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LA PALESTINE ET LA CPI

Synthèse juridique

20 mai 2021
Gilles DEVERS, Avocat


Editos & Tribune libre

[Synthèse juridique] La Palestine et la CPI

Publié le | par Engin | Nombre de visite 331
[Synthèse juridique] La Palestine et la CPI

La Cour Pénale Internationale est l’un des outils permettant l’application du droit international, à utiliser avec beaucoup de prudence.

Vis-à-vis des enjeux pour la Palestine, le bilan est bon, et l’avenir prometteur.

1 - FAITS

1. Le recours à la Cour pénale internationale n’a rien d’exclusif, mais le constat est que les dirigeants palestiniens n’ont - hélas - pas utilisé les outils du droit européen pour attaquer la colonisation, se privant de recours très efficaces, ce d’autant plus qu’il existe un accord signé entre l’OLP et l’Union européenne.

2. Dans ces conditions, et vu le jeu politique cadenassé, la Cour pénale internationale devient « la seule » possibilité d’accès à une instance capable d’appliquer le droit international.

3. Les premières plaintes datent de 2008 (Plomb durci), et ce délai laisse le sentiment d’une inertie de la CPI. Il est certain que le procureur Ocampo, dont le manque d’honnêteté est aujourd’hui établi, aurait pu faire davantage, mais la principale faille était l’inertie de la direction palestinienne. Il faudra attendre le 31 décembre 2014 pour que la Palestine ratifie le traité, et mai 2018 pour qu’elle dépose plainte.

4. Précision : la Palestine a ratifié le traité le 31 décembre 2014, mais avec une déclaration rétroactive au 13 juin 2014, ce qui sera la date de référence, et donne compétence pour l’opération militaire de l’été 2014.

Depuis, la Cour a été assez diligente.

6. En décembre 2020, la procureure a indiqué qu’elle disposait d’éléments justifiant l’ouverture d’une enquête pour crimes de guerre, mais avant d’ouvrir cette enquête, elle demandait à la Cour de se prononcer sur deux questions :

  • la Palestine est-elle un État, pouvant ratifier le traité de la CPI ? sur quel territoire l’Etat de Palestine exerce-t-elle sa souveraineté ?

Il s’en est suivi un large débat, avec de nombreux intervenants soutenant la thèse israélienne, qui s’est clos par une décision de la Cour du 5 février 2021. Il ne s’agit pas d’une décision du Procureur, mais bien d’un arrêt rendu par la Cour. Cet arrêt est resté très méconnu, car aussitôt s’est mis en place une communication pour le présenter comme une mesure technique secondaire, alors qu’il est de première importance.

8. En effet, la Cour a jugé que la Palestine est un État, qui a pu valablement ratifier le traité, et avec une souveraineté sur la Cisjordanie, Gaza et Jérusalem Est. Ainsi, la Cour place la Palestine comme Etat à l’égal des autres Etats membres de la CPI, avec une souveraineté sur l’ensemble des territoires, ce qui d’emblée condamne la colonisation, dont celle de Jérusalem Est.

9. Après cette décision confirmant la compétence de la Cour, la procureure a annoncé qu’elle avait décidé d’ouvrir une enquête. Cette enquête concerne trois faits principaux • l’opération militaire de l’été 2014 ; la colonisation en Cisjordanie et à Jérusalem Est • l’événement « La marche du retour » à Gaza, avec les tirs sur les manifestants Gazaouis.

10. Avant de poursuivre, la procureure a vérifié le principe de subsidiarité : la Cour n’enquête pas, si les Etats démontrent une volonté effective d’engager eux-mêmes des procédures d’enquête.

11. La Palestine a répondu qu’elle s’en remettait à la compétence de la CPI

12. Israël a répondu qu’il n’ouvrirait pas d’enquêtes, et qu’il déniait la compétence de la CPI.

B - Analyse

1/ L’essentiel

13. Deux points sont acquis avant même l’ouverture de l’enquête.

14. Devant la CPI, la Palestine est un État comme les autres et les citoyens palestiniens égaux aux autres. On mesure l’avancée, et ce que nous allons pouvoir en faire.

15• La « démocratie » refuse le droit international et injurie la Cour, alors que les « terroristes » demandent l’application du droit international et veulent coopérer avec la Cour. Qui est le véritable terroriste ?

2/ Du point de vue palestinien

16. Il y a une unité des forces politiques pour soutenir cette procédure. Avant la ratification, le président Abbas a demandé un accord écrit de tous les groupes politiques, ce qui a été fait.

17. Devant une juridiction pénale, le but final est d’obtenir des condamnations, mais dans le cas présent, les gains majeurs viendront des avancées dans la procédure, c’est-à-dire de l’application du droit international à la situation de Palestine. Le débat juridique va s’enclencher sur les bases acquises, à savoir un Etat et une souveraineté sur l’ensemble des territoires, ce qui permettra de repositionner toutes les questions juridiques sur l’occupation militaire. Le travail sera profitable par une bonne coopération entre le juridique et le politique.

