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Mir Yacoub Mehtiev : "Le problème du Caucase"

Publié le | par SibiryaKurdu | Nombre de visite 227
Mir Yacoub Mehtiev : "Le problème du Caucase"

Mir Yacoub, "Le problème du Caucase", Prométhée, n° 45, août 1930, p. 1-2 :

Ces derniers temps la presse du Caucase a été absorbée par la question de l’union de tous les peuples qui l’habitent. Tous les partis, depuis les nationalistes jusqu’aux socialistes, toutes les classes, les ouvriers et la bourgeoisie se sont familiarisés avec ce problème que la vie elle-même a posé. L’idée d’unité du Caucase prend de jour en jour plus de consistance aussi bien parmi l’émigration que parmi les peuples qui l’habitent. Cette union est appelée à jouer le rôle de facteur de paix et de progrès sur un point important du globe servant de lien entre l’Asie et l’Europe, l’Orient et l’Occident, où deux civilisations, l’ancienne et la nouvelle se rejoignent. Le Caucase dans son ensemble ne représente pas seulement une conception géographique mais encore il constitue un tout au point de vue politique. L’Azerbaïdjan et la Géorgie constituent les centres de gravité du Caucase et les points d’appui de ces centres, Bakou-Batoum, représentent les ponts servant de voies d’échanges entre l’Asie et l’Europe.

L’Azerbaïdjan et la Géorgie jouent un rôle important non seulement dans le domaine économique mais aussi sur le terrain politique. Ces deux Etats constituent l’épine dorsale de la chaîne du Caucase, appelée à devenir un Etat indépendant. Les peuples du Nord du Caucase se sont attachés à cette chaîne pour former un tout indivisible. Et quant à notre voisin du Midi, son entrée dans cette union n’est plus qu’une question de temps. Le fait que les Arméniens se trouvent en dehors de cette combinaison est anormal, attendu que l’Arménie est liée avec notre pays par des liens indissolubles aussi bien politique qu’économiques. Cette vérité a été comprise du peuple arménien dans son entier. Il a fort bien saisi qu’il faut d’abord s’orienter sur les voisins car c’est avec eux qu’il faut vivre avant tout. Cette vérité toutefois n’a pas encore, hélas ! été comprise par les dachnaks et il faut attendre que se produise le revirement psychologique de ce parti qui a commis tant de fautes dans le passé et qui a causé tant de malheurs et de souffrances à son peuple. Le mal est que, jusqu’à présent, ce parti traverse une période de romantisme qui le fait rêver de constitution d’une Grande Arménie, d’une mer à l’autre. Les Dachnaks ne se sont pas encore familiarisés avec les nouveaux principes issus de l’idéologie du XXe siècle, car la création d’un Etat indépendant ne constitue pas encore par lui-même un but, ce n’est au plus qu’un moyen pour enrichir et rendre prospère qui habitent ce territoire. Et nous répétons que la base d’un Etat repose sur ses possibilités économiques et non sur le romantisme. Il est clair pour tout économiste impartial que le Caucase en général et la Transcaucasie en particulier forme un tout complet. Séparer Erivan de Tiflis ou Tiflis de Bakou est chose totalement impossible. Elever des murailles douanières entre trois points donnés équivaut à la ruine de l’économie nationale de la Transcaucasie. Comment pourrait vivre Erivan ou Bakou sans Batoum, seul débouché vers la mer libre ? Actuellement, un pipe-line géant relie Bakou à Batoum ; c’est, après l’Amérique, la réserve la plus considérable de naphte et ce n’est que par Batoum que cette richesse peut être expédiée en Europe. Qu’on sépare Erivan de Tiflis par une barrière douanière et la république d’Arménie mourra d’étouffement. Ce sont là des vérités si élémentaires que cela ne vaut pas la peine de dépenser des forces pour convaincre le lecteur impartial et objectif.

Mais en dehors de l’unité économique il existe encore une unité culturelle. Les peuples du Caucase ont des conceptions particulières résultant de l’influence d’une communauté de culture. Le destin les a unis dans le passé et l’histoire contient maints témoignages de ce que les peuples du Caucase ont uni leurs forces contre l’agresseur. Nous dirions même que le Caucase n’a qu’une âme, bien que ses peuples s’expriment différemment. La science n’a-t-elle pas montré que la langue par elle-même n’est pas un facteur strictement déterminant pour exprimer l’idée de nation, qu’elle n’est en somme qu’un facteur de son progrès.

Et du moment que nous admettons que le Caucase au point de vue économique et culturel forme un tout indivisible, le soin de le garder, de le défendre incombe à tous ses habitants. Conséquemment, le danger qui menacerait l’un de ses peuples doit intéresser l’ensemble des peuples du Caucase, c’est pourquoi, disons-nous, les mesures prises par l’un de ses peuples aux fins de sa défense doivent être coordonnées et unifiées. Dans cette unification caucasienne, tous les peuples du Caucase doivent jouir des mêmes droits et remplir les mêmes obligations. Justice, égalité, telles sont les pierres de touche de la future Union. L’idée de l’unité caucasienne possède son but exclusif, lequel s’exprime par un développement intensif de la vie économique du pays et par un meilleur accroissement de progrès. Rien en cela qui ne soit dirigé contre les voisins. Si nous parlons de défense commune, ce n’est évidemment que dans un but de conservation, que pour défendre l’intégrité du Caucase au cas où un Etat impérialiste quelconque tenterait de l’attaquer. Loin de nous la pensée d’isoler le Caucase par une muraille chinoise : des relations de bon voisinage seront établies avec tous les pays limitrophes, avec la Turquie, la Perse, la Russie ; au point de vue économique, des accords largement profitables seront faits. Mais au point de vue politique le Caucase doit être indépendant.

Nous répétons une fois de plus que son but est de mieux servir la cause du progrès et de la paix dans cette partie du monde. Nous repoussons de la manière la plus absolue les desseins que nous prêtent nos ennemis lorsqu’ils déclarent que l’unité du Caucase serait dirigée contre une tierce puissance. Ne savons-nous pas que le fait de se dresser contre « une puissance quelconque » est une arme à deux tranchants qui se retourne le plus souvent contre ceux qui s’en servent ?...

La future Confédération Caucasienne ne sera pas le résultat de considérations diplomatiques, elle sera dictée par la marche des événements et par l’histoire.

Mir.


Voir également : Mir Yacoub Mehtiev : "La Question Arménienne"

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