d’action nationaliste (MHP, extrême droite), une formation farouchement kémaliste.
Source : L’Orient Le Jour