18. La résistance armée palestinienne sait parfaitement qu’elle sera mise en accusation notamment pour les tirs de roquettes, mais elle assume ce débat, et elle argumentera sur la résistance armée comme condition de protection du peuple dans le cadre de la légitime défense, telle qu’il est prévu par l’article 23 du statut. A partir des années 1968, le recours à la résistance armée a largement été qualifié de « terroriste », mais il a conduit à la reconnaissance de l’OLP comme mouvement de libération nationale, observateur à l’ONU en 1974. S’ajoute actuellement le déni du cadre juridique, qui empêche toute négociation sérieuse, et une énorme disproportion de moyens financiers et militaires.

19. Malgré la faiblesse des informations valables, la société civile palestinienne s’intéresse de plus en plus cette procédure.

20. La procédure met en lumière le rôle néfaste de « grandes ONG » qui, au prétexte des droits de l’homme, cherchent à se substituer à l’exercice du pouvoir judiciaire par la Palestine, c’est à-dire qu’elles accréditent l’absence d’Etat palestinien.

3/ Du point de vue israélien

21. Cette procédure est présentée comme secondaire, sur le thème « Ils peuvent faire ce qu’ils veulent, nous n’avons pas reconnu la Cour ». En réalité, les services sont mobilisés pour jouer de leur influence, mais avec bien peu de résultats.

22. Contrairement à un discours entretenu, le fait qu’Israël n’aie pas reconnu la Cour est indifférent. La Cour est compétente pour tous les crimes commis sur le territoire palestinien, quel que soit la nationalité de l’auteur du crime. C’est une logique de protection du territoire. Selon ses statuts, la CPI peut condamner des personnes qui ne sont pas ressortissants d’Etats membres et délivrer des mandats d’arrêt.

23. L’arrêt du 5 février 2021 détruit la thèse juridique d’Israël, qui avait été explicitement soutenu par le procureur général Israël au mois de décembre 2020. Selon cette thèse, le mandat de 1921 de la SDN sur la Palestine prévoyait la création d’un foyer national juif, mais sans définir les limites de telle sorte que, lors du retrait de l’administrateur britannique en 1948, l’État d’Israël avait juridiction sur la totalité du territoire. Par bienveillance, l’État d’Israël accepte de reconnaître des droits aux populations arabes, mais celles-ci ne peuvent avoir de droits que concédés par Israël, dans le cadre de négociations bilatérales. C’est toute logique des accords d’Oslo qui enferment la Palestine dans une dépendance vis-à-vis d’Israël par la négociation.

24. L’arrêt du 5 février 2021 ruine cette thèse, en donnant comme source à l’État palestinien sa souveraineté sur le territoire, et non pas une concession faite par Israël. Désormais, les Palestiniens s’affirment sur la base du droit international, et non pas dans une logique bilatérale. De ce fait, ils peuvent rompre avec la zone de droit dans laquelle patauge

« l’autorité palestinienne », avec le retour au statut de gouvernement souverain d’un territoire sous occupation militaire, soit la pleine application de la IVeme convention de Genève.

25. Interrogé par le procureur, Israël a dit qu’il ne coopérait pas avec la procédure. Nous avons aussitôt répliqué qu’Israël dénie l’arrêt du 5 février 2021 et se place dans un système juridique alternatif au droit international, ce qui ruine toute crédibilité à ses argumentaires factuels et juridiques.

3/ Le dossier de la

26. L’attention médiatique se focalise sur les crimes de sang et les destructions civiles massives, mais s’agissant des effets politiques et pratiques, le dossier le plus producteur sera celui de la colonisation. Le crime de colonisation est prévu par le statut de Cour, sous l’angle de transfert de population.

27. La preuve de la colonisation est aisée, avec des décisions publiques proclamées dans le cadre d’une politique d’État. Le principe de la condamnation résulte de l’arrêt du 5 février 2021 qui a reconnu la souveraineté palestinienne sur la Cisjordanie et Jérusalem Est.

28. Une déclaration de culpabilité contre des dirigeants israéliens aura des effets en chaine, à savoir le devoir des Etats membres de la CPI de sanctionner leurs ressortissants habitant dans ses colonies, et de condamner toute entreprise participant à la colonisation.

29. Les réfugiés ayant des attaches dans le territoire des colonies vont pouvoir se constituer victime dans la procédure, et dans un second temps, l’ensemble des réfugiés ne pouvant entrer sur le territoire palestinien se constituer victime du crime de colonisation.

30. Les dirigeants israéliens qui s’opposeront au droit au retour seront systématiquement poursuivis.

4/ S’agissant de Jérusalem Est

31. L’arrêt du 5 février 2021 a statué que Jérusalem-Est relevait de la compétence territoriale de l’État de Palestine. De telle sorte, le juge israélien n’a pas compétence pour rendre un jugement traitant le territoire palestinien. Il faut donc préparer des plaintes pénales contre les juges de la Cour suprême qui sont complices de la colonisation.

