Turquie : le service militaire demeure obligatoire pour les objecteurs de conscience
Le parti pour la Justice et le développement (AKP) est au pouvoir en Turquie depuis 2002. Depuis plusieurs années déjà, un certain nombre de Turcs attendent une réforme de la Constitution du pays, qui date du coup d’État militaire de 1980. Si le gouvernement turc a nettement réduit la participation du militaire dans la gestion politique du pays, il demeure un point sur lequel l’AKP ne semble pas prêt de céder : le service militaire obligatoire.
La loi turque exige que tous les hommes entre 20 et 41 ans accomplissent leur service militaire : six mois pour les diplômés universitaires, quinze mois pour tous les autres. Or, la Turquie a signé la Convention européenne des droits de l’Homme, mais n’en respecte pas le principe qui vise à reconnaître aux citoyens le droit à ne pas faire leur service militaire. La Cour européenne des droits de l’Homme a tenté de faire pression sur l’AKP pour qu’il se conforme à la Convention, mais celui-ci demeure très frileux dans la promotion de la protection légale des objecteurs de conscience.
Ceux qui tentent d’échapper au service militaire sont condamnés à une peine allant de six mois à deux ans de prison, et doivent tout de même l’accomplir à leur sortie. En cas de refus, ils sont remis aux militaires et traduits devant la Cour martiale. Au-delà de l’aspect idéologique, beaucoup de jeunes hommes refusent d’accomplir leur service militaire à cause de la situation sécuritaire dans le Sud-Est de la Turquie et des problèmes liés au conflit avec la minorité kurde, car ils savent qu’il y a de grands risques pour qu’ils aient à y intervenir, et beaucoup craignent d’y perdre la vie.
Le gouvernement turc ne semble pas prêt à intégrer le statut des objecteurs de conscience dans sa nouvelle Constitution. La réduction des peines carcérales semble une avancée plus envisageable. Elle serait toutefois insuffisante, et les militaires l’ont bien compris, qui depuis cinq ans créent des rapports faussés ; dans ces documents ils passent sous silence le statut d’objecteur de conscience des demandeurs, en inscrivant à la place une raison qui les empêcherait d’accomplir leur service militaire, comme un comportement antisocial ou une anxiété extrême.
Malgré tout, bien que cette pratique soit couronnée de succès, elle n’apporte pas de solution durable pour les objecteurs de conscience.
Source : Eurasianet