Le statut des relations de notre pays avec l’Union européenne ne s’inscrit pas dans le cadre de la Politique Européenne de Voisinage et du Partenariat Oriental.
En effet, notre statut va au-delà de ce cadre. Toutefois, en affirmant que l’Union européenne reste notre objectif, si nous soutenons des initiatives qui affaiblissent les institutions unificatrices de l’Union et nous marginalisent au lieu d’appliquer les droits fondamentaux, nous ne pourrons blâmer personne d’autre pour l’échec de notre objectif d’adhésion pleine et entière à l’UE.
Source : Yetkin Report
Auteur : Özdem Sanberk / 09 juillet 2024, mardi / Rubrique : Politique
Comme on le sait, l’Union européenne, initialement créée sous le nom de Marché Commun avec six États en 1957, a réalisé de grands progrès au cours des 70 dernières années malgré ses nombreux problèmes actuels. Ces progrès, à la fois en profondeur et en élargissement, ont été réalisés par une méthode progressive, étape par étape.
Aujourd’hui, l’union basée sur la démocratie, la liberté, la sécurité et la prospérité qui couvre une grande partie du continent européen, est devenue l’acteur politique et économique le plus développé du monde avec ses 27 membres, et aussi un sujet distinct du Droit des États. Tout en croissant politiquement et économiquement en interne, l’UE a suivi une politique visant à placer ses régions voisines dans une couverture régionale compatible avec elle-même sous la Politique Européenne de Voisinage.
Politique de Voisinage Européenne
La Politique Européenne de Voisinage de l’UE, introduite en 2004 et mise en œuvre lors du Sommet de Lisbonne en 2007, régule les relations avec 16 États partageant une proximité géographique avec l’UE. Il n’est pas question d’adhésion complète ici, mais l’objectif ultime de couvrir tout le continent européen n’est pas à remettre en question. Cependant, les États partenaires de cette politique, en fonction de leurs performances et de la volonté de leurs peuples, peuvent accélérer leur processus d’adhésion, atteindre l’adhésion ou rester en retrait selon les conditions diplomatiques internationales.
La Politique Européenne de Voisinage inclut un volet méditerranéen au sud (Processus de Barcelone) et un volet oriental couvrant l’Azerbaïdjan, l’Arménie, la Géorgie, la Moldavie, l’Ukraine et la Biélorussie.
Le Processus d’Adhésion de la Turquie
Les relations de la Turquie et des États des Balkans occidentaux non membres (Albanie, Serbie, Kosovo, Bosnie-Herzégovine, Monténégro et Macédoine) avec l’Union sont définies comme celles de pays potentiellement membres à part entière. Les relations actuelles de ces pays avec les 27 États membres de l’UE varient selon leurs conditions économiques et politiques spécifiques et les formats uniques à chacun.
Quand il est question de l’adhésion de notre pays à l’UE, une partie significative de la population en Turquie pense aux forces extérieures et à leurs intentions cachées envers la Turquie. En 2005, le gouvernement AKP avait réussi à briser les préjugés profondément enracinés en Europe contre les Turcs et la Turquie en lançant les négociations d’adhésion pleine et entière. Cependant, la même année, déclarée Année de l’Afrique par le gouvernement AKP, reste une énigme quant aux raisons qui ont motivé cette décision.
Déclaration de la Réunion Tripartite : La Turquie Absent
En conséquence, bien que nos négociations d’adhésion soient actuellement interrompues, elles ne sont pas terminées juridiquement. C’est pourquoi le statut de nos relations avec l’Union européenne ne s’inscrit pas dans le cadre de la Politique Européenne de Voisinage du Partenariat Oriental, car notre statut va au-delà de ce cadre.
Ainsi, la déclaration de la réunion tripartite entre l’UE, les États-Unis et l’Arménie le 5 avril dernier n’a pas mentionné la Turquie. En effet, mentionner les relations Turquie-UE dans un document de Politique de Voisinage Européenne constituerait un recul dans la nature juridique de nos relations. L’Accord d’Ankara de 1963 a prévu que notre pays se dirige vers l’adhésion pleine et entière par l’union douanière, et la Turquie a ensuite obtenu le statut de pays candidat aux négociations.
Importance des Relations Turquie-UE
Il est crucial de comprendre la véritable nature des relations Turquie-UE, qui vont au-delà d’un partenariat stratégique et possèdent une qualité qui dépasse parfois notre attention. Il est impératif de ne pas altérer notre perspective héritée de l’Accord d’Ankara de 1963 et du début des négociations d’adhésion en 2005, car cela pourrait compromettre notre position mondiale. Les relations Turquie-UE, même si elles sont occasionnellement mises de côté, constituent un acquis communautaire mutuel.
À la lumière de cette réalité, nous devons réintroduire à notre agenda les normes de démocratie, d’État de droit, de justice impartiale et de liberté de la presse que nous avons partiellement appliquée dans un passé récent.
Se Marginaliser
Si nous affirmons que l’Union européenne reste notre objectif tout en soutenant des initiatives qui affaiblissent les institutions unificatrices de l’Union, nous ne pourrons blâmer personne d’autre pour l’échec de notre objectif d’adhésion pleine et entière. En d’autres termes, si nous permettons à des forces centrifuges de nous éloigner de notre objectif principal au lieu de renforcer les dynamiques unificatrices de l’UE, nous ne serons pas cohérents dans notre objectif d’adhésion à l’UE.
Par exemple, ouvrir le débat sur la suppression de la Cour constitutionnelle ou tenter de modifier les quatre premiers articles inamovibles de notre Constitution n’apporterait ni plus de liberté, ni plus de sécurité, ni plus de prospérité à la Turquie. Nous devons éviter les initiatives qui dilueraient la science et la rationalité dans notre système éducatif, comme le prescrit l’article cinq de notre Constitution. La seule voie pour y parvenir est un modèle éducatif national fondé sur la réalité, la science et la rationalité. Il est clair que l’éducation religieuse dans nos écoles doit respecter la liberté de croyance de chacun, sans imposer ses convictions aux autres. Comprise ainsi, la laïcité apportera paix et tranquillité à l’ensemble du pays.
Conclusion
En résumé, notre adhésion pleine et entière à l’UE nécessite d’abord et avant tout notre volonté, en tant qu’État et société. Nous devons convaincre non seulement les autorités officielles de l’UE, mais aussi l’opinion publique européenne de cette volonté. La voie à suivre est une mobilisation nationale intense, similaire à celle réalisée par les pays candidats d’Europe du Nord et de l’Est, de la Grèce, de l’Espagne et du Portugal à leur époque.
Notes
(*) L’Ukraine, en raison du soutien politique, économique et militaire intense reçu du monde occidental face à l’agression russe, a persuadé l’UE d’ouvrir des négociations d’adhésion en accéléré ; la Géorgie a signé un Accord d’association avec l’UE en 2014 pour des raisons semblables ; et la Biélorussie a mis fin à ses relations avec l’UE à sa propre demande.