Roumanie : un village turc transformé en musée vivant

Traduit par Ramona Delcea
Publié dans la presse : 12 juin 2007

Les habitants du petit village de Fantana Mare se réjouissent déjà de la nouvelle : leur bourgade va être transformée en « musée vivant ». Au programme, rénovations des maisons par des hommes d’affaires turcs, création d’un bar à narghilé et arrivages de touristes en provenance de Constanta. Une opération commerciale qui sera certainement très rentable mais qui risque de changer radicalement le mode de vie « traditionnel » de cette petite communauté turque.

Par Cosmin Zaporojan

Un village du 12 ème siècle, Fantana Mare, situé dans le département de Constanta, va être transformé en musée de plein air, grâce à un projet initié par la mairie, en collaboration avec l’Association des hommes d’affaires turcs de Roumanie.

Fantana Mare, ou Baspunar, comme les villageois l’appellent, est un petit village situé à 60 km de la ville portuaire de Constanta, à proximité de la frontière bulgare. Ce petit village inconnu est entré depuis peu dans le circuit touristique de la région. La mairie, avec le soutien de la Direction pour la culture de Constanta, fait actuellement les démarches nécessaires pour faire entrer la localité dans le patrimoine mondial de l’UNESCO en Roumanie. Les villageois ont accueilli la nouvelle avec joie, y voyant un moyen d’améliorer leur niveau de vie.

Le maire du village, Cristea Gascan, a lancé ce projet unique en Roumanie grâce aux fonds européens pour la culture et la conservation des traditions. Le projet stipule que toute la localité sera transformée en musée à l’air libre tout en restant habitable.

120 investisseurs pour 120 maisons

« Ce village a la spécificité d’être uniquement habité par des Turcs ayant des traditions et des habitudes orientales soigneusement conservées. Les habitants ont notamment conservé une vie religieuse, une cuisine spécifique et une architecture très traditionnelle. Nous allons construire à Fantana Mare le premier musée à l’air libre de Roumanie », nous a déclaré le maire. L’investissement sera réalisé intégralement par l’Association des hommes d’affaires turcs, chacune des 120 maisons étant prise en charge par un homme d’affaire. Celui-ci aura la responsabilité de restaurer et de conserver l’architecture turque.

Un objectif : amener des touristes

Le projet sera bientôt lancé. Lors de la première étape, qui débutera en automne, toutes les infrastructures de la localité seront rénovées : les routes, les ponts, voir même le réseau d’eau courante. Ensuite, une deuxième étape verra la réhabilitation des maisons. L’ambassadeur de Turquie en Roumanie s’est rendu dans le village accompagné de plusieurs hommes d’affaires pour faire un état des lieux. Les maisons auront non seulement un rôle de musée mais elles pourront également héberger des touristes.

« Le village était déjà classé sur la liste nationale des monuments historiques comme site antique, ce qui nous a facilité la tâche », affirme le maire du village, qui espère ouvrir le musée dans deux ans.

Pour les villageois, néanmoins, tout n’est pas rose. Ceux qui ont modernisé leurs maisons auront des surprises. Les vitres thérmo-isolantes seront remplacées par des vitres traditionnelles, tout comme le toit des maisons ; pour ce qui est des antennes paraboliques, celles-ci disparaîtront définitivement. En revanche, ils pourront profiter d’un bar à narghilé, qui sera bientôt construit au centre ville.

« Nous souhaitons louer des cars pour amener les touristes de Constanta et des stations balnéaires à venir visiter le village. Afin d’attirer les agences touristiques, nous avons déjà inclus le village dans le circuit touristique de la région. Les touristes pourront visiter les maisons, goûter à la cuisine traditionnelle et découvrir les coutumes turques. Pour ceux qui le souhaitent, nous offrons des possibilités d’hébergement, ce qui apportera un petit revenu aux villageois, qui sont souvent très pauvres », a expliqué le maire.

Des réparations attendues avec impatience

Les habitants de Fantana Mare connaissent le projet de la mairie et en semblent ravis. Beaucoup d’entre eux espèrent qu’avec ce projet ils pourront fuir la pauvreté qui les touche depuis si longtemps. Osman Eminee vit avec sa famille et sa belle-famille dans une maison traditionnelle. La pauvreté et le temps ont marqué leur maison. Le toit est sur le point de s’écrouler, les mûrs sont abîmés et les fenêtres sont craquelées. « Nous attendons les gens dont le maire nous a parlé pour réparer la maison. Nous participeront au projet sans aucun problème et nous accueilliront les visiteurs avec plaisir. Nous pourrons leur cuisiner des baklavas, du suberec, du café au sable. Tout ce que nous savons faire », nous a-t-il confié plein d’espoir.
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