5/ Evolution de la procédure

32. Depuis une décennie, nous entendons qu’il y aura tellement de pressions internationales, qu’il ne se passera rien. Or, il n’en a rien été : la Palestine a pu adhérer à la CPI, et porter plainte contre Israël ; la CPI a reconnu la Palestine comme Etat, avec la souveraineté sur l’ensemble des territoires ; la procureure a ouvert une enquête ; aucun Etat membre ne s’est directement opposé à la procédure.

33. Pour limiter les pressions, la procureure agit avec beaucoup d’autonomie mais les victimes, par leurs avocats, peuvent participer à la procédure et mesurer l’avancement.

34 • Il reste à amplifier les gains obtenus devant la CPI par des actions devant d’autres juridictions notamment la Cour de justice de l’Union européenne pour les produits issus des territoires occupés.

35. A ce stade il est possible d’affirmer que la condamnation pénale de responsables politiques et militaires israéliens est à terme inévitable.

 
ICC-01/18-143 05-02-2021 1/60 EC PT

Court
Original : English No. ICC-01/18
Date : 5 February 2021
PRE-TRIAL CHAMBER 1
Before : Judge Péter Kovåcs, Presiding Judge
Judge Marc Perrin de Brichambaut
Judge Reine Adélaide Sophie Alapini-Gansou
SITUATION IN THE STATE OF PALESTINE
URGENT
Public
Decision on the ’Prosecution request pursuant to article 19(3) for a ruling on the
Court’s territorial jurisdiction in Palestine’
No : ICC-01/18 1/60 5 February 2021

lcc-01/18-143
FOR THESE REASONS, THE CHAMBER HEREBY
FINDS that Palestine is a State Party to the Statute ;
FINDS, by majority, Judge Kovåcs dissenting, that, as a consequence, Palestine qualifies as ’[t]he State on the territory of which the conduct in question occurred’ for the purposes of article 12(2)(a) of the Statute ; and
FINDS, by majority, Judge Kovåcs dissenting, that the Court’s territorial jurisdiction in the Situation in Palestine extends to the territories occupied by
Israel since 1967, namely Gaza and the West Bank, including East Jerusalem.
Done in both English and French, the English version being authoritative.
Judge Péter Kovåcs appends a partly dissenting opinion.
Judge Marc Perrin de Brichambaut appends a partly separate opinion.

Judge Marc Perrin de Brichambaut Judge Reine Adélaide Sophie
Alapini-Gansou
Dated this Friday, 5 February 2021
At The Hague, The Netherlands
No : ICC-01/18 60/60
[21:57, 20/05/2021] Engin Akgurbuz : Le propriétaire de la tour de Gaza qui abritait Associated Press et Al-Jazeera

porte plainte devant la Cour pénale internationale ce 21 mai

20 mai 2021

Le 15 mai 2021, l’armée israélienne, par plusieurs bombardements, a détruit l’immeuble situé à Gaza regroupant des locaux commerciaux, ainsi les bureaux de l’agence de presse Associated Press (AP) et de la chaîne qatarie Al-Jazeera.

Il s’agit d’un crime de guerre, car cette destruction d’un bien civil ne peut être justifiée par aucun objectif militaire, et ce bien civil était d’autant plus protégé qu’il accueillait de grands organes de presse, dont le rôle, essentiel en tant de guerre, est protégé par le droit international. Cette attaque prend place dans un plan systématique qui a détruit les …
[21:58, 20/05/2021] Engin Akgurbuz : The owner of the Gaza Tower that housed the Associated Press and Al-Jazeera files a complaint with the International Criminal Court on May 21

May 20, 2021

On May 15, 2021, the Israeli army, through several bombardments, destroyed a building in Gaza occupied by business companies, and aslo by the Associated Press (AP) and the Qatari channel AlJazeera.

This attack is a war crime, because this destruction of civilian property cannot be justified by any military objective, and this civilian property is all the more protected as it hosted major media organizations, whose role, essential as a war, is protected by international law. This attack is part of a systematic plan that destroyed the offices of some 20 agencies and press organs in Gaza.

The owner of this building, who is a Palestinian, has mandated his lawyers to file a war crime complaint with the International Criminal Court.

In fact, this is a serious violation of article 8, 2, b, ii) of the statute which defines as a war crime "the fact of intentionally directing attacks against civilian objects is that is, goods which are not military objectives ”.

This attack is also a violation of the rule 34 of customary international humanitarian law, taken up by Article 79 of Additional Protocol I to the Geneva Conventions : “Civilian journalists who carry out professional missions in zones of armed conflict must be respected and protected, as long as they do not take a direct part in hostilities ”.

In application of these texts, the lawyers will be this Friday May 21 at midday at the headquarters of the International Criminal Court in The HAGUE to register this complaint.

Contact : Me Gilles DEVERS, lawyer registered with the ICC Bar : gilles@deversavocats.com - Tel 336.14.26.31.69